Environ 16,3 millions de salariés du secteur privé sont affiliés à l’Assurance chômage et 2,63 millions de chômeurs bénéficiaient d’une allocation chômage à fin mars 2016[1]. Au 31 mars 2016, on comptabilisait au total 3 145 200 demandeurs d’emploi indemnisés, soit +2,6% sur un an, en prenant en compte l’ensemble des types d’indemnisation (assurance chômage, état, autres) [2].
L’Unédic[3] gère un budget annuel global proche de 35 milliards d’euros alimenté par :
- Les cotisations patronales (4% du salaire brut) et
- Les cotisations salariales (2,4% du salaire brut).
Ces cotisations sont prélevées par les organismes de sécurité sociale (URSSAF).
LE RÉGIME DE L’ASSURANCE CHÔMAGE EST EN DÉFICIT DEPUIS 2009
Il cumulait 26,8 milliards de dettes fin 2015 (dont 4,4 milliards d’euros en 2015). Cette situation doit s’aggraver avec un déficit de l’ordre de 3 milliards par an, selon l’Unedic, pour atteindre un total cumulé de l’ordre de 33,6 milliards d’euros à fin 2017.
Le déficit annuel du régime d’assurance chômage est inférieur à la contribution que verse l’Unédic à Pôle Emploi.
Au-delà des injonctions de la Commission européenne visant la réduction des déficits publics à laquelle est associé, à tort ou à raison, le budget de l’assurance chômage, la maitrise des comptes de ce régime social pose un problème majeur pour sa survie même.
Les causes de ce déficit tiennent au déséquilibre entre d’une part le nombre de cotisants et d’autre part celui des bénéficiaires de l’assurance chômage avec la forte croissance du nombre de demandeurs d’emploi indemnisés intervenue ces dernières années.
Les caractéristiques du système d’indemnisation jouent évidemment un rôle principal.
LA RENÉGOCIATION DE LA CONVENTION CHOMAGE N’A PAS ABOUTI
La négociation engagée par les partenaires sociaux au sein de l’Unédic[4] pour mettre au point la convention 2016 de l’assurance chômage, prenant la suite de la convention de 2014, a échoué, dans un contexte social marqué par les vifs débats autour de la loi « travail ». Le gouvernement a décidé de maintenir, au-delà du 30 juin 2016, les conditions de la convention de 2014 dans l’attente d’une reprise des négociations en écartant une décision de l’État. Seule décision prise, un décret à paraitre en juillet devrait transposer, l’accord unanime conclu par les organisations patronales et syndicales de la branche du spectacle en avril concernant les « intermittents du spectacle ».
La relance de la négociation reste en suspens.
LES PROPOSITIONS ENVISAGÉES RESTENT EN SUSPENS
Les solutions évoquées concernent d’une part une hausse des cotisations et d’autre part une diminution des allocations à des niveaux divers.
LA PREMIÈRE SÉRIE DE PISTES CONCERNE LES RECETTES DE L’ASSURANCE CHÔMAGE.
Les syndicats s’opposent à une augmentation des cotisations salariales. Le patronat s’oppose à toute augmentation des cotisations patronales. Des syndicats proposent en particulier une surcotisation patronale chômage sur les contrats courts. Cette demande répond à un constat factuel : la situation de l’assurance chômage est excédentaire pour les demandeurs d’emploi ayant perdu un CDI et fortement déficitaire pour les chômeurs arrivés en fin d’un CDD ou CTT. Néanmoins, dans une période où la reprise de l’emploi se fait au travers de contrats courts plus que de CDI, l’augmentation des charges sur les salaires de ces contrats risque d’avoir un effet négatif. Les solutions évoquées ne semblent pas bien faire la différence entre des contrats courts pleinement justifiés (remplacement, surcroit temporaire d’activité, activités saisonnières, etc.) et des situations d’abus dans le recours aux CDD qui existent effectivement dans certains secteurs et certaines entreprises.
LA SECONDE SÉRIE DE PISTES PORTE SUR LA RÉDUCTION DES ALLOCATIONS CHOMAGE PAR DIVERS BIAIS :
- La baisse de l’indemnisation maximale, c’est-à-dire de l’indemnisation des cadres intermédiaires ou supérieurs (mais qui nécessiterait de diminuer leurs cotisations en rapport d’un éventuel plafonnement). Il s’agit d’une mesure à faible portée budgétaire ciblant une catégorie clé des entreprises donc contre performante.
