POLE EMPLOI POURRAIT RÉCUPÉRER DE LA GESTION TOTALE DE L’ACCOMPAGNEMENT DES TRAVAILLEURS HANDICAPES
La délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a produit un document de travail, daté du 25 juin, qui prévoit un changement radical du système actuel d’accompagnement dans l’emploi des personnes handicapées.
Le ministère du Travail envisage de déléguer l’offre d’accompagnement et les fonds de l’Agefiph à Pôle emploi.
Le pilotage des activités ne seraient plus exercées, par conséquent, par l’Agefiph (pour le secteur privé) et le FIPHFP (secteur public).
Ce projet apparait tout à fait sérieux[1].
Il fait suite à un rapport de l’IGF (inspections des finances) et de l’Igas (affaires sociales) du 17 janvier 2018 proposant le regroupement des deux organismes d’insertion professionnelle pour les personnes handicapées et un « rapprochement » avec Pole emploi.
L’une des motivations évoquées repose sur la baisse des contributions pénalités des employeurs diminuent au fur et à mesure que les employeurs atteignent leurs obligations (quota de 6% de travailleurs handicapés). Cette démarche de réflexion n’avait pas abouti. Cet argument est contestable, pour citer un exemple parmi d’autres, le FIPHFP n’a jamais recueilli de pénalités dans de nombreux secteurs de la fonction publique pour des motifs dérogatoires.
Le rapport considérait : « Une nouvelle répartition des rôles autour d’un acteur unique sera nécessaire » et qu’il fallait « confier la gestion des fonds à Pôle emploi »[2].
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Les fonds, gérés par ces deux structures, pourraient être récupérés directement par Pôle emploi[3]. Un projet d’ordonnance comporterait entre autres le transfert aux URSSAF, en 2021, de la gestion actuellement mis en œuvre par l’AGEFIPH.
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Pôle emploi financerait alors directement les organismes de placement spécialisés (OPS) spécialisés dans l’accompagnement des travailleurs handicapés[4]: c’est-à-dire les 98 Cap emploi[5]. Les Cap emploi sont des associations, liées à Pôle emploi par une convention de cotraitance. Ils verraient leur autonomie et leur capacité d’initiative réduite.
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Le catalogue de prestations spécialisés serait confié à Pole emploi – Cap emploi.
Cette fusion s’inscrit dans une centralisation des actions sous l’égide directe de l’État.
LE PROJET D’ABSORPTION DES FONDS SPÉCIALISÉS SUR LE HANDICAP PAR POLE EMPLOI RENCONTRE DE VIVES OPPOSITIONS.
La disparition du FIPHFP et de l’Agefiph[6], risque de mettre en cause la nature même des services dont bénéficient les personnes en situation de handicap. Ces acteurs demandent le maintien des fonds d’aide aux travailleurs handicapés.
Cette remise en cause de l’accompagnement des travailleurs handicapés inquiète des acteurs du handicap[7] et les organisations syndicales (FO[8], CFE-CGC[9], etc.).
Les associations de personnes handicapées perdaient leur capacité d’intervention, si cette évolution avait lieu[10].
Un argument incontestable de défense de ces fonds est qu’ils financent des actions d’accompagnement des salariés en emploi[11] et de maintien dans l’emploi qui ne sont pas évidemment pas du ressort de Pôle emploi, qui n’intervient que sur le champ des demandeurs d’emploi,
514 000 DEMANDEURS D’EMPLOIS SONT EN SITUATION DE HANDICAP.
La question est d’importance dans la mesure où l’effectif des demandeurs d’emploi handicapés inscrits à Pôle emploi a atteint, en 2018, les 514 000 personnes, enregistrant une hausse de 3,5% sur un an.
Le taux de chômage de cette catégorie tourne autour de 19%, soit plus du double de la moyenne.
LA PÉRENNITÉ DU FINANCEMENT DES ACTIONS SPÉCIFIQUES ET DES ACTEURS SPÉCIALISÉS APPARAIT DONC FONDAMENTAL POUR ACCOMPAGNER LES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP VERS ET DANS L’EMPLOI.
[1] « Nous avons commencé des travaux sur le sujet » avec la secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées a reconnu, le 9 juillet la ministre du Travail lors d’une audition devant la commission des affaires sociales du Sénat.
[2] Selon ce rapport, s’agirait de réaliser une « clarification des aides » versées, dont il conviendrait de « réduire le nombre ».
[3] Ces fonds sont alimentés par les contributions des employeurs assujetties à l’obligation d’emploi de 6% de travailleurs handicapés
[4] Depuis le 1er janvier 2018, les missions des OPS ont été élargies au maintien dans l’emploi (Article 101 de la Loi du 8 août 2016).
[5] Les Cap emploi sont actuellement en charge de la préparation, de l’accompagnement, du suivi durable et du maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Ils accueillent et accompagnent plus de 100 000 personnes handicapées chaque année.
[6] L’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) est administrée paritairement par les organisations syndicales, les organisations patronales et les associations de personnes handicapées, et travaille, depuis 1988, en faveur du développement de l’emploi des personnes en situation de handicap dans le secteur privé.
[7] L’APF France Handicap, la Confédération française pour la promotion sociale des aveugles et amblyopes (CFPSAA), l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam), l’association des accidentés de la vie (Fnath), l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) et l’Union nationale pour l’insertion sociale du déficient auditif (Unisda).
[8] « Menaces sur l’Agefiph ! » – https://www.force-ouvriere.fr/IMG/pdf/cp_-_fo_-_menaces_sur_l_agefiph_.pdf
[9] Face aux propositions du ministère du Travail de regrouper les services et financements inhérents au réseau Cap emploi sous l’unique gestion de Pôle emploi, FO et la CFE-CGC appellent au maintien des fonds d’aide aux travailleurs handicapés. https://cfecgc-adecco.blogspot.com/2019/07/emploi-et-handicap-la-cfe-cgc-au-rendez.html
[10] « Aucune place ne sera laissée aux personnes concernées ni aux acteurs associatifs dans la gouvernance de la politique d’emploi des personnes en situation de handicap » – Communiqué de six associations de personnes handicapées- 12 juillet 2019.
[11] Prévention du licenciement pour inaptitude.
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