A PLUPART DES ACTEURS CONSIDÈRENT QUE LES MESURES ACTUELLES DE CONTRÔLE DES TRAVAILLEURS DÉTACHÉS SONT INSUFFISANTES.
La Directive européenne d’exécution[1] 2014/67/UE, destinée à clarifier la mise en œuvre des règles de 1996 concernant les travailleurs détachés, a été adoptée par le Parlement européen le 16 avril 2014[2]. Elle a été transposée très rapidement en France en février 2015 avec des mesures concrètes comme le renforcement des contrôles dans le plan de lutte contre la fraude, une carte d’identification professionnelle BTP et le durcissement des sanctions en cas de fraude. Et cette transposition a été approuvée par la commission européenne.
Il apparait que ces dispositions traitent des fraudes, mais pas du principe même des « travailleurs détachés » qui concrètement faussent les règles de concurrence dans la mesure où les cotisations sociales du pays d’origine de ces salariés sont de niveau très différent.
LE NOMBRE DE TRAVAILLEURS DÉTACHÉS CONTINUE A CROÎTRE
La Commission européenne reconnait l’ampleur du phénomène et la croissance du nombre des détachements (hausse avec 1,3 million pour 2013). En France, un rapport très récent du ministère chiffre à près de 210.000 le nombre de travailleurs détachés, dont pour 19% des Polonais 11% des Portugais et 9% des Roumains.
47% travailleurs détachés proviennent des États fondateurs de l’Union européenne et 41% d’entre eux viennent de nouveaux États membres. Cette proportion devrait s’inverser compte tenu de la croissance rapide du nombre de salariés détachés provenant d’Europe de l’Est.
Ces détachements concernent d’abord le secteur de la construction : 44% des travailleurs détachés en France (soit de l’ordre de 100 000 salariés) et 41% pour l’ensemble de l’Union européenne, mais aussi l’agroalimentaire, le transport, etc.
LA FRANCE APPARAÎT MOINS ISOLÉE DANS LE DÉBAT EUROPÉEN.
Sept pays demandent désormais des règles plus strictes contre le dumping social. Il s’agit de l’Autriche, la Belgique, le Danemark, la France, le Luxembourg, des Pays-Bas et la Suède.
Ils se heurtent naturellement à la volonté des pays, parmi les 28 États membres de l’Union européenne, dont proviennent les travailleurs détachés. Un face à face s’installe entre des pays où les salariés bénéficient de conditions sociales favorables et ceux où ce n’est pas le cas.
Un débat, risquant de déboucher sur un blocage, va avoir lieu, mais dans un délai long. L’idée que la Commission européenne ne va pas assez vite est partagée par les acteurs français.
Cette question a un impact sur la politique intérieure des pays concernés dans un contexte de chômage de masse.
PLUSIEURS PISTES DE SOLUTION DE RÉVISION DES RÈGLES EN VIGUEUR SONT ÉVOQUÉES
Les pistes de révision envisagées pourraient porter sur une durée maximale de détachement, l’application du concept de salaire identique pour travail identique, la possibilité de pouvoir adapter leurs conditions salariales à tous les travailleurs sur leur territoire et davantage de collaboration et de communication électronique entre les services d’inspection.
La directive détachement, au-delà de la fraude, profite de l’absence de convergence entre les régimes sociaux des pays de l’Union européenne. Il faudrait pouvoir envisager :
- La réduction des écarts entre les systèmes de protection sociale de chaque pays, permettant par ailleurs d’assurer une protection sociale minimum européenne.
- Une homogénéité fiscale,
- La mise en place d’un salaire minimum européen.
Ces pistes ne peuvent pas être concrétisées à court terme. Elles auraient dû être suivies avant la mise en place des dispositions concernant les travailleurs détachés. Ce travers se retrouve dans de multiples mesures prises par l’Union européenne.
La seule solution concrète et d’effet immédiat est d’instituer le paiement des cotisations sociales selon les règles en vigueur dans le pays où les salariés étrangers interviennent, quelle que soit la nationalité de leur employeur.
[1]Directive 2014/67/UE du Parlement Européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services et modifiant le règlement (UE) n 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur
[2] Cette information aurait été confirmée par le cabinet de Marianne Thyssen, commissaire belge (PPE) en charge de l’Emploi, Affaires sociales, Compétences et Mobilité des Travailleurs.
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