LE PÉRIMÈTRE DE L’ACTION DES MISSIONS LOCALES POURRAIT ÊTRE COMPROMIS
Les missions locales sont en attente de plusieurs décisions qui pourraient influer sur leur avenir. L’Union Nationale des Missions locales (UNML) qui a déployé tous ses efforts pour défendre le réseau commence à s’en inquiéter très officiellement[1].
Cette inquiétude porte d’abord sur le financement par l’État via la ligne « travail » de la loi de finances et sur la répartition des rôles concernant les mesures prises comme l’expérimentation des « emplois francs » dont la gestion est confiée à Pôle emploi. Il est vrai à ce propos que la nouvelle formule des « emplois francs » ne vise plus les jeunes. La réduction drastique des emplois aidés (emplois d’avenir et CUI) enlève de fait aux missions locales un outil d’insertion professionnelle des jeunes qu’elles reçoivent. Il en est de même de la suppression depuis un an des primes à l’embauche dont bénéficient les PME.
Un second type de problème concerne la mise en place du « Plan d’Investissement dans les Compétences (PIC)»[2] et plus précisément celui de la maitrise du dispositif. Même si une part du public est par définition celui des Missions locales (jeunes sans formation, ni emploi), Pôle emploi semble devoir jouer un rôle central et les missions locales risquent de ne plus être à même de prescrire les formations proposées par ce Plan.
En troisième lieu, les interrogations concernent également les conséquences incertaines, à ce jour, de l’adoption prochaine de la loi « avenir professionnel » et du contenu des textes réglementaires qui en découleront. Les dispositions sur l’apprentissage concernent les jeunes[3] tout comme les missions de Conseil en évolution professionnelle (CEP), l’assurance chômage, la formation professionnelle, etc. Il est vrai que le projet de loi ne concerne pas les jeunes à proprement parler.
LES JEUNES ACCUEILLIS PAR LES MISSIONS LOCALES NE SONT PAS TOUS DES DEMANDEURS D’EMPLOI
Derrière ces considérations, la question du statut des jeunes bénéficiant des services des missions locales se pose.
En effet à ce jour, une partie de leur public n’est pas inscrite à Pôle emploi : une part des jeunes reçus par les missions locales ne sont pas des « demandeurs d’emploi » ! Quatre jeunes sur dix qui à une mission locale ne sont pas inscrits Pôle emploi et cette inscription n’a rien d’obligatoire. L’UNML estime cette population à près de 200 000 jeunes par an.
Cette disposition permet de ne pas les faire figurer dans la comptabilisation des chômeurs ; cela explique par ailleurs, en partie, les écarts entre l’approche de l’Insee sur le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans et le nombre des jeunes inscrits à Pôle emploi. Cette sous-évaluation du chômage des jeunes a été utilisée par les gouvernements successifs avec constance.
L’accès à la formation professionnelle (PIC) étant liée à l’inscription à Pôle Emploi et l’établissement gérant ses fichiers (sans entrer ici dans le détail des bases de données), les Missions locales seraient dépendantes, voire contournées sur la formation…
L’autre question toujours en suspens est celle de l’indemnisation chômage des jeunes de moins de 25 ans ayant terminés leurs études qui, sans emploi, ne peuvent pas même prétendre au RSA. Les solutions mise en place comme la prolongation des bourses ou quelques aides de la garantie jeune apparaissent comme marginales par rapport aux besoins et renvoient les jeunes à la solidarité familiale dans les cas où elle peut exister. Cette zone grise des dispositifs sociaux reste problématique.
LES RELATIONS ENTRE PÔLE EMPLOI ET LES MISSIONS LOCALES DOIVENT ÊTRE REDÉFINIES ET LE RÔLE VÉRITABLE DES ML CONFIRMÉ.
L’ambiguïté des relations entre Pôle emploi et les Missions locales provient en grande partie du choix qui a été fait, depuis des années, au niveau de l’État, de recentrer trop exclusivement les Missions locales sur leur seul volet « emploi »[4], alors que ces associations ont une vocation généraliste concernant les droits sociaux, le logement, la santé, l’animation, les loisirs, etc.
En 2017, seuls 87 000 jeunes ont bénéficié du dispositif « Garantie jeunes »[5] ce qui reste faible par rapport aux 1 300 000 jeunes revendiqués sur un an par le réseau des missions locales (le flux d’entrée affiché serait de l’ordre de 500 000 par an).
Pour faire court, disons que si les Missions locales ne sont financées que pour travailler directement sur l’emploi des jeunes, elles ne présentent plus, à un moment donné, de « plus » par rapport à Pôle emploi…
Les débats en cours ramènent donc à ce choix fondamental.
[1] « Les chiffres du chômage au premier trimestre 2018 ont été publiés le 25 avril 2018. Seuls les moins de 25 ans enregistrent une diminution du nombre de demandeurs dans toutes les catégories sur un an. Le réseau des Missions Locales, assurant l’accompagnement des jeunes vers l’emploi et l’autonomie, a largement contribué à la baisse du chômage. Or, force est de constater que les financements annoncés ne sont pas au rendez-vous, mettant les Missions Locales en situation difficile. » https://www.unml.info/
[2] Le Plan d’Investissement dans les Compétences (PIC) vise à former : un million de jeunes peu qualifiés et un million de demandeurs d’emploi de longue durée faiblement qualifiés et à transformer en profondeur l’offre de formation. https://bit.ly/2Hoirca
[3] Dans le projet de loi la limite d’âge des jeunes pouvant bénéficier de l’apprentissage devrait être portée à 30 ans, alors que l’âge limite des jeunes accueillis dans les Missions locales est de 25 ans.
[4] La présentation faites par le Ministère est assez claire : « Les missions locales font partie du service public de l’emploi et entretiennent des relations privilégiées avec Pôle emploi dans le cadre d’un partenariat renforcé. Elles s’appuient sur des dispositifs mis en place par l’Etat et les collectivités territoriales. » http://travail-emploi.gouv.fr/ministere/acteurs/service-public-de-l-emploi/article/missions-locales
[5] La Garantie Jeunes est cofinancée par le FSE national, dans le cadre de l’ « Initiative pour l’emploi des Jeunes ».
« Effective depuis le 1er janvier 2017, la Garantie jeunes est un dispositif ouvert aux jeunes de 16 à moins de 26 ans vivant dans des conditions de ressources précaires, ayant arrêté leur parcours scolaire, sans emploi ni formation. »
Un commentaire to “Quel sera l’impact des transformations politiques en cours sur les Missions locales ?”
14 mai 2018
DaussyCe recentrage des missions locales sur le seul volet emploi trouve son aboutissement sur le territoire Vallée Sud Grand Paris : les 3 missions locales du territoire ont été supprimées, et un GIP emploi à été créé pour remplir les missions d’accompagnement vers l’emploi des anciennes missions locales, mais les autres missions ne sont plus assurées !