La rénovation thermique des bâtiments, publics et privés, est une très bonne chose en terme économique, mais son développement dépend des conditions effectives du soutien proposées par l’État. Cette phase précède les conséquences induites en matière d’emplois dans une phase conjoncturelle de deux ans (2021-2022).
LE GOUVERNEMENT DEMANDE AUX ORGANISATIONS PATRONALES DE PRENDRE DES ENGAGEMENTS
Le gouvernement demande aux organisations patronales du BTP (FFB, CAPEB, FNTP et CNATP) de prendre des engagements[1] pour assurer le succès du Plan de relance en termes de préservation d’emplois et de recrutement[2]. Ces engagements concerneraient les jeunes (dont les apprentis) et les demandeurs d’emploi.
Il est vrai qu’une part de annonces de « France relance » concernent des travaux à venir dans le secteur du Bâtiment, en particulier la rénovation énergétique de bâtiments publics et de logements privés.
Mais il reste difficile d’avoir une idée précise du rythme et des conditions d’engagement des budgets d’ici fin 2022 et donc des conséquences en termes d’activités pour les entreprises[3].
Le Président de la Fédération Française du Bâtiment exprime bien la démarche en cours :
« Bien qu’annoncées comme applicables dès maintenant, l’ensemble de ces mesures ne le seront probablement qu’au début 2021, soit presque un an après l’arrivée de la pandémie en France. Que de temps perdu ![4] »
Ce qui est acquis à ce jour, c’est que si le Bâtiment s’est redressé après un passage à vide (-88% début avril) les chantiers en cours sont ceux engagés avant le COVID-19 ou programmés avant.
Mais la chute du nombre de dépôt de permis de construire en 2020 atteindrait plus de 100 000 permis, pour ne citer qu’un chiffre.
UN RALENTISSEMENT DE LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS NEUFS EN 2021 EST ATTENDU.
Le Président de la Fédération Française du Bâtiment précise :
« « France relance » laisse de côté le marché du neuf. Pourtant, c’est celui qui souffre le plus de la crise sanitaire et il continue de s’enfoncer. Une fois livrés les chantiers en cours, un réel choc se dessine pour le logement et le non-résidentiel, si rien n’est fait. »
LA PRÉSENCE EFFECTIVE DE L’ACTIVITÉ PRIME ÉVIDEMMENT SUR LA POLITIQUE DE L’EMPLOI.
Le discours de la ministre du Travail est révélateur de ce que peut produire la « langue de bois » :
« Avec l’ensemble des leviers mis à disposition, les entreprises disposent de tous les outils pour embaucher. Tous ensemble, nous devons pouvoir faire monter en puissance l’apprentissage et l’emploi des jeunes, pour œuvrer à l’insertion de tous. »
Les outils de la politique de l’emploi ne suffisent pas si l’activité n’est pas là très concrètement avec des marchés publics et privés opérationnels.
LE DISCOURS SUR LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE NE RÉPOND PAS A LA RÉALITÉ
Le discours du Haut-commissariat aux compétences sur « les parcours de formation aux métiers et aux gestes de rénovation énergétique » relève du fantasme.
La rénovation énergétique fait déjà pleinement partie des métiers du Bâtiment, car elle porte sur des solutions usuelles et connues : l’isolation extérieure, l’isolation intérieure, par exemple des combles), des fenêtres plus isolantes, des appareils de chauffage performants.
Des salariés dans ces métiers sont disponibles pour réaliser ces travaux et des apprentis sont au rendez-vous (et les CFA correspondants).
C’est pourquoi le discours de la ministre du Travail apparait sans grand fondement autre qu’une volonté de communication politique de « transition écologique »[5] :
« En matière de rénovation énergétique, nous avons besoin de l’engagement de toute la filière BTP et notamment des partenaires sociaux, pour créer de nouveaux blocs de compétences, faire évoluer l’offre de certification et renforcer l’offre de formation à destination des professionnels du secteur. »
La rénovation énergétique n’entre pas dans le champ des TP !
LA RESPONSABILITÉ DE LA REPRISE NE DÉPEND PAS PRINCIPALEMENT DES ENTREPRISES, MAIS D’ABORD DU CARACTÈRE EFFECTIF DES POLITIQUES PUBLIQUES
La démarche engagée par le gouvernement, sur les « engagements » des entreprises, apparait mal fondée, dans la mesure où elle parait faire porter aux entreprises du BTP une responsabilité qui n’est pas en premier lieu la leur.
La responsabilité repose toute entière sur les donneurs d’ordre public, privé et la demande des particuliers.
C’est la qualité des incitations publiques qui est en question. S’il y a des marchés, il y aura de l’activité, c’est-à-dire des chantiers. Alors il y aura des embauches[6] et des recrutements d’apprentis. La capacité de formation dans ces métiers existe déjà, et peut être mobilisée, si cela apparait nécessaire.
[1] « Un groupe de travail technique avec les trois ministères concernés et les fédérations va permettre de poursuivre les échanges pour parvenir d’ici mi-octobre à des engagements de la part des fédérations. »
[2] Les fédérations professionnelles du secteur du bâtiment et des travaux publics doivent formuler des propositions d’engagements pour assurer le succès de France Relance – 23/09/20 – https://travail-emploi.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/les-federations-professionnelles-du-secteur-du-batiment-et-des-travaux-publics
[3] De même, pour les Travaux publics pour lesquels « l’accélération de certains projets d’infrastructures » demeure imprécise.
[4] « Le gouvernement a présenté les grandes lignes de son plan « France relance ». Quant aux détails des mesures, il nous faudra attendre le projet de loi de finances pour 2021. En clair, bien qu’annoncées comme applicables dès maintenant, l’ensemble de ces mesures ne le seront probablement qu’au début 2021, soit presque un an après l’arrivée de la pandémie en France. Que de temps perdu ! Les besoins sont toujours bien présents, la construction neuve doit donc impérativement être prise en compte. Nous devons concentrer toutes nos actions immédiates sur ce marché. »
[5] Le ministre de l’Economie a déclaré :« Avec France Relance, nous apportons un soutien à l’activité et à la création d’emplois dans les plus brefs délais, tout en accélérant la transition écologique. »
[6] Des professionnels qualifiés sont disponibles, indépendants, chômeurs ou salariés, pour réaliser des chantiers.
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