LA GARANTIE JEUNES SE TROUVE INDIRECTEMENT EN QUESTION.
Entre octobre 2013 et juillet 2018, les Missions locales ont intégré 229 000 jeunes[1] sur le parcours de la « Garantie jeunes (GJ) »[2]. En effet, après une période d’expérimentation dans quelques départements, la « Garantie jeunes » a été généralisée[3].
Au moment où le changement de mode de paiement de cette prestation au Missions locales par le ministère du Travail pose problème[4], l’examen du fonctionnement et des résultats de la Garantie Jeunes survient à propos.
L’UNML considère que :
« le bilan établi par la Dares met en évidence l’action très positive des Missions locales dans l’accompagnement des jeunes vers l’emploi et l’autonomie, au moment où elles sont confrontées à des difficultés financières suite aux modifications des règles de paiement de la Garantie jeunes » – UNML
Au moment de leur entrée en Garantie jeunes, la plupart d’entre eux étaient déjà suivis par la mission locale ; Il se produit donc une sélection des entrants sur critères, croisée avec une acceptation du dispositif par les jeunes à qui cet accompagnement est proposé.
« L’accompagnement en Garantie jeunes est intensif, en particulier au cours des deux premiers mois. Les jeunes assistent à de nombreux ateliers et, selon la logique du « work first », réalisent de nombreuses immersions en entreprises. » DARES Analyses
Ces jeunes au moment de l’entrée en Garantie jeunes connaissent « une situation économique et sociale précaire ». Le volet social est conséquent.
« Ils touchent en moyenne 3 900 euros d’allocation au cours de l’accompagnement, qui dure en moyenne 11 mois en Garantie jeunes. » DARES Analyses
Mais cette indemnité reste inférieure au niveau du RSA auxquels ces jeunes n’ont pas accès. Elle présente néanmoins l’avantage d’être adaptée à chacun.
La DARES ne donne pas le nombre de jeunes entrées en « Garantie jeunes » par an, dont pour 2017 et 2018, ni le cumul du nombre de jeunes suivis en fin de chaque année. Le chiffre cumulé des entrées, depuis 2013, n’a pas de signification sérieuse.
LE CHOIX POLITIQUE DU CIBLAGE DES JEUNES APPARAIT BIEN RESPECTÉ.
Les résultats d’un processus d’accompagnement ne peuvent être jugés qu’en observant la sélection des bénéficiaires.
Pour donner un exemple, les lycées qui obtiennent 100% de reçus au bac sont ceux qui ont éliminé les lycéens ayant un niveau trop faible durant la seconde et la première. Des lycées de bon niveau ont des résultats inférieurs car ils ont gardé tous les lycéens.
Pour les jeunes, entrés dans le dispositif avant la fin 2017, un profil est établi. Il diffère de celui de l’« ensemble des jeunes de 16 à 25 ans sortis de formation initiale ».
La proportion des jeunes de nationalité étrangère des GJ est très proche de la moyenne (93% de français).
Les jeunes habitant en ZUS ou en Quartier Politique de la Ville (QPV) sont le double de la moyenne : 24% contre 12%. Ceux résidant en zone rurale sont moins représentés, 12% au lieu de 18%.
Les jeunes ont en majorité, 84%, moins de 22 ans[5].
Leur niveau de sortie de scolarité est plus bas que la moyenne[6].
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57% n’ont aucun diplôme.
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20% ont un CAP ou un BEP
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21% ont un bac et
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2% ont un niveau post bac avec ou sans diplôme.
La garantie jeunes ne concerne pas les étudiants en rupture d’études supérieures.
Le choix politique du ciblage apparait à peu près respecté. Le fait de savoir si c’est la bonne formule ouvre un autre débat, qui n’est pas l’objet de ce billet.
32,5% DES BÉNÉFICIAIRES DE LA GARANTIE JEUNES SORTENT EN EMPLOI OU EN FORMATION
Les chiffres, présentés par la Dares, portent sur la période d’expérimentation de la GJ (entrées avant fin 2016).
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22% des entrants abandonnent le parcours GJ en cours d’année en moyenne au bout de 7 mois et demi.
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76% achève leur année en GJ.
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1,8% demande un renouvellement[7].
Parmi les 76% qui terminent une année d’accompagnement les sorties sont diverses, 41% sont en « accès à l’autonomie avec situation active ».
Cela revient à dire que 32,5% des jeunes sortent de la Garantie Jeunes sortent d’accompagnement avec une solution positive[8].
C’est-à-dire qu’ils sont « en emploi » ou « en formation qualifiante ou certifiante » au moment de la sortie du dispositif.
Un petit tiers des jeunes sortent de GJ en emploi ou en formation. C’est beaucoup ou trop peu selon l’objectif du dispositif par rapport à un public en difficulté.
LES RÉSULTATS ANCIENS PRÉSENTÉS PAR LA DARES SONT PEU SIGNIFICATIFS.
Au-delà de ces chiffres, la DARES cite une enquête plus ancienne, réalisée lors des expérimentations[9] en 2014 et 2015, sur un échantillon limité, ses résultats ne sont pas comparables aux chiffres précédents.
Ils indiquent que « 29 % des bénéficiaires sont en emploi 8 mois après l’entrée en dispositif, 41 % au bout de 19 mois »[10]. Mais le « en emploi » comprend « alternance, intérim, stage et service civique » !
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L’accès à l’emploi progresse sans doute parmi les jeunes bénéficiaires après l’entrée en « Garantie jeunes », et suite à la sortie de la prestation, mais il apparait difficile de juger dans quelle proportion au regard des chiffres diffusés par le Ministère du Travail.
Diverses opinions sont exprimées par les experts sur les résultats des différents dispositifs destinés à l’accompagnement des jeunes « sans emploi ni formation »[11] et leur insertion professionnelle.
Le débat doit être rouvert.
[1] Source : DARES Analyses – La garantie jeunes : quels jeunes et quel bilan après cinq ans ? – 17.04.19 https://travail-emploi.gouv.fr/emploi/mesures-jeunes/garantiejeunes/
[2] La « Garantie jeunes » s’adresse à des jeunes de 16 à moins de 26 ans, en situation de précarité qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en étude (NEET). Pour favoriser leur insertion dans l’emploi, ils sont accompagnés de manière intensive et collective et bénéficient de mises en situation professionnelle. Cet accompagnement est assorti d’une aide financière pour faciliter leurs démarches d’accès à l’emploi.
[3] Généralisation à toute la France y compris dans les départements d’outre-mer.
Le Décret n° 2016-1855 du 23 décembre 2016 relatif au parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie et à la Garantie jeunes, issu de l’article 46 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 (Loi Travail) prévoit en effet l’inscription de la Garantie jeunes dans le code du travail, au sein d’un parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie.
[4] Changement des « règles de paiement de l’accompagnement de la garantie jeunes ».
[5] Age au moment de l’entrée en GJ
Age | Bénéficiaires de la GJ | Moyenne | Ecart |
Moins de 18 ans | 5% | 3% | +2 |
18 à 19 ans | 36% | 12% | +24 |
20 à 22 ans | 43% | 36% | +7 |
23 ans et plus | 16% | 48% | -32 |
[6] Niveau de formation à l’entrée dans la Garantie jeunes
Niveau | Situation | Bénéficiