LA PROSPECTIVE SUR LES EMPLOIS SEMBLE ÊTRE UN SPORT SANS GRAND VAINQUEUR.
Les responsables politiques et économiques ont pour usage de faire des déclarations optimistes et, en particulier, sur les emplois . Ils mettent en avant des rapports qu’ils ont commandés sur un thème ou un autre qui conduisent à des prévisions bien incertaines tant le nombre de variables nationales et internationales est grand.
Le tout est d’annoncer le meilleur car comme l’a dit Sophocle : « Personne n’aime le messager porteur de mauvaises nouvelles » (Antigone).
Certains rapports[1] font l’éloge des startups (prédiction de plus 400 000 emplois d’ici à 2022 cité par Pôle emploi)[2]
D’autres, celle des entreprises de taille intermédiaire (ETI), cela dépend des jours… Cela semble incertain, par exemple, les startups qui réussissent sont souvent l’objet de rachat et de récupération par des entreprises plus importantes, quant aux plus nombreuses, elles végètent ou disparaissent (voir les chiffres). Peu connaissent malheureusement un développement indépendant.
Toutes les prévisions permettent de conclure avec certitude que les grandes entreprises jouent pour la plupart la réduction de leurs effectifs au minimum, avec un recours à des prestataires contrôlés ou pas, pour réaliser de meilleurs résultats financiers. Pour être objectif, le projet de loi PACTE ne prévoit pas que les entreprises aient comme vocation naturelle de créer des emplois.
Les services à la personne stagnent en raison du cadre moins favorable qui leur est fixé actuellement et de la faible progression du pouvoir d’achat des particuliers. Pour caricaturer, la hausse du carburant (principalement constitué par des taxes) se traduit par des heures de prestations de services (ménage, jardinage, accompagnement, etc.) commandées en moins.
Les indépendants œuvrant pour les « plateformes » tendent à remplacer des emplois salariés (même si le bilan dépend un peu des cas) avec pour conséquence de nombreux profils d’indépendants dans la précarité.
Le secteur du BTP, qui a connu une reprise (actuellement mise en cause en raison de politiques publiques), a comblé ses besoins essentiellement avec le recours à un nombre croissant de « travailleurs détachés » que les nouvelles dispositions européennes freineront que faiblement dans deux ans.
Ce panorama apparait gris, mais il s’explique, en partie au moins, par le fait que les politiques publiques ne prennent pas vraiment en compte la question de l’emploi.
MÊME LES PRÉVISIONS À COURT TERME SONT DIFFICILES À TRADUIRE
La connaissance de ces évolutions des effectifs, des secteurs, des métiers ou des fonctions, devraient bien entendu influer l’évolution des formations initiales et professionnelles. L’Éducation nationale ne semble pas bien avancée, y compris sur tout ce qui est déjà connu. Il est vrai que le diagnostic du BMO de Pôle emploi plaide pour la prudence.
Selon l’enquête BMO de Pôle Emploi : « Les couvreurs, chaudronniers, plombiers, bouchers, aides à domicile ou encore mécaniciens de véhicules comptent parmi les métiers les plus en tension, autant que les Data Scientists, les développeurs, ingénieurs robotiques ou joueurs d’e-sport »[3].
Le « Top 10 » en nombre de projets de recrutement, non saisonniers en 2018 par métier, de l’étude BMO classe en tête de professions peu qualifiées : Agents d’entretien de locaux, Aides à domicile et aides ménagères, Aides et apprentis de cuisine, employés polyvalents de la restauration, Aides-soignants, Employés de libre-service, Serveurs de cafés restaurants, Ouvriers non qualifiés de l’emballage et manutentionnaires.
Seules deux catégories de postes qualifiées apparaissent dans le BMO : les ingénieurs et cadres d’étude, R et D en informatique, chefs de projets informatiques ainsi que les secrétaires bureautiques. Mais si l’on en croit certains experts, l’avenir des formations informatiques pures semble dépassé par les profils de formation polyvalente.
Tandis que parmi les métiers où le nombre d’offres est le plus rare dont en 2018 sont par exemple les cadres des assurances, les techniciens de la banque, les chercheurs (sauf industrie et enseignement supérieur) ou les journalistes et cadres de l’édition.
LES PRÉVISIONS SUR LES EMPLOIS CONSTITUENT UN ART DIFFICILE ET EN AUCUN CAS UNE SCIENCE.
[1] Nombre d’organismes publics et privés vivent de leurs prédictions dans le domaine de l’activité et de l’emploi. Ils ont structurellement le rôle d’annoncer des lendemains qui chantent. « Personne n’aime le messager porteur de mauvaises nouvelles » Antigone de Sophocle,
[2] « D’ici 2022, les start-up françaises pourraient créer, selon le Boston Consulting Group et le collectif La Boussole, 400 000 emplois. » Ce cabinet réputé vend du conseil aux entreprises et semble donc avoir tout intérêt à annoncer leur possible réussite pour trouver ses clients. https://bit.ly/2JWR7Dd
[3]
Le « top 10 en part de recrutement difficiles en 2018 par métier » fait figurer les : charpentiers (bois), régleurs, couvreurs, chaudronniers, tôliers, traceurs, serruriers, métalliers, forgerons, tuyauteurs, carrossiers automobiles, aides a domicile et aides ménagères. C’est-à-dire des qualifications très professionnelles, mais pas au niveau master.
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