À la question : « Comment s’attaquer au problème du chômage ? », Emmanuel Macron répond : « Ce sera vraiment le cœur de mon projet : investissements, formation professionnelle, baisse des charges et réforme du marché du travail ». (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
UN OBJECTIF EMPLOI PEU AMBITIEUX
L’objectif du candidat en termes de baisse du chômage reste assez prudent, puisqu’il se contente de s’engager sur une baisse à 7% en 2022 (contre 10% à fin 2016), soit seulement une baisse de 30% du taux de chômage sur 5 ans.
Cet objectif de 7% est supérieur à celui du retour à un taux de plein emploi.
Il est supérieur aux taux de chômage actuels de certains de nos voisins européens comme celui de l’Allemagne qui est actuellement passé en dessous des 6%…
Difficile sur ce chiffre de 7% de reconnaitre une priorité politique donnée à l’emploi dans la démarche ainsi engagée…
UNE ADAPTATION NON PRÉCISÉE DU MARCHÉ DU TRAVAIL AUX MUTATIONS EN COURS
Emmanuel Macron évoque rapidement, à ce stade, la réforme du marché du travail par une courte formule.
(…) « Il y aura une décentralisation des négociations sociales : c’est la loi qui définira l’ordre public social, les entreprises et les branches pouvant y déroger par accords. Il faut assumer davantage de flexibilité, je n’ai pas peur du mot, pour adapter notre droit du travail aux mutations en cours ». (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
Le champ reste largement ouvert pour aller au-delà du contenu la loi « travail » (dont le nom initial était la loi Macron2), mais sans précision de contenu.
Seule figure une critique contre la rupture transactionnelle[1], alors que cette procédure de fin de contrat de travail rencontre un accueil très favorable depuis sa mise en place de la part de tous les acteurs. Elle a résolu beaucoup de problèmes et fait l’unanimité.
LIRE LE BILLET : Pourquoi le projet de M. Macron concernant l’indemnisation-chômage n’est pas crédible ? http://bit.ly/2mjUOL2
UNE REMISE À PLAT DE TOUT LE SYSTÈME DE FORMATION
Sur un plan d’investissement public quinquennal de 50 milliards d’euros, Emmanuel Macron attribue 15 milliards d’euros à la formation professionnelle. C’est-à-dire un budget annuel de 3 milliards.
« 15 milliards seront consacrés aux compétences et qualifications des Français avec un plan de formation ambitieux des jeunes et des demandeurs d’emploi ». (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
On retrouve le ciblage hyper classique de la formation professionnelle vers des jeunes (probablement des jeunes décrocheurs non qualifiés) et des demandeurs d’emploi (idem « Plan 500 000 formations » de Manuel Valls). Cette approche semble ignorer, une fois de plus, l’enjeu de la mobilisation de la formation professionnelle pour le maintien dans l’emploi des salariés, dans une période d’évolution rapide des outils de production et de la numérisation des activités. Cette troisième cible est pourtant l’une des plus importantes pour éviter les risques annoncés de disparition de postes dans un contexte de révolution numérique.
Pour estimer le peu de réalisme du propos et du budget, il suffit de rappeler qu’un montant de 3 milliards par an n’est pas même suffisant pour proposer des formations aux seuls demandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi, qui pourraient en avoir besoin…
UNE MISE EN ŒUVRE BRUTALE
Les conditions évoquées par Emmanuel Macron pour convaincre de l’efficacité de sa démarche sont brutales[2] puisqu’il annonce :
- La mise à plat de tout le système de formation,
- Un service public trouvant la formation adaptée à chacun puis lui prescrivant une formation correspondant à un emploi précisément identifié,
- Des demandeurs d’emploi tenus d’accepter les emplois prescrits, sous peine de radiation de Pôle Emploi.
Pour arriver à concrétiser ce conte de fées, auquel personne bien entendu n’a jamais osé rêver, le corollaire est le passage en force vis-à-vis des chômeurs.
« En revanche, je veux un vrai dispositif de droits et de devoirs. Mon nouveau système crée un filet de sécurité pour tout le monde, mais avec de vraies exigences. Quand vous perdez votre emploi, vous êtes indemnisé, un bilan de compétences est fait et les prestations seront strictement conditionnées à vos efforts de recherche, avec un contrôle drastique. » (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
Les professionnels de la formation et de l’emploi jugeront…
Ce discours semble ignorer que, jusqu’à présent, beaucoup d’emplois manquent par rapport au nombre des demandeurs d’emploi et que cette situation n’est pas due aux chômeurs, mais principalement aux résultats des politiques économiques menées en France, par les ministres de l’Économie, dans une période de conjoncture internationale assez favorable de l’avis général.
[1] « Aujourd’hui, le système de la rupture conventionnelle est hypocrite. Il fonctionne aux frais, comme vous dites, de la collectivité, mais cela créé aussi du contentieux devant les prud’hommes quand il n’y a pas d’accord. Il faut clarifier les choses en permettant à chacun, tous les cinq ans, d’user de ce droit. » (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
[2] « Je veux créer une vraie sécurité professionnelle. On vous trouvera une formation vraiment qualifiante. Le service public vous donnera accès à une nouvelle formation, et le demandeur d’emploi, une fois formé, devra accepter les offres qui lui sont proposées. Aujourd’hui, un million de chômeurs sont très loin de l’emploi. C’est pour eux qu’il faut remettre à plat tout le système de formation. » (Emmanuel Macron : « Mon projet économique » – Les Échos – 23/02/17)
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