Les « travailleurs indépendants » sont environ 3 300 000 personnes. Ils ont des métiers de nature très différente, par la nature de leur activité et le niveau de leurs revenus. Il peut s’agir de micro-entrepreneurs, de travailleurs indépendants classiques ou bien liés à une plateforme en ligne[1], d’artisans, de commerçants, de membres des professions libérales (médecins, notaires, huissiers, architectes, etc.), d’exploitants agricoles, etc.
QUELS TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS POURRAIENT BÉNÉFICIER D’UNE INDEMNISATION CHÔMAGE FIN 2018 ?
Le futur système d’indemnisation chômage des indépendants devrait, de toute manière, être bien différent de celui des salariés. Même si les intervenants comme l’URSSAF, l’Unedic et Pôle Emploi, peuvent être les mêmes, le régime devrait être structurellement séparé du régime d’indemnisation chômage des salariés.
L’une des hypothèses, évoquées par le gouvernement, serait de mettre en place une indemnisation chômage avec des règles assez restrictives pour limiter le cout du dispositif tout en mettant en œuvre une promesse de la campagne présidentielle. L’indemnisation serait d’un montant forfaitaire de 700 à 800 euros par mois et versés sur une durée limitée de six mois à un an. Les droits à indemnisation seraient ouverts sous des conditions évitant des effets d’aubaine :
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À des entrepreneurs en liquidation judiciaire,
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Ayant mené une activité suivie pendant une durée minimale (au moins un ou deux ans),
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n’ayant pas d’autres revenus[2].
Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait promis d’ouvrir les droits à l’assurance-chômage à tous les indépendants. Mais cette promesse s’avère, dans la pratique, impossible à concrétiser, pour des raisons relevant à la fois de la diversité des situations, des couts induits et de leur mode de financement.
Le nombre de bénéficiaires se limiterait à environ 50 000 indépendants privés d’emploi pour un coût annuel de 250 millions d’euros. Le financement, soit par une cotisation, des indépendants concernés, écartée à l’origine, soit par l’impôt, reste à ce jour en débat.
Toute augmentation du budget du système d’indemnisation chômage semble impossible compte tenu du nouveau mode de financement via la CSG dont le résultat a toute chance d’avoir été surévalué (sans compter l’exemption de CSG ou sa compensation pour les fonctionnaires).
L’ouverture du régime à de nouveaux bénéficiaires et la volonté de rétablir l’équilibre du régime devrait ainsi conduire :
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à réduire l’indemnisation des salariés (durcissement des conditions d’accès, baisse de la durée de l’indemnisation et/ou diminution du montant par rapport au salaire antérieur) et
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à multiplier le nombre des radiations. Le renforcement du système des sanctions à l’encontre des demandeurs d’emploi a été récemment réaffirmé par M. Macron
LA POSITION DES PARTENAIRES SOCIAUX RESTE TRÈS RÉSERVÉE QUANT À L’ÉLARGISSEMENT DES PUBLICS DE L’INDEMNISATION CHÔMAGE
Les discussions engagées entre partenaires sociaux, sur la base d’un document préparé par le gouvernement, prête à questions dans la mesure où les indépendants bénéficiaires éventuels de cette indemnisation chômage sont juste représenté dans le débat par l’Union des Professions de Proximité (U2P)[3], voire par la CGPME. L’avis des organisations syndicales de salariés n’a pas vraiment de signification, semble-t-il, pour ce public.
Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l’assurance-chômage pour les travailleurs indépendants du 7 décembre doit aider aux arbitrages du gouvernement[4].
QUEL POURRAIT ÊTRE L’IMPACT D’UN ÉLARGISSEMENT POUR POLE EMPLOI ?
Le coût de l’accompagnement de ces demandeurs d’emploi n’a pas été évoqué puisqu’ils peuvent déjà avoir accès à Pôle Emploi, même si c’est assez rarement le cas, n’étant pas indemnisés.
En cas d’indemnisation chômage, les ex-indépendants seraient tenus de s’inscrire et auraient probablement davantage recours aux services de Pôle Emploi.
[1] Les « travailleurs précaires indépendants », dépendant des commandes d’une plateforme comme Uber, pourraient concernés dans certains cas. L’augmentation du nombre des autoentrepreneurs, liés à une entreprise centralisant les demandes des clients, pose question. Leur statut, compte tenu de leur lien de subordination aux plateformes, n’est pas encore bien réglé par la jurisprudence et par la loi.
[2] Les micro-entrepreneurs exerçant une activité indépendante en complément de leur activité salariée ou de leur retraite seraient exclus du dispositif.
[3] Fin 2016, l’Union Patronale Artisanale (UPA) et l’Union Nationale des Professions Libérales (UNAPL) ont fusionné pour devenir l’Union des entreprises de proximité (U2P). L’U2P rassemble 2,3 millions d’entreprises des secteurs de l’artisanat, du commerce et des professions libérales, soit les deux tiers des entreprises françaises. Elle est constituée de quatre composantes (CAPEB, CNAMS, CGAD, UNAPL) et fédère près de 120 organisations professionnelles nationales.
[4] L’IGAS constate que l’élément déclencheur de l’indemnisation, le revenu de référence, les conditions d’indemnisation, etc. auront « un impact décisif sur le nombre de travailleurs indépendants éligibles de facto à l’assurance chômage, sur le degré de mutualisation du risque au sein de la population couverte et sur la soutenabilité financière du régime ».
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