Le transport par rail est menacé par l’absence d’investissements de l’Etat et des régions, par des critiques sur sa gestion et par la prochaine libéralisation des transports interrégionaux par autocar.
UNE PRÉVISION DE SUPPRESSION DE 10 000 EMPLOIS D’ICI A 2018
Le Comité stratégique de la filière ferroviaire[1] vient d’alerter sur le niveau faible des commandes qui menacent l’emploi dans ce secteur. La Fédération des industries ferroviaires (FIF)[2] juge que, compte tenu des décisions actuelles :
- la production de TGV va diminuer en 2017 et est nulle pour 2019, l’ingénierie elle s’arrête dès 2015,
- la construction de trains régionaux (TER) et intercités diminue dès 2016 pour disparaitre en 2017,
- la construction de rames de métro automatiques se maintient.
Le chiffre d’affaires de l’activité ferroviaire lié au marché français devrait passer de 1,4 milliard d’euros en 2013 à 300 millions à l’horizon 2018 selon l’organisation patronale.
Les représentants du Comité stratégique de la filière prévoient, sans nouvelles commandes, la suppression de 10 000 emplois d’ici à 2018, sur les 30 000 que compte le secteur.
Les décisions relatives à de nouvelles commandes, ou le déblocage de promesses d’achats, relèvent d’une part de l’Etat et d’autre part des Régions, alors que ces dernières sont touchées par la réduction de leur dotation.
L’activité à l’exportation de l’industrie ferroviaire demeure mais l’essentiel de cette activité à lieu à l’étranger dans les pays concernés.
Deux sociétés sont directement concernées : Alstom et Bombardier (entreprise canadienne implantée en France), mais aussi de nombreux sous-traitants et prestataires.
Ces difficultés émergent alors que le groupe industriel Alstom vient d’être autoriser par l’Etat à céder ses activités énergétiques (70% de ses activités) à l’américain General Electric (GE)[3], ce qui se concrétisera a priori au cours du deuxième trimestre 2015. Pour le Ministre de l’économie : « Le nouveau groupe Alstom, par le biais de cette transaction, disposera de tous les moyens pour développer un champion français et européen dans le secteur des transports« .
Le marché français ne semble pas participer à répondre à cette ambition pour Alstom.
Pour les activités de transports, la chute du bénéfice d’Alstom aurait atteinte 72 % en un an et, en dépit des activités à l’export[4], les nuages s’accumulent. Les responsables syndicaux disent craindre les plans sociaux.
DES MENACES SUR LE TRANSPORT PAR RAIL
Plusieurs menaces pèsent actuellement sur le transport par rail.
D’une part, un récent rapport de la Cour des comptes vient de critiquer la gestion des lignes TGV. Sans entrer dans le détail d’une réponse à faire point par point, il convient de rappeler que la France au centre de l’Europe a fait le choix de disposer d’infrastructures de qualité ; même si tous les pays n’ont pas fait le même choix. C’est un atout pour notre pays.
Au-delà des trajets internationaux rapides vers Londres, Bruxelles, Francfort, Barcelone, Genève, Milan, etc., la mobilité par le rail entre les métropoles, dont le rôle a été renforcé début 2014, semble pourtant s’imposer.
Des problèmes de gestion des trains méritent sans aucun doute d’être revus : choix des gares secondaires desservies, tarifs pratiqués fréquence des trains, qualité de service, etc. mais ceci ne remets pas en cause le principe d’infrastructure de déplacement rapide et fiable par rapport à la route ou l’air. La circulation des lignes régionales reste à optimiser. Cela sera l’un des enjeux des nouvelles régions puisque celles-ci devraient disposer de la compétence sur les transports dans le cadre de la seconde loi de réorganisation territoriale à venir.
D’autre part, le futur « projet de loi pour l’activité et l’égalité des chances économiques » devrait autoriser la création de lignes d’autocars inter-régions dont certaines complémentaires mais d’autres concurrentes au transport par rail[5].
Ces nouvelles lignes de cars faciliteraient certains déplacements pour des personnes à faibles ressources (tarifs bas) mais produiraient automatiquement un transfert de clients de la SNCF « peu pressés », du train vers le car.
Le Ministère chiffre l’effet de la libéralisation du transport interrégional par autocar jusqu’à 10 000 emplois[6] créé d’ici à 2020.
La question qui se pose reste de savoir si cette libéralisation restera sur le principe
- de nouvelles lignes visant une meilleure desserte de territoires non couverts par le train ou
- du remplacement de liaisons ferroviaires régionales chères et peu fréquentées,
ou bien, si une concurrence frontale se développera entre l’autocar et le train.
Dans le cas d’une concurrence directe, il y aura probablement un transfert d’emploi du rail vers le car sans que l’on puisse en prévoir sérieusement aujourd’hui le bilan final.
[1] Le Comité de filière rassemble l’ensemble des acteurs du secteur ferroviaire.
[2] La FIF rassemble aujourd’hui plus de 280 entreprises et représente l´ensemble des activités de l´industrie ferroviaire : des constructeurs de matériel roulant aux ingénieries en passant par les équipementiers ferroviaires, les industriels de la voie et de la signalisation, le design ou encore les essais, c´est toute la chaîne industrielle ferroviaire qui est présente au sein de la FIF.
[3] Le ministre de l’Economie et de l’Industrie, Emmanuel Macron, a autorisé le rachat de l’essentiel des activités énergétiques d’Alstom par l’américain General Electric le 5 novembre 2014.
[4] Dont récemment un contrat important en Afrique du sud.
[5] La priorité donnée au rail a eu également des motifs écologiques : diminuer la circulation routière pour diminuer densité de la circulation et les risques de pollution.
[6] L’organisation professionnelle de ce secteur, la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs (FNTV) prévoit également de nombreuses créations d’emploi.
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