La publication le 2 février 2015 des chiffres des nouveaux contrats d’apprentissage enregistrés et validés en 2014[1] confirme la poursuite de la diminution du nombre de ces contrats. 264 580 contrats signés en 2014 contre 273 295 en 2013 représentent une diminution de 3,29% (-8 715 postes).
Cette diminution intervient après une chute de 8,14% en 2013, par rapport à 2012, après deux années de légère hausse (297 295 contrats signés en 2012). Le nombre de contrats de professionnalisation signés en 2014 n’a pas encore été communiqué. On dénombrait 164 157 contrats de professionnalisation signés 2013 (-6%).
Les mesures en faveur de l’alternance, affichée comme une priorité du gouvernement, n’ont pas (encore) portées leurs fruits. La diminution des effectifs d’apprentis en 2013 s’explique par le ralentissement de l’activité[2], la réduction des aides à l’apprentissage par le gouvernement : suppression de 500 millions d’euros de crédits d’accompagnement à l’apprentissage[3] et la concurrence des emplois d’avenir pour les jeunes sans qualification.
Dans le secteur public, en 2014, le nombre de nouveaux contrats d’apprentissage enregistrés est également en diminution de 4,7% : 8 629 après 9 056 en 2013[4]. Aucun effort ne semble avoir été mené au niveau des fonctions publiques en faveur de l’apprentissage.
LA POLITIQUE EN FAVEUR DE L’APPRENTISSAGE
Des mesures ont été prises avec une aide aux CFA et une prime de 1 000 € par apprenti supplémentaire accordée aux entreprises de moins de 50 salariés, puis allant jusqu’à 250 salariés. Cette prime n’est plus réservée, comme prévu initialement, aux entreprises accueillant un premier apprenti, mais concerne l’embauche d’apprentis supplémentaires. Les conditions d’attribution étaient trop restrictives. Pour 2015-2016, le versement de la prime devrait être réservé aux entreprises dont la branche aurait signé, d’ici à juin 2015, un accord dans le cadre du pacte de responsabilité[5] prévoyant l’accueil d’apprentis. Ces mesures disposent d’un budget d’un niveau inférieur à celui mobilisé précédemment. Pour les entreprises de plus de 250 salariés, le taux d’accueil d’apprentis est imposé[6].
Par ailleurs, des décrets sont en préparation pour lever des freins techniques sur certains secteurs professionnels. A partir du 1er mai 2015, les démarches devraient être simplifiées pour que les apprentis mineurs puissent assurer des travaux en hauteur des mineurs et que d’autres puissent utiliser de machines présentant des dangers ou utiliser des produits chimiques. La demande d’autorisation à l’Inspection du travail serait remplacée par une simple déclaration à l’Inspection du travail. Cet allègement de la charge administrative ne va probablement pas débloquer un grand nombre de postes.
Au-delà de cela, les actions en faveur de l’apprentissage évoquées portent sur l’orientation des élèves vers cette voie, la revalorisation de l’image de certains métiers, la promotion de l’image de l’apprenti au niveau de la société, etc.
En matière d’orientation, la responsabilité d’une part au moins des personnels de l’éducation nationale est engagée dans leur promotion de la formation initiale à la sortie du collège au détriment de l’apprentissage[7].
LE NIVEAU DE QUALIFICATION DES APPRENTIS
Le choix du ciblage des efforts sur des qualifications infra bac, c’est-à-dire des collégiens, n’est pas forcément la bonne solution pour parvenir au développement de l’apprentissage.
Il semble que c’est l’image de l’apprenti dans le supérieur qui peut relever l’image de l’apprenti au plus bas niveau de qualification avec la mise en avant d’un argument clé : « faites votre parcours en apprentissage » illustré par des témoignages.
L’avenir de la croissance de l’apprentissage repose, sans aucun doute, sur les qualifications post bac compte de l’évolution rapide des niveaux d’études : 77,5% d’une classe d’âge a obtenu un bac en 2014.
L’évolution enregistrée par la DARES en 2013 sur les niveaux des contrats d’apprentissage le confirme[8].
