Le « stratégie nationale de prévention et de la lutte contre la pauvreté » présentée par le Président de la République, et commenté par des membres du gouvernement, aborde plusieurs sujets divers et distincts[1]. Le budget de 8 milliards d’euros sur 4 ans a été évoqué.
Certaines mesures évoquées concernent, indirectement ou directement, la politique de l’emploi.
Le discours gouvernemental affirme qu’il convient « de mettre le travail au cœur de la lutte contre la pauvreté, mieux le rémunérer et accompagner vers l’emploi ceux qui n’en ont pas, par l’éducation et la formation. »
DES MESURES EN FAVEUR DES FAMILLES MONOPARENTALES
Comme mesure ayant un effet indirect, citons celles en faveur de la garde des enfants, appartenant à une famille monoparentale. Le but est de permettre aux mères ou pères seuls de chercher un emploi. 300 crèches à « vocation d’insertion professionnelle » seraient ainsi créées d’ici à 2020 avec des financements d’État. Un plan de formation continue de 600 000 professionnels de la petite enfance a été évoqué sans rentrer dans le détail et le rythme de mise en œuvre. Enfin la création de nouvelles crèches et le développement de modes de gardes pour les familles défavorisées doivent conduire à des créations d’emplois dans ce secteur.
Ce projet en faveur des familles monoparentales répond à un réel besoin. Reste à voir comment va se présenter le volet financier de cette mesure.
UNE « OBLIGATION DE FORMATION » JUSQU’À 18 ANS A ÉTÉ ANNONCÉE
Une « obligation DE FORMATION »[2] jusqu’à 18 ans devrait être instaurée dans le prolongement de l’instruction obligatoire[3]. Un « accompagnement » serait proposé à tout jeune mineur en situation de décrochage scolaire. Le chiffre de 20 000 jeunes par an a été évoqué.
Cette formation obligatoire serait mise en place à la rentrée 2020, avec un meilleur repérage et un meilleur suivi des élèves décrocheurs.
Les missions locales devraient proposer aux jeunes un rendez-vous et des solutions. Elles disposeraient d’une capacité supérieure d’accès à la « Garantie jeunes » (un peu plus de 100 000 par an, pendant la mandature). Reste à voir le budget qui sera mis concrètement en regard de ces intentions. Le plan d’investissement dans les compétences (PIC) serait mobilisé comme prévu pour financer des formations pour ces jeunes décrocheurs.
Cette initiative va dans le bon sens, mais la notion d’ « obligation » semble difficile à concrétiser[4], à tous les professionnels qui connaissent la part du public jeune « invisible » existant aujourd’hui.
LA RELANCE DE L’ACCOMPAGNEMENT INSERTION DES NOUVEAUX BÉNÉFICIAIRES DU RSA
Toute personne qui demande le RSA devrait voir son dossier instruit dans un délai d’un mois maximum et se voir proposer[5] : soit une action de formation (financée par le plan d’investissement dans les compétences), soit un emploi dans une structure de l’insertion par l’activité économique. Un suivi des allocataires, afin de traiter leurs difficultés sociales et professionnelles est annoncé.
La relance de l’accompagnement des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) est évidemment une bonne chose[6] ; leur accès à une formation ou à un emploi en insertion par l’activité économique (IAE) aussi.
Trois remarques s’imposent :
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Cet accompagnement demande des moyens financiers qui restent à mobiliser[7] sans doute au bénéfice des conseils départementaux qui les ont perdus ces dernières années. Ou bien cette mission sera confiée à Pôle emploi, ainsi qu’à des opérateurs privés et associatifs.
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Le financement des acteurs de l’Insertion par l’Activité Economique (IAE), qui accueillerait 100 000 salariés supplémentaires d’ici à 2022, doit passer par la mission « travail et emploi » en forte réduction budgétaire. Déjà en 2018, il a bénéficié d’une part des crédits dédiés aux emplois aidés.
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Une part très significative des bénéficiaires du RSA ne sont pas inscrits à Pôle emploi. Qu’en sera-t-il demain ? Leur inscription ferait faire un bond au nombre des inscrits à Pôle emploi…
Les aspects « emploi » du « plan pauvreté » restent encore en suspens après ces annonces en attendant d’en savoir davantage sur le détail de leur financement en 2019, car le chiffre de 8M€ annoncés porte sur 4 années…
[1] L‘Insee chiffre à 8,8 millions les personnes vivant sous le seuil de pauvreté monétaire (60% du revenu médian, soit 1 026 euros par mois), soit 14% de la population française en 2016.
[2] « J’ai décidé qu’une obligation de formation jusqu’à 18 ans sera mise en place. L’objectif est clair : aucun jeune de moins de 18 ans ne pourra se retrouver sans solution. » (Emmanuel Macron)
[3] Tout jeune de moins de 18 ans devrait s’inscrire dans un parcours de formation : école, service civique ou formation professionnelle. Reste à l’imposer !
[4] Si le mineur refuse l’offre de la mission locale, une « mesure d’assistance éducative » pourrait être prononcée. Cela reste à concrétiser, d’autant que tous les jeunes ne poussent pas la porte d’une mission locale…
[5] « Seuls 9% des allocataires du RSA retrouvent un emploi dans l’année (…). On a cru que proposer des solutions monétaires suffisaient, mais on a oublié que ce qu’ils veulent, c’est s’en sortir. » (Emmanuel Macron)
[6] « La compétence a été transférée aux départements, l’argent n’a pas suivi. […] Je suis le garant de ces droits. L’Etat ne peut pas se défausser vers le département. Nous devons ensemble trouver la solution la plus intelligente pour créer ce service public de l’insertion ». (Emmanuel Macron)
[7] « L’Etat apportera son soutien financier aux collectivités locales pour faire ce travail, mais dans le cadre d’un contrat avec des objectifs d’accès aux droits, d’accompagnement et de retours à l’emploi ».
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