LE PROGRAMME DU PRÉSIDENT COMPORTE DES MESURES DE REFORME DE L’INDEMNISATION CHÔMAGE
Le programme électoral du président de la République prévoyait une réforme en profondeur de l’indemnisation du chômage comportant plusieurs volets.
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Un droit universel à l’assurance chômage s’appliquant à tous les actifs[1] (dont les travailleurs indépendants et les salariés démissionnaires de leur entreprise). Il s’agit de remplacer le système actuel d’assurance-chômage pour le remplacer par un autre reposant sur la solidarité nationale. Un projet de loi sera proposé au printemps 2018.
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Un changement du mode de financement du système d’indemnisation chômage (avec le remplacement des cotisations sociales des salariés par une augmentation de 1,7% de la CSG pour tous ; fonctionnaires, retraités, indépendants…) qui va s’appliquer au 1er janvier 2018 suite à l’adoption de la loi de finances 2018. La notion d’« assurance chômage » disparait donc à la fin de l’année pour un autre système.
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Un renforcement du contrôle des demandeurs d’emplois, pour combattre les abus. Ce renforcement a commencé au niveau de Pôle Emploi avec la mobilisation de 1 000 agents supplémentaires chargés du contrôle. Ce mouvement pourrait se poursuivre avec une évolution des conditions de radiation des demandeurs d’emploi.
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La mise en place d’un système de bonus-malus visant à sanctionner le recours trop fréquent de certains employeurs à des CDD courts[2]. Cette question pourrait être du ressort du projet de loi proposé au printemps 2018, mais pas forcément. Elle peut relever d’une simple décision de l’Unedic.
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Une prise de contrôle par l’État de la gouvernance de l’assurance-chômage, avec ou sans l’accord des partenaires sociaux, gestionnaires du régime depuis près de 60 ans[3]. Cet aspect sera traité par le projet de loi proposé au printemps 2018.
DE NOMBREUSES QUESTIONS CLÉS RESTENT ENCORE SANS RÉPONSE
Ce programme de réforme n’apporte pas de réponses à des questions essentielles.
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La dette de l’Unedic de l’ordre de 40 milliards d’euros sera-t-elle réintégrée au budget de l’État ?
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Comment pourra être réalisé l’équilibre budgétaire de l’organisme d’indemnisation chômage ?
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Quelle indemnisation chômage est prévue pour les jeunes achevant avec succès ou pas leurs études, dans le cadre d’un régime universel d’indemnisation ?
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Quel sera à terme le montant de l’indemnité chômage et la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi selon leur origine ; indépendants, salariés du privé, fonctionnaires contractuels, salariés démissionnaires, jeunes ?
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Qui prendra en charge le financement du service public de l’emploi : Pôle Emploi, Missions locales, Cap emploi… ? Quelle sera la part de l’Unedic ? Et celle de l’État ?
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Quelles seront en 2019 les missions de Pôle Emploi : gestion de l’indemnisation, accompagnement des chômeurs à l’emploi ou à la création d’activités, préconisation des formations, suivi des parcours des chômeurs, etc. ?
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Quelle sera l’évolution des effectifs des acteurs de l’emploi à partir de 2019 ?
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La pluralité des acteurs (Pôle Emploi, APEC…) sera-t-elle maintenue ou bien se dirige-t-on vers une centralisation autour d’un acteur unique ?
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et biens d’autres questions restent sans réponse …
LES ÉQUATIONS DU PROJET DE REFORME DE L’INDEMNISATION CHÔMAGE RISQUE DE CONDUIRE A LA RÉVISION DES DROITS DES CHÔMEURS
Chaque mesure proposée dans la cadre de ce projet de réforme se traduit par une équation ou une série d’équations.
Pour de nombreux experts, l’ensemble de ces équations, dont celles concernant les financements, ne semble pas avoir de solution.
Des compromis politiques apparaissent déjà, comme les promesses de compensation de la hausse de la CSG pour les fonctionnaires et pour les indépendants. Ces compromis viennent modifier les équations initiales de la réforme.
L’augmentation de 1,7% de la CSG payée, à leur dépens, par 60% des retraités ne suffira pas à nourrir le système d’indemnisation chômage universel, dans le cadre général d’un programme de réduction des dépenses publiques.
Il n’est pas possible d’élargir le nombre de bénéficiaires en diminuant les recettes du régime d’indemnisation chômage sans mettre en cause les droits à leur niveau actuel.
Dans le cadre de la réforme de l’indemnisation chômage qui s’engage, la principale variable d’ajustement et d’équilibre budgétaire va progressivement apparaitre la radiation de bénéficiaires, la réduction des montants d’indemnités et la diminution de la durée d’indemnisation chômage pour les salariés du secteur privé.
[1] « Le deuxième chantier sera celui de la société du travail. Dès le début du quinquennat, je demanderai au gouvernement de simplifier le droit, de réformer l’assurance chômage pour en faire un droit universel avec des exigences nouvelles pour chacun. »
« Nous ouvrirons les droits à l’assurance-chômage aux salariés qui démissionnent. Ce droit ne sera utilisable qu’une fois tous les cinq ans. En contrepartie, l’insuffisance des efforts de recherche d’emploi ou le refus d’offres raisonnables entraîneront la suspension des allocations. »
« Nous permettrons à tous les travailleurs d’avoir droit à l’assurance-chômage. Les artisans, les commerçants indépendants, les entrepreneurs, les professions libérales, et les agriculteurs disposeront, comme les salariés, de cette protection. »
Source : Emmanuel Macron – Programme En Marche ! Election présidentielle, 23 avril et 7 mai 2017.
[2] « Nous combattrons la précarité en responsabilisant les employeurs. Nous créerons un bonus-malus sur l’assurance-chômage. Les employeurs qui entretiennent la précarité en recourant exagérément aux contrats courts paieront plus de charges, ceux qui créent des emplois stables en paieront moins. »
Source : Emmanuel Macron – Programme En Marche ! Election présidentielle, 23 avril et 7 mai 2017.
[3] « Parce qu’il assume en dernier ressort la responsabilité du chômage et de la précarité, l’État prendra en charge le système d’assurance-chômage en y associant l’ensemble des parties prenantes et en particulier les partenaires sociaux. » (Programme Emmanuel Macron Travail – Emploi)
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