LA CONSTANTE DES ABANDONS DE POSTES
L’abandon de leur poste par des apprentis concerne près du quart des jeunes. Il est difficile de faire disparaitre cette proportion même en prenant davantage de temps pour sélectionner les candidats en fonction de leur motivation et faisant tous les efforts possibles pour une bonne intégration. Chaque entreprise s’efforce de limiter les ruptures dans la mesure où chaque rupture a un coût réel pour les deux parties.
Néanmoins, il faut admettre qu’il existe un taux de rupture incompressible, pour les contrats d’apprentissage comme dans les contrats de travail, dont la responsabilité est partagée entre l’apprenti et l’employeur.
Les déclarations incantatoires en faveur de l’apprentissage font consensus avec l’objectif symbolique de 500 000 entrées annuelles en alternance, mais les résultats ne sont pas au rendez-vous. Le sujet doit être remis à plat dans son ensemble pour parvenir à une croissance significative du nombre d’apprentis. Les propositions ne manquent pas[9].
[1] DARES Analyses – février 2015 • N° 009
[2] « Parmi les secteurs les plus touchés (le bâtiment, l’immobilier), figurent ceux dont l’activité a été la plus en retrait en 2013. » (DARES Analyses – février 2015 • N° 009). On observe le même type de contraction au niveau du recours à l’intérim sur la même période dans le secteur sinistré du BTP.
[3] Citons : la suppression, en 2012, de l’aide à l’embauche d’un alternant supplémentaire ; la réduction du crédit d’impôt et de l’indemnité compensatrice forfaitaire en 2013 ; la réforme de la taxe d’apprentissage en 2014.
[4] Source : 2 février 2015 – Tableau de bord mensuel des politiques d’emploi et de l’accompagnement des restructurations
[5] Quelques branches professionnelles ont signé des accords dans le cadre du pacte de responsabilité chiffrant le nombre d’embauche d’apprentis sur les années à venir mais, d’une part, les chiffres ne sont pas en forte progression et, d’autre part, ils concernant plusieurs années sans préciser le rythme annuel des embauches. La visibilité reste donc réduite.
[6]« Un quota de 4 % d’alternants dans les entreprises de plus de 250 salariés : Depuis 2012 (décret n° 2012-660 du 4 mai 2012), les entreprises de plus de 250 salariés doivent employer au minimum 4 % d’alternants dans leurs effectifs (5 % à partir de 2015 en vertu de la loi de finances rectificative pour 2012), faute de quoi elles doivent s’acquitter de la contribution supplémentaire à l’apprentissage, proportionnelle à leur éloignement par rapport à l’objectif. Depuis 2012, si les 4 % sont dépassés, les entreprises peuvent, au contraire, recevoir des fonds supplémentaires, ce que l’on désigne sous le terme de « bonus » d’une valeur de 400 euros par contrat et par an. Ce bonus est valable pour toute embauche supplémentaire d’un jeune en alternance, au dessus du quota de 4 % et jusqu’à 6 % ».
[7] « En 2013, la baisse des entrées en apprentissage est quasiment entièrement imputable aux jeunes sortants de collège. Les flux vers l’apprentissage des jeunes sortants d’études ont ainsi diminué de 16 %, alors que, dans le même temps, les recrutements de jeunes demandeurs d’emploi (qui représentent 6 % des entrées) ont augmenté de 24 %. Ce phénomène est notamment particulièrement sensible au niveau CAP-BEP. Les élèves sortants de troisième s’orientent de moins en moins vers l’apprentissage. »
[8] « Le recul des entrées s’observe pour tous les niveaux de formation, mais il est particulièrement sensible pour les formations préparant au CAP-BEP (-11 %) et au baccalauréat professionnel (-10 %). Les flux de nouveaux apprentis dans l’enseignement supérieur, qui avaient continué pourtant de croître assez vigoureusement entre 2008 et 2012, se réduisent également en 2013 (-5 %). » (DARES Analyses – février 2015 • N° 009).
[9] Par exemple, le Medef demande au gouvernement de revenir sur la réforme de la taxe d’apprentissage (mars 2014) en rendant aux entreprises la liberté de financer l’alternance perdue au profit des régions. Il souhaite être plus impliqués dans le pilotage. Le Medef demande une information des collégiens sur les débouchés de chaque cursus du secondaire. Il propose la suppression de toute charge pour l’alternance, l’assouplissement « expérimental » du contrat de professionnalisation, la création de prépas pour les futurs alternants.
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