L’économie collaborative repose sur de nouvelles formes d’organisation du travail. Difficile de dire si le développement des plateformes conduira à terme à des créations nettes d’emplois.
LES PLATEFORMES D’ÉCONOMIE « COLLABORATIVE » SE MULTIPLIENT.
Un rapport concernant les enjeux de « l’économie collaborative »[1] a été remis au Premier ministre par Monsieur Pascal Terrasse, député de l’Ardèche. Les plateformes se sont multipliées. On en compte aujourd’hui, en France, près de 300 dont une majorité sont des entreprises françaises. Ces plateformes présentent divers types de services. Elles assurent une fonction de « commercialisation » de services à la fois nouvelle, originale et ayant une certaine efficacité[2], grâce à des procédés nouveaux comme la géolocalisation des acteurs ou le recours à des logiciels de mise en relation performants entre personnes connectées.
Le recours à ces plateformes est ainsi devenu de plus en plus fréquent. Il occasionne des changements économiques majeurs. Les pouvoirs publics souhaitent permettre le développement de l’économie collaborative en orientant sa croissance afin de garantir une juste concurrence entre les anciennes et les nouvelles méthodes découlant du recours aux plateformes.
Avec l’émergence des plateformes se pose des questions d’encadrement de ce secteur portant à la fois : sur la fiscalisation de ses activités, sur la protection sociale des prestataires de ces plateformes, sur le contrôle du contenu de ces plateformes en privilégiant à la fois informations et transparence, sur leur fonctionnement, etc.[3].
L’ÉCONOMIE COLLABORATIVE REPOSE SUR DE NOUVELLES FORMES D’ORGANISATION DU TRAVAIL.
On peut décomposer les intervenants en trois catégories
- Les plateformes et leurs personnels, qui comprennent des acteurs de l’économie sociale, mais, de plus en plus, des entreprises marchandes des plus classiques, dont certaines ont pris une importance économique majeure : Airbnb, BlaBlaCar, Leboncoin ou Uber.
- Les prestataires de ces plateformes sont soit des travailleurs indépendants, souvent sous le statut d’autoentrepreneur, soit des particuliers dans la mesure où ceux-ci ont un niveau d’activité inférieure à un certain plafond de montant.
- Les bénéficiaires, l’usager ou client des services proposés.
Les salariés employés par les plateformes d’économie collaborative ont été recrutés sur des emplois nouveaux et le développement de ces plateformes a été accompagné par des créations nettes d’emplois.
Parallèlement, les secteurs concurrencés par les plateformes (hôteliers, loueurs de voitures, commerce classique, etc.) ont pu devoir diminuer leurs effectifs, c’est en particulier le cas si l’on compare le développement d’une part l’e-commerce et d’autre part de la distribution classique.
La priorité actuelle consiste à prendre toutes les précautions pour que l’économie collaborative ne constitue pas seulement une stratégie de contournement des règles du droit du travail. C’est à cette condition que le développement de ce secteur pourra avoir lieu de manière équilibrée en respectant de justes règles de concurrence entre des services traditionnels et les services proposés par les plateformes.
Le risque de voir des travailleurs indépendants à faible coût, dans une situation précaire, remplacer des salariés en CDI, bénéficiant d’une couverture sociale complète, existe évidemment. La logique économique pure va en ce sens, c’est pourquoi il semble indispensable de mettre en œuvre une réglementation dans les meilleurs délais.
DIFFICILE DE DIRE SI LE DÉVELOPPEMENT DES PLATEFORMES CONDUIRA À TERME À DES CRÉATIONS NETTES D’EMPLOIS.
Il est aujourd’hui difficile de juger si le développement économique des plateformes conduira à terme à une création nette d’emplois. Certaines plateformes peuvent générer des activités solvables nouvelles et susciter en regard des emplois nouveaux. Mais, dans de nombreux secteurs, les plates-formes proposent des solutions de substitution à des activités existantes, et leurs effectifs ne seront pas forcément supérieurs à ceux des activités existantes.
