Une étude d’impact du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi a été rendue publique le 21 avril 2015. Cette étude estime l’« impact emploi » des mesures qui pourraient avoir un effet en matière d’emploi, ce qui est très positif sur le principe.
L’IMPACT EMPLOI DU PROJET DE LOI INITIAL SEMBLE INDIRECT ET TRÈS LIMITE
À lire les conclusions de ce rapport, l’impact emploi du projet de loi initial semble indirect et limité. Voici le contenu complet de l’impact correspondant aux diverses mesures.
- Représentation universelle des salariés des très petites entreprises (article 1er) :« Impact indirect : les commissions pourront faire progresser le dialogue social sur l’emploi en faveur des TPE et améliorer ainsi leur attractivité/pérennité. »
- Nouvelle reconnaissance des représentants syndicaux et titulaires de mandats dans les entreprises (articles 2 à 4) : « Les dispositifs d’entretiens et de valorisation des compétences vont permettre d’améliorer les chances des représentants du personnel d’évoluer vers des emplois plus qualifiés ou mieux rémunérés à l’issue de leur mandat. »
- Délégation unique du Personnel élargie et réformée (article 8) : « La mesure proposée permettra de neutraliser l’effet de seuil actuel à 200 salariés. Elle recrée certes un seuil à 300 salariés, mais avec un effet atténué puisque si la DUP a fonctionné, l’employeur pourra conclure un accord permettant de regrouper les IRP. Un fonctionnement plus simple et plus efficace pourra avoir des effets positifs en termes de productivité, et indirectement sur l’emploi. »
- Regroupement d’institutions par accord majoritaire dans les entreprises de plus de 300 salariés (article 9) :« La possibilité de conclure un accord pour regrouper les instances permettra d’atténuer le seuil de 300 salariés au-delà duquel l’employeur ne peut plus recourir à la DUP. Ce regroupement aura comme conséquence un fonctionnement plus lisible et plus efficace, ce qui pourra engendrer des effets positifs en termes de productivité, et indirectement sur l’emploi. »
- Dialogue social plus stratégique dans les entreprises : « Plusieurs études (op. cit.) montrent qu’une meilleure qualité du dialogue social tend à renforcer l’emploi durable dans les entreprises concernées et à limiter les effets de turnover non souhaités Un dialogue social plus stratégique et moins formel y contribue. »
- Regroupement des négociations obligatoires (article 14) : « La négociation sur l’emploi dans l’entreprise sera rendue plus cohérente, plus lisible et tiendra compte des dimensions de GPEC et de gestion des âges. »
- Franchissements de seuils (article 16) : « La réduction du nombre de réunions obligatoires du CE induit une baisse du coût du travail pour les entreprises qui pourra avoir des effets positifs en termes de productivité, et indirectement sur l’emploi. »
- Sécurisation des parcours et retour à l’emploi : « Des impacts positifs sur l’emploi sont attendus, en sécurisant les parcours et en renforçant l’efficacité du marché du travail. »
- Clarification de la participation de l’AFPA au service public de l’emploi (article 22)[1] : « Le taux de réussite des stagiaires de l’AFPA à l’obtention des titres est de plus de 80 % en 2013, et elle assure un taux de retour à l’emploi des demandeurs d’emploi formés de près de 60 %. »
- La création du contrat « nouvelle chance » (article 23) ouvrant le contrat de professionnalisation aux chômeurs de longue durée : « Les dispositions prévues visent à améliorer l’accès à l’emploi des demandeurs d’emploi de longue durée, en adaptant la durée du contrat et la durée de formation aux spécificités de ces publics, notamment à travers la prise en charge pour les premiers niveaux de qualification de formations visant à l’assimilation des prérequis nécessaires à l’entrée en formation qualifiante. S’agissant d’un dispositif permettant de répondre à des besoins très spécifiques, l’impact quantitatif devrait rester modeste et aucun objectif chiffré n’est fixé ex ante. »
Les mesures du projet de loi concernent le domaine du « travail » mais pas celui de l’emploi.
Les articles réaffirmant le rôle de l’AFPA et l’ouverture du contrat de professionnalisation aux chômeurs de longue durée concernent eux la formation professionnelle.
L’IMPACT EMPLOI DE LA PRIME D’ACTIVITÉ.
L’impact emploi de la nouvelle prime d’activité (article 24) est présenté par le rapport[2].
« La prime d’activité encourage l’activité en soutenant le pouvoir d’achat des travailleurs modestes. Elle augmente significativement les gains au maintien ou à la reprise d’emploi, à temps partiel comme à temps complet. Cela permet de lever certains freins monétaires à la reprise d’emploi. ». C’était déjà l’objet des dispositifs antérieurs.
