La transformation de l’économie par le numérique entraîne de profonds changements dans le monde du travail : nouveaux métiers, nouvelles organisations, disparition de fonctions traditionnelles, robotisation accrue, etc.
La crise de l’emploi intervenue en 2008 n’a pas été dû à l’apparition du numérique, mais à des crises financières.La transformation digitale est simplement venue ajouter un élément supplémentaire de changement du marché de l’emploi.
A ce jour, le marché du travail et les formes de travail (contrats de travail) n’ont pas été modifiés de manière significative (proportion du salariat, part des contrats en CDI…). Il faut donc éviter d’exagérer les mutations comme certains le font. Reste que cette transformation liée au numérique a pour caractéristique de se produire de manière plus rapide que d’autres[1].
Elle génère, au moins, trois mouvements distincts en matière d’emploi :
- Le développement progressif d’un secteur d’activité économique du numérique (donc la création de nouveaux emplois et de nouvelles fonctions),
- La création d’emplois « numérique » au sein des entreprises et, enfin,
- La transformation d’une moitié des emplois existants par le numérique (organisation interne, méthodes de travail, outils…) selon une intensité variable selon les branches et les métiers.
Concernant ce dernier point, le numérique impacte l’emploi dans l’industrie (mode de production et robotisation) comme dans le tertiaire (mode de transaction).
Par exemple, l’influence du numérique sur les effectifs du secteur banque assurance est déjà notable ; les annonces de réduction des effectifs des grandes banques sont nombreuses pour les mois qui viennent.
UNE INQUIÉTUDE EXISTE SUR LES CONSÉQUENCES DU NUMÉRIQUE EN TERMES D’EMPLOIS.
Il permet de travailler mieux, plus rapidement, plus précisément, plus confortablement, plus économiquement … tout en induisant de nouvelles exigences[2], des contraintes, des tensions, des erreurs, des fragilités (sécurité informatique) et des dysfonctionnements (fréquents). Si on porte un regard critique, le bilan est mitigé, il est difficile à établir de manière globale tant chaque situation apparait différente.
La transformation numérique conduit à des suppressions de postes[3], voire des disparitions d’entreprises, liées à l’apparition de nouveaux outils comme de nouvelles pratiques, ou à la concurrence liée à de nouvelles méthodes de commercialisation.
De petites ou moyennes entreprises parviennent à prendre une part des marchés des acteurs installés.
Il existe donc une inquiétude sur les conséquences des transformations liée au numérique au sens large. Celle ressentie sur le terrain, comme celle induite par la publication de scénarios cataclysmique de suppressions de millions d’emplois. Elle va jusqu’à des discours, sans doute excessifs, sur une potentielle « disparition de l’emploi » …
LES PRÉVISIONS DE L’IMPACT DU NUMÉRIQUE SUR LES EMPLOIS SONT À CONSIDÉRER AVEC PRUDENCE
Les prévisions de l’impact de la transformation numérique sur les emplois sont à considérer avec la plus grande prudence.
- D’une part, nombre d’études françaises et internationales chiffrent les disparitions, mais ne mettent pas en face les créations d’emploi, plus difficiles à imaginer et chiffrer, ce qui débouche sur des chiffres à faible signification.
- D’autre part, l’évolution des technologies et l’impact de l’intelligence artificielle sont difficiles à prévoir, dans la mesure où les progrès à 5 ans ne sont pas réellement connus.
Ce qui est acquis : c’est la nécessité d’une mobilité professionnelle avec des métiers finissants, des métiers en mutation et des métiers complètement nouveaux à imaginer.
Ce qui est probable, c’est le développement d’une part d’activités propres au numérique et d’autre part, de contrôle et de sécurité pour toutes les applications numériques et des objets connectés.
LA FORMATION INITIALE ET PROFESSIONNELLE AU NUMÉRIQUE EST UNE PRIORITÉ
La formation aux conséquences du numérique est une condition nécessaire au développement des emplois, même si elle n’est évidemment pas suffisante.
- La mobilité au sein des professions implique un formidable effort sur la formation initiale sur l’ensemble du domaine numérique à côté du « lire, écrire, compter » pour les élèves et les étudiants.
- Parallèlement, l’effort en termes de formation professionnelle doit être mené auprès de tous les publics sans priorité comme cela est évoqué. La formation professionnelle, ou l’actualisation continue des connaissances, doit bénéficier à tous les actifs en emploi ou sans emploi, de personnes peu qualifiées jusqu’aux cadres séniors.
Cette notion d’action générale est l’une des clés de la réussite. Elle s’oppose frontalement aux propositions consistant à cibler la formation sur les seuls chômeurs et sur les personnes de faible niveau de qualification.
Une autre des clés réside sans doute dans la nature des formations à prodiguer. Au-delà des notions de base (encore non dominées par une majorité de la population), il faut faire des choix dans les formations. Ils ne doivent pas être liés par les connaissances des formateurs, mais dépendre des tendances qui se dessinent. Bref, les programmes de formation devraient faire l’objet d’une actualisation annuelle. Ce qui impose également une formation des formateurs au même rythme. D’où s’impose une révision des modes habituels de formation d’enseignants de l’éducation nationale.
L’enjeu consiste à combler autant que possible la fracture numérique existante dans la population et de chercher à éviter le développement progressif actuellement en court.
DES CHOIX SERONT À FAIRE POUR RÉUSSIR LA TRANSFORMATION ENGAGÉE
Face aux évolutions actuelles et à venir, l’acceptation des nouvelles technologies est impérative et ne fait pas débat. Mais les voies à suivre ne vont pas de soi. À chaque étape, il se pose des questions de choix à faire.
Il faut disposer en France des infrastructures numériques pour du très haut débit, de serveurs fiables, de réseaux efficaces, de matériels performants, des meilleurs logiciels à jour, etc. pour faire profiter chacun au mieux du projet technologique. L’État a des responsabilités à prendre dans ce processus (cet article ne traite pas des propositions faites dans les campagnes électorales).
Dans l’accompagnement de cette évolution, la formation des personnes et la création des emplois nécessaires doivent faire l’objet d’une attention toute particulière.
[1] Ce n’est pas la première fois que se produisent des changements des modes de production, mais ces transformations (comme les révolutions industrielles) ont eu lieu sur des périodes assez longues facilitant une adaptation progressive plus facile à absorber.
[2] On est amené à produire et prendre en compte davantage d’informations que précédemment. Il faudrait tenir compte ce qui est ou pas le cas. Le degré d’exigence augmente avec la progression des modes de mesures. Il implique un traitement humain des données numériques pour présenter un avantage. Car les algorithmes ne suffisent pas.
[3] Le chiffre d’une disparition de 10% des postes a été évoqué.
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