UNE FORTE RÉDUCTION DES MOYENS DE L’AFPA VIENT D’ÊTRE ANNONCÉE
La direction de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) vient d’annoncer en Comité Central d’Entreprise un projet de suppression nette de 938 postes d’ici à fin 2020, soit 14% de ses effectifs en CDI.
Elle envisage de supprimer 1 541 postes en CDI d’ici à la fin 2020 pour un effectif d’environ 8 000 personnes. 603 postes seraient créés sur d’autres compétences sans précision des statuts des personnels. Les départs en retraite concerneraient 600 personnes. Des départs volontaires seraient proposés aux salariés qui n’entrent pas dans les dispositifs de reclassement interne.
Parallèlement, l’Afpa projette de fermer 38 centres de formation sur 206, pour se concentrer sur les « besoins de formation » des territoires.
L’AFPA RESTE LE PREMIER ORGANISME DE FORMATION
L’AFPA est un établissement public qui dispose de nombreux « plus » : une implantation nationale, une ingénierie de formation de qualité, de bons résultats en matière de retour à l’emploi de ses stagiaires dans le BTP et l’industrie, etc.
Si les prix pratiqués par l’AFPA ont parfois été jugés élevés. Il faut bien prendre en compte qu’elle emploie des formateurs en CDI et non des vacataires (ou des autoentrepreneurs) comme beaucoup de ses concurrents. Ne semble-t-il pas difficile de dénoncer les contrats courts d’une part et de critiquer les CDI de l’AFPA d’autre part ?
Ses petits centres de formation participent à la couverture de territoires qui demain seront sans grand potentiel de formation professionnelle, la question qui se pose n’est plus en terme de rentabilité, mais de services rendus.
La stratégie de la Direction ne présente rien de bien neuf, puisque les objectifs annoncés sont d’« assurer sa mission de service public pour la formation des publics les plus éloignés de l’emploi » ; d’« adapter son offre aux appels d’offres des régions et des entreprises en s’adaptant aux besoins de nouvelles compétences et des métiers en tension », et de développer « des services innovants aux demandeurs d’emploi, aux entreprises et aux branches professionnelles ».
Il n’y a aucun réel « recentrage sur sa mission de service public », car tous les organismes de formation sont prêts à prendre en charge des chômeurs éloignés de l’emploi, à adapter leur offre aux demandes des régions et de proposer de formations pour des métiers en tension.
Dans son projet, la direction de l’AFPA ne propose aucun projet spécifique de service public.
LE PASSAGE DE L’AFPA DANS LE CHAMP CONCURRENTIEL A ÉTÉ UNE ERREUR.
La question qui se pose, depuis maintenant plusieurs années, a été le passage de l’AFPA dans le champ concurrentiel. Cette évolution a conduit à une diminution de l’activité et par suite d’un déficit financier récurrent. L’Afpa a cumulé 725 millions de pertes de 2012 à 2016. En 2017, le résultat brut d’exploitation a été négatif à hauteur de 24 millions d’euros et l’AFPA prévoit des pertes à hauteur de 70 millions pour 2018.
Cette baisse des ressources est liée, en grande partie, à la diminution du volume des commandes des Conseils régionaux, plus ou moins importante selon les régions.
Le plan présenté par la Direction de l’AFPA apparait peu crédible, si l’on ne revoit pas plus en profondeur les règles du jeu de la formation et les objectifs, pour maintenir un secteur public de la formation professionnelle.
Sur un seul critère marchand, de nombreuses formations seront abandonnées (avec la perte de savoir-faire) et des territoires qui perdront leur plateforme de formation pour devenir des déserts.
FAUT-IL MAINTENIR UN SECTEUR PUBLIC DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ?
A titre de comparaison, pour prendre un exemple proche : que deviendraient les écoles, collèges et lycées, relevant de l’éducation nationale, si elles étaient mises en totale concurrence avec des établissements d’enseignement privés ? Cela éclaire la situation actuelle de l’AFPA.
La question est donc politique. Il s’agit de savoir s’il convient de conserver un secteur public de la formation professionnelle pour couvrir des besoins échappant au marché.
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Si ce n’est pas le cas, il faut avoir le courage de supprimer l’AFPA et/ou d’en céder des actifs à des organismes privés de formation.
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Sinon, il faut envisager de mettre en place les conditions pour que l’AFPA remplisse des missions hors du champ concurrentiel (par exemple, avec un partenariat national étroit avec Pole emploi), ou en fixant des conditions qui lui soient favorables dans les appels d’offres (avec une couverture nationale exigée, par exemple). Cette orientation apparait possible, si la volonté existait.
C’est pourquoi la stratégie proposée par la direction de l’Agence et le ministère du Travail n’apparait pas sérieuse, dans la mesure où elle ne répond pas clairement à cette question. Elle se cantonne juste à une tentative d’ajustement désespérée de l’établissement public au marché.
L’issue de l’actuelle orientation stratégique semble condamner l’AFPA, à assez brève échéance.
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