L’incertitude sur l’orientation politique et la composition du futur gouvernement pèse, pour les prochaines semaines, sur les projets engagés (loi, textes réglementaires, priorités, etc.) en matière de politique de l’emploi.
Les futurs choix politiques sont encore inconnus dans le domaine de :
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L’emploi (combien d’emplois aidés ? quels financements des acteurs de l’emploi ? Quelles aides sociales liées aux mesures d’accompagnement ? etc.),
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L’alternance (financements de l’apprentissage et des contrats pro),
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L’indemnisation chômage (réforme de l’assurance-chômage et maintien des ASS) et de
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La formation…
Un point sur les perspectives engagées s’impose, sachant qu’elles pourraient être revues, ou non, par le prochain ministre en charge du Travail en juillet 2024.
PERSPECTIVES CONNUES
Au niveau de France travail, comme cela a été prévu, l’année 2024 devait être dédiée :
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A la mise en place de la nouvelle gouvernance de l’opérateur France Travail et du « réseau pour l’emploi », comprenant les différents acteurs de l’emploi et de l’insertion[1].
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A la mise en œuvre des dispositions de la loi pour le Plein-emploi, comprenant de nouvelles missions.
A partir de janvier 2025, devraient être inscrits systématiquement à France Travail :
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Certains jeunes accompagnés par les Missions locales,
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Les personnes accompagnées par le réseau Cap Emploi et
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Les personnes qui demandent le revenu de solidarité active.
Ces changements conduiraient structurellement à une hausse du nombre de demandeurs d’emploi inscrits à France Travail, indépendamment de l’impact d’une croissance prévue comme faible.
Beaucoup d’aspects concernant les acteurs du Service Public de l’Emploi (SPE) restent en suspens.
LE MODE DE CALCUL DU NOMBRE DES CHERCHEURS D’EMPLOI A ÉVIDEMMENT UNE IMPORTANCE POLITIQUE.
La mesure du nombre de demandeurs d’emploi se trouve remise en cause.
Un groupe de travail du Conseil national de l’Information statistique (Cnis) a été mis en place en décembre 2023[2] avec pour mission de distinguer dans deux données :
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Les évolutions du nombre de demandeurs d’emploi, liées à la conjoncture économique (profil Pôle emploi),
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Le nombre des inscriptions automatiques de ces nouveaux publics.
La Dares et France Travail devraient continuer à coproduire, chaque mois et chaque trimestre, des statistiques sur les demandeurs d’emploi à France Travail[3].
« La Dares et France Travail sont attentifs à assurer une communication claire gestion concernant les impacts des modifications des modalités de gestion sur les statistiques, par le biais d’avertissements dédiés accompagnant les données. »
LE MINISTÈRE A ENGAGE DES DÉMARCHES VISANT À CADRER FRANCE TRAVAIL.
Il s’agit de réaliser une « Évaluation préfigurative de la réforme France Travail », selon les termes du ministère du Travail qui a lancé un Appel à Projets de Recherche (APR)[4] du 10 juin 2024 au 15 juillet 2024.
Cet APR « fait suite à l’Appel à idées, organisé du 29 mars au 30 avril 2024, qui visait à mettre en relation des équipes de recherche intéressées avec les équipes opérationnelles du réseau pour l’emploi afin d’éprouver la faisabilité opérationnelle et budgétaire d’un projet de recherche.[5] »
Il a pour objectif de « documenter scientifiquement les potentiels impacts de la loi pour le plein emploi », en particulier sur :
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Le contenu du contrat d’engagement,
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Le nouveau dispositif de contrôle et de sanctions,
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L’accompagnement des demandeurs d’emploi,
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L’accompagnement des entreprises et des offres d’emploi, etc.[6].
A ce jour, il est difficile de dire si cette démarche sera poursuivie et, si oui, comment, en fonction des financements pour le second semestre 2024 et le projet de loi de finances 2025.
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Pour conclure, il est permis de s’interroger sur le fait que ces questions de principe, précédemment évoquées, n’aient pas été traitées, en prenant en compte l’ensemble des données déjà existantes au Ministère, avant même le vote de la loi sur le « plein emploi » !
[1] France Travail conséquences pour la statistique publique ? – 2 avril 2024 – Sophie Ozil, cheffe du département Suivi et indemnisation des demandeurs d’emploi.
[2] Présidé par l’économiste Éric Heyer, il dispose der deux rapporteurs de la Dares et de France Travail , il travaillera sur cette question et rendra publiques ses recommandations à l’été 2024.
[3] Contrairement aux statistiques du chômage au sens du BIT (Insee), qui s’appuient sur une définition internationale du chômage et reposent sur des données d’enquête, les statistiques sur les demandeurs d’emploi sont élaborées à partir de données administratives, c’est-à-dire de données issues du système d’information de France Travail. Elles sont donc étroitement liées à la gestion de l’opérateur, ainsi qu’aux dispositions légales et réglementaires.
[4] « Le présent appel à projets de recherche (APR) vise à encourager la réalisation de recherches permettant d’évaluer la loi pour le plein emploi et d’en mesurer les impacts, notamment en éclairant les modalités de mise en œuvre des différents dispositifs relatifs à l’accompagnement de demandeurs d’emploi visant leur retour en emploi. »
« Cet appel à projets de recherche s’inscrit en complément mais est indépendant des évaluations quantitatives et qualitatives de l’expérimentation qui a été engagée en 2023 dans 18 territoires afin de construire et tester une offre rénovée concernant l’accompagnement des bénéficiaires du RSA. »
[5] « Il ne s’agit pas d’un prérequis obligatoire : les équipes intéressées qui n’auraient pas participé à l’appel à idées peuvent soumettre un projet au présent APR, en étant particulièrement vigilantes à bien étayer la faisabilité de leur projet. »
[6] Les équipes de recherche sont invitées à se positionner sur un ou plusieurs axes présentés, dans une démarche d’analyse cohérente : Contenu du contrat d’engagement ; Ciblage de l’accompagnement intensif ; Modalités du système de contrôle et de sanctions ; Accompagnement des entreprises et ciblage pour la prospection ou l’accompagnement des offres ; Effet des conseillers sur l’accompagnement et la formation des conseillers ; Gouvernance et coordination institutionnelle et territoriale ; Démarches de l’administration pour atteindre des publics marginalisés.
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