LES DISCOURS GOUVERNEMENTAUX SUR UN « NET RECUL DU CHÔMAGE » APPARAISSENT UN PEU DU DOMAINE DE L’INTOX.
L’examen des chiffres de la DARES Indicateurs du 25 janvier 2019 conduit à une conclusion claire[1].
La présentation des seuls chiffres des chômeurs en catégorie A, en métropole (mais pas DROM), et leur variation sur le seul quatrième trimestre 2018, peut apparaitre comme une opération de communication politique, qui intervient opportunément dans la période du « Grand débat », afin d’illustrer « les premiers résultats » de la politique menée par le gouvernement.
Le passage d’une catégorie à une autre de certains chômeurs permet d’afficher une sélection de chiffres pour produire un effet qui ne décrit pas vraiment la réalité.
Sur l’année 2018, pour la France entière, hors Mayotte, le nombre total de demandeurs d’emploi, tenus à une recherche d’emploi (A, B et C), a diminué de 0,2%, soit -12 800 personnes.
Ce chiffre est à mettre en regard d’une augmentation dans l’année de +10 200 inscrits à Pôle emploi, passés en formation professionnelle (catégorie D) et retirée du comptage des chômeurs immédiatement disponibles…
En clair l’application du Plan d’Investissement sur les compétences (PIC) augmente un peu le nombre de « chômeurs en formation » et sert à faire baisser le nombre des « chômeurs disponibles ». Entre le second et le quatrième trimestre 2018, près de 31 000 chômeurs de plus se retrouvent en formation. Ce qui par ailleurs est une excellente chose.
Des déclarations de la ministre du Travail illustrent bien la campagne de communication engagée :
« On sort de 30 ans de chômage de masse. Ce n’est pas en mettant une rustine que l’on va le régler »
La principale montée du chômage actuel ne remonte qu’à 10 ans et pas à 30. Depuis le quatrième trimestre 2008, le nombre des demandeurs d’emploi tenus à une recherche active a augmenté de 74%, soit + 2,5 millions !
« On a quand même fait des progrès. On a créé 250 000 emplois nets depuis un an. »
Le nombre de créations nettes d’emplois pour 2018 n’est pas encore connu, mais il semble devoir se situer autour de 100 000, compte tenu des chiffres enregistrés sur les trois premiers trimestres 2018.
La ministre reste néanmoins réaliste en déclarant : « Il y a des signaux positifs, mais il faut aller beaucoup plus loin. »
Elle espère une baisse du taux de chômage pour le quatrième trimestre 2018 qui sera publié mi-février[2].
LE CHÔMAGE DE MASSE STAGNE TOUJOURS À UN HAUT NIVEAU EN FRANCE.
La mise en avant des chiffres d’évolution trimestrielle d’une seule catégorie de demandeurs d’emploi n’apparaît pas significative.
Le nombre total de ces demandeurs d’emploi, tenus à une recherche d’emploi (A, B et C), demeure de l’ordre de six millions de personnes (5 915 700 pour être précis pour le quatrième trimestre 2018).
Avec les autres catégories d’inscrits (D et E), Pôle emploi compte près de 6,6 millions d’inscrits, soit environ un français sur 10.
Une baisse significative du nombre de chômeurs n’apparait pas, à ce stade, engagée pour 2019.
Cette prévision probable influe sur la négociation de l’assurance chômage dans la mesure où la baisse du budget ne va probablement provenir de la diminution du nombre de bénéficiaires.
La plupart des experts doutent d’une baisse significative du nombre des inscrits à Pôle emploi en 2019 compte tenu des prévisions économiques (taux de croissance, balance commerciale, investissements, etc.).
[1] Nombre moyen de demandeurs d’emploi au quatrième trimestre 2018 par rapport au quatrième trimestre 2017
A | B | C | A, B et C | D | E | Ensemble | |
T4-17 | 3 727 500 | 768 200 | 1 432 800 | 5 928 500 | 286 200 | 412 400 | 6 627 100 |
T4-18 | 3 676 500 | 772 200 | 1 467 000 | 5 915 700 | 296 400 | 362 000 | 6 574 100 |
Évolution | – 51 000 | 4 000 | 34 200 | – 12 800 | 10 200 | – 50 400 | – 53 000 |
Évolution en % | -1,4% | +0,5% | +2,4% | -0,2% | +3,6% | -12,2% | -0,8% |
La baisse du nombre de demandeurs d’emploi en catégorie E correspond à la disparition d’une bonne part des emplois aidés. Source : https://bit.ly/2UrGM7h
[2] Le taux de chômage est estimé au travers d’une enquête, sur un échantillon, menée par l’Insee, selon les critères du Bureau international du travail (BIT). Il est l’objet de débats compte tenu de sa nature.
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