Les effets de cette évolution économique sur l’emploi sont d’autant plus difficiles à estimer que les secteurs traditionnels ouvrent, ou s’apprêtent à ouvrir, des plateformes en ligne pour une part de leurs activités. Certaines entreprises rachètent d’ailleurs des plateformes en cour de développement. Tandis qu’à l’inverse des plateformes peuvent être tenté de développer des activités économiques de type traditionnel pour se diversifier et se stabiliser.
Les frontières entre les entreprises traditionnelles et les plateformes pourraient être amenées à s’estomper progressivement, avec des innovations d’un côté et un souhait d’installation et de stabilisation de l’autre.
[1] Les activités de l’économie collaborative visent à répondre à neuf grandes fonctions : se déplacer, se financer, se faire aider, s’habiller, s’équiper, se nourrir, se divertir, se loger ou transporter et stocker des objets. Les activités d’économie collaborative concernent ainsi de nombreux domaines, en particulier : Les locations immobilières de courte durée, les échanges de logements, les échanges de chambre entre particuliers, des plateformes de dons, des communautés d’achat de biens alimentaires, via Internet ou dans des lieux dédiés, la vente en ligne de biens artisanaux neufs, réalisés par des particuliers, la vente de biens d’occasion, de particulier à particulier, en ligne uniquement entre parenthèses à l’exclusion des ventes d’appartements et d’automobiles), des jardins partagés, le partage de repas entre particuliers, les services de VTC, la location de parking, l’auto partage, c’est-à-dire la location de véhicules entre particuliers, le covoiturage sur des longues distances, le covoiturage entre le domicile et le lieu de travail, etc.
[2] Le rapport entre les plateformes et leurs prestataires sont des rapports économiques. Le prestataire « travailleur indépendant » travaille dans de très nombreux cas pour une seule plateforme.
Selon le Rapport Terrasse, pour assurer la défense des intérêts des travailleurs indépendants, la loi et la réglementation définissant les relations entre la plateforme et son prestataire devraient évoluer vers :
- La prise en compte de la protection sociale des travailleurs indépendants liés à la plateforme, quant à la formation ; Ce qui revient à poser la question du rapport de la protection sociale des indépendants avec le régime salarié, mais également à poser la question de la continuité du compte personnel d’activité (CPA) pour des personnes passant du statut de salariés à celui de travailleurs indépendants ou du statut de travailleur indépendant à celui de salariés ;
- La formalisation des compétences acquises au travers d’un programme de VAE et l’accès à une formation ;
- La définition explicite des conditions de rupture entre les gestionnaires de la plateforme et leurs prestataires travailleurs indépendants ; celle-ci reste à définir de manière à assurer à chacune des parties une clarté dans les relations ;
- Les plateformes pourraient également être incitées à prendre en charge pour le compte de leurs prestataires certaines démarches administratives liées à la création de leur microentreprise afin de s’assurer que leurs prestataires sont dans une situation en règle (fiscalité, assurances, etc.). Faute de quoi les plateformes pourraient être amenées à être considérées comme responsables en cas de problèmes.
[3] En termes de transparence, le rapport envisage que le bénéficiaire du service final dispose une transparence sur la structure du coût et sur le modèle économique de la plateforme et du prestataire auxquelles il fait appel.
Il s’agit en particulier de connaître le montant de la commission prélevée par la plateforme sur le coût du service, sur des frais de livraison, sur des frais de paiement, sur les assurances souscrites par les différents intervenants, etc. Chaque plateforme pourrait se voir imposer la publication d’informations précisant le caractère exhaustif des contenus référencés, ainsi que le caractère, payant ou non, du référencement. La qualité de ce service, de ses caractéristiques est actuellement le plus souvent floue ou inexistante. Enfin le rapport propose que soient développés des systèmes de notation et d’avis en ligne digne de confiance. Il évoque la possibilité d’une notation externe aux plateformes proprement dites.
Un commentaire to “Quel sera l’impact du développement des plateformes d’économie collaborative sur l’emploi ?”
7 mars 2016
Nouvelle organisation du travail ? | Tout pour ...[…] Le risque existe de voir des indépendants à faible coût, dans un statut précaire, remplacer des salariés en CDI, bénéficiant d’une couverture sociale. […]