TRANSFORMER LE CRÉDIT D’IMPÔT POUR LES SERVICES À LA PERSONNE EN AIDE DIRECTE POURRAIT AVOIR UN IMPACT SUR L’EMPLOI
Le ministre de l’Économie et des Finances a évoqué la possibilité, à l’étude, de transformer le crédit d’impôt pour les services à la personne en aide directe[1].
Le détail de cette aide directe reste à préciser. Il est à craindre que cette aide soit accordée sous condition de ressources alors qu’aujourd’hui le crédit d’impôt est accordé à tous. Une telle mesure conduirait certains employeurs à réduire leur volume d’emplois ou à recourir au travail non décalé, en partie ou en totalité.
Un changement de système sur les emplois à domicile peut impacter le recours aux services à la personne, dans la mesure où les commandes sont fragiles ; peu de CDI, prédominance des temps partiels et des durées courtes, recours à des prestataires et à l’intérim, etc.
Il faut rappeler que de nombreuses activités sont éligibles au crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile[2], comme la garde d’enfant, le soutien scolaire, l’assistance aux personnes âgées ou handicapées, l’entretien de la maison et les travaux ménagers, les prestations de petit bricolage ou de petits travaux de jardinage, les prestations d’assistance informatique et Internet, etc.
SUR UN AN, LE NOMBRE DE SALARIES A DOMICILE BAISSE
Les derniers chiffres de l’ACOSS[3] indiquent que ce secteur est en recul.
Le plafonnement des montants déductibles fiscalement continue à peser ; alors que ces emplois ont vocation à se développer de manière significative.
La proportion du travail au noir dans ce secteur est significative, mais évidemment non chiffrée.
Le potentiel de l’emploi à domicile pour les enfants comme pour les personnes âgées est important, mais le contexte fiscal ne doit pas continuer à freiner ce développement dans un contexte de stagnation ou de baisse du pouvoir d’achat des particuliers.
Le nombre de salariés baisse en année glissante de près de 1%[4].
Le nombre d’employeurs est resté stable et la masse salariale versée par les particuliers employeurs est quasiment stable sur un an (+ 0,1 %)[5].
La tendance du troisième trimestre 2018 est à la baisse. L’emploi à domicile hors garde d’enfant diminue de 1% au niveau du nombre d’heures au troisième trimestre ; tandis que la garde d’enfant à domicile confirme se stabilise.
« Au troisième trimestre 2018, la masse salariale nette de l’emploi à domicile diminue de 0,5 % après une hausse de + 0,3 % au trimestre précédent. Cette baisse résulte du recul de 0,9 % du volume horaire déclaré, le taux de salaire progressant de 0,4 %. Le nombre d’employeurs est quant à lui stable ce trimestre (après + 0,3 %). »
CE CHANGEMENT DE SYSTÈME D’INCITATION À L’EMPLOI À DOMICILE AURAIT PRINCIPALEMENT DES MOTIVATIONS FISCALES
Il faut noter que cette question directement liée à l’emploi est traitée à Bercy et ne parait pas impliquer, sauf erreur, le ministère du Travail.
Les motivations proviendraient des évolutions de la fiscalité :
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d’une part, aux employeurs, car le versement à mi-janvier 2019 d’un acompte sur crédit d’impôt[6], de 60% du montant de l’année 2017, a paru budgétairement lourd à Bercy et
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d’autre part, aux salariés (pour lesquels le nouveau mode de prélèvement de l’impôt apparait complexe).
L’une des motivations du gouvernement provient des difficultés de mise en œuvre du prélèvement à la source pour les employeurs et les salariés. Le prélèvement à la source pour les salariés à domicile[7] a dû être reporté d’un an pour rechercher des solutions face aux problèmes posés.
Par exemple, il faut savoir comment un particulier peut gérer le prélèvement à la source d’un homme de ménage qui travaille 3 heures par semaine à son domicile, sachant que par ailleurs cette personne à 7 ou 8 employeurs différents et une situation de famille propre…
Pour éviter aux particuliers-employeurs des calculs complexes, une application devrait être mise en place, mais sa mise en service aurait pris du retard.
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L’autre menace qui pèse sur les particuliers employeurs repose sur les dispositions qui vont finalement être prises en 2019 concernant les « contrats courts ».
[1] « Nous allons étudier la possibilité de transformer le crédit d’impôt sur les services à la personne en aide directe pour les ménages, ce sera à la fois plus simple et plus pratique pour tous ». Le ministre de l’économie.
[2] La liste des activités de services à la personne est définie par l’article D.7231-1 du Code du travail. L’exercice de ces activités peut être soumis à l’obtention d’une déclaration ou d’un agrément auprès des services de l’Etat ou d’une autorisation auprès des conseils départementaux.
[3] Acoss Stat n° 281 – Janvier 2019.
[4] Évolution en chiffres glissants 3T 2017/3T 2018
Date | Total général | Emplois à domicile hors garde d’enfant | Assistantes maternelles | Garde d’enfants à domicile |
sept-17 | 2 783 220 | 1 822 492 | 862 933 | 97 795 |
sept-18 | 2 759 250 | 1 816 556 | 844 529 | 98 165 |
Évolution en % | -0,9% | -0,3% | -2,1% | 0,4% |
Selon l’Acoss Stat
[5] « La baisse de 2,1 % du volume horaire déclaré est compensée par la progression de même ampleur du taux horaire (+ 2,0 %) ».
[6] Mi-janvier, le gouvernement a versé sur le compte de près de 9 millions de contribuables un acompte correspondant à 60% des crédits d’impôts attribués notamment pour l’emploi à domicile, les frais de garde de jeunes enfants ou l’hébergement en Ehpad.
[7] Sur environ 2 000 000 de personnes employées à domicile, seuls de l’ordre de 250 000 employés à domicile payent l’impôt sur le revenu et sont concernées par le prélèvement à la source. Les montants seraient, au total, relativement faibles.
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