- La dégressivité des allocations chômage : Des organisations patronales, pas toutes, proposent que l’allocation chômage soit dégressive au bout d’un an. Les organisations syndicales s’opposent à cette logique punitive qui laisse entendre que les personnes au chômage ne cherchent pas un emploi … dans la situation actuelle, avec une faible création d’emploi, cette mesure ne semble pas adaptée.
- Une augmentation du délai d’accès à l’assurance chômage qui pourrait passer de quatre à huit mois.
- Une participation accrue des salariés du secteur public au financement de l’Unédic
- Le fait de repousser de 50 ans à 55 ans l’âge à partir duquel un salarié qui perd son emploi a droit à trois années maximum d’indemnisation chômage, et non pas deux selon la règle générale.
La diminution générale du niveau du montant des allocations chômage (fixées actuellement à 71% du salaire brut antérieur) ne semble pas avoir été envisagée. Cette solution apparait pourtant la plus simple et la plus juste, même si elle n’est pas « électorale » à moins d’un an des échéances de 2017.
LE POIDS DE L’INDEMNISATION CHOMAGE SUR LE MARCHE DE L’EMPLOI
Le niveau de l’indemnisation chômage a évidemment un impact sur la situation de l’emploi. Les demandeurs d’emploi indemnisés peuvent attendre plus facilement un emploi qui convient à leur projet. Mais dans une situation marquée par un très faible dynamisme économique depuis plusieurs années et par une pénurie d’emploi proposée, la réduction des conditions d’attribution de l’allocation chômage aurait un effet négligeable sur la situation du chômage. La communication sur les « tensions sur le marché du travail » est illusoire, en dehors de très rares niches (comme pour le numérique dans certaines fonctions à un moment donné), elles révèlent surtout des métiers pénibles avec des conditions de travail peu enviables et des rémunérations souvent insuffisantes.
C’est la situation du marché de l’emploi qui pèse sur les comptes de l’assurance chômage et non l’inverse.
LA QUESTION POSÉE PAR LE DÉFICIT DU RÉGIME D’ASSURANCE CHÔMAGE A UNE RÉPONSE
Elle nécessite une réponse simple qui ne peut être apportées que par la composition de deux mesures :
- une augmentation du taux des cotisations salariales, d’une part, et
- une diminution globale du taux d’indemnisation, d’autre part.
Il s’agit là d’une décision politique qui ne peut être prise par les partenaires sociaux eux-mêmes dans le cadre du dialogue social.
Ces chiffres de cotisation et d’indemnisation pourraient être indexés sur le taux de chômage pour diminuer de manière automatique avec une amélioration du marché de l’emploi.
[1] Chiffres de Pôle Emploi de juin 2016
[2] Indemnisation chômage par type d’allocation à fin mars 2016.
Type d’allocation | Mars-16 | Evolution sur un an | % de chaque type |
Assurance chômage | 2 635 300 | +3,4% | 83,8% |
§ dont formation | 77 200 | -0,9% | 2,5% |
§ dont Contrat de Sécurisation professionnelle | 77 900 | -12,8% | 2,5% |
Etat | 471 200 | -1,3% | 15,0% |
§ dont formation | 22 600 | -3,8% | 0,7% |
Autres | 38 700 | +0,8% | 1,2% |
Total indemnisés | 3 145 200 | 2,6% | 100,0% |
[3] « L’Unédic est une association loi 1901 créée en 1958, chargée d’une mission de service public. Elle assure la viabilité et la pérennité du système d’indemnisation des demandeurs d’emploi du secteur privé, qui oblige tout employeur de ce secteur à assurer ses salariés contre le risque de privation involontaire d’emploi. »
[4] « L’Unédic est composée d’un conseil d’administration paritaire constitué d’un collège employeurs et d’un collège salariés comportant chacun 25 membres. Il élit son bureau, composé de 10 membres chargés d’assurer le fonctionnement opérationnel de l’Unédic. Celui-ci nomme un directeur général qui est responsable du fonctionnement des services de l’Unedic. Les organisations représentées au sein du conseil d’administration sont, côté patronal, le Medef, l’UPA et la CGPME et côté salariés, pour les non cadres, la CGT, la CFDT, FO, et pour les salariés cadres la CFE-CGC et la CFTC. »
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