Le principal apport annoncé du nouveau dispositif par rapport à la « prime pour l’emploi » et au RSA « activité » porte sur un délai plus court de versement (qui reste à prouver dans la pratique).
Le ciblage de la mesure vers les travailleurs à trois quarts ou à plein temps pénalise les temps partiels plus courts alors que ceux-ci apparaissent souvent comme une marche dans la reprise d’activité. En ce sens, la prime d’activité apparait davantage comme une mesure en faveur du pouvoir d’achat des bas salaires qu’en faveur du retour à l’emploi de chômeurs.
Selon la configuration familiale, les effets sur l’emploi sont contradictoires : « La prime d’activité soutient significativement la reprise d’activité des familles monoparentales ou des couples inactifs : pour ces configurations familiales, elle permet notamment d’éviter qu’une reprise d’activité à mi-temps ne se traduise par une absence d’augmentation du revenu. La prime d’activité soutient moins nettement la reprise d’activité pour les couples dans lesquels un actif travaille déjà et est, à ce titre, déjà éligible à la prime d’activité pour des montants significatifs. »
Il est surprenant que ce constat de bon sens concernant la situation des couples bi actifs ne soit pas pris en compte. Il en est de même dans le cas de la mise sous condition de ressources des allocations familiales qui interviendra dès le 1er juillet 2015.
La création de la prime d’activité concerne le pouvoir d’achat des bas salaires.
[1] Article 22 – « ASSOCIATION NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES « Art. L. 5315-1. – L’association nationale pour la formation professionnelle des adultes, dans le cadre de sa mission de service public pour l’emploi, participe à la formation des personnes les plus éloignées de l’emploi et contribue à leur insertion professionnelle. Elle contribue à la politique de certification menée par le ministère chargé de l’emploi. »
[2] « La prime d’activité encourage l’activité en soutenant le pouvoir d’achat des travailleurs modestes. Elle augmente significativement les gains au maintien ou à la reprise d’emploi, à temps partiel comme à temps complet. Cela permet de lever certains freins monétaires à la reprise d’emploi.
Contrairement à la prime pour l’emploi, elle fait preuve d’une grande réactivité : dès le premier mois de reprise d’activité, la personne peut faire une demande de prime d’activité à sa CAF, et percevoir dès le mois suivant son complément de revenu. Pour les allocataires du RSA (socle) qui remplissent habituellement une déclaration trimestrielle de ressources et reprennent une activité, l’attribution de la prime d’activité est automatique. Pour mémoire, il fallait attendre plus d’une année pour que la prime pour l’emploi soit versée à la suite d’une reprise d’activité.
En outre, à la différence du RSA-activité, qui, notamment pour les célibataires, concentrait l’effort budgétaire sur les reprises d’emploi à temps partiel, la prime d’activité maintient l’aide apportée aux personnes travaillant à temps partiel, mais cible l’effort budgétaire supplémentaire vers les travailleurs à trois-quarts ou à plein temps (à partir de 0,5 Smic, et davantage entre 0,8 Smic et 1,2 Smic).
Ainsi, un célibataire sans emploi au RSA (ex- RSA socle) reprenant un emploi à mi-temps rémunéré au Smic, soit environ 600 €, verrait son revenu augmenter de seulement 50 € en l’absence de prime d’activité : il perdrait non seulement son RSA (- 470 €) mais aussi une partie de ses allocations logement (- 60 €). Grâce à sa prime d’activité d’environ 240 € par mois, il verra son revenu mensuel augmenter de 290 €.
De manière identique, un célibataire au RSA (ex- RSA socle) reprenant un emploi à plein temps rémunéré au Smic, soit environ 1200 € par mois en 2016, verrait son revenu augmenter de seulement 420 € en l’absence de prime d’activité, dans la mesure où il perdrait son RSA (- 470 €) et la quasi-totalité de ses allocations logement (- 260 €). Grâce à sa prime d’activité, d’environ 130 € par mois, il verra son revenu mensuel augmenter de 540 €.
La prime d’activité soutient significativement la reprise d’activité des familles monoparentales ou des couples inactifs : pour ces configurations familiales, elle permet notamment d’éviter qu’une reprise d’activité à mi-temps ne se traduise par une absence d’augmentation du revenu. La prime d’activité soutient moins nettement la reprise d’activité pour les couples dans lesquels un actif travaille déjà et est, à ce titre, déjà éligible à la prime d’activité pour des montants significatifs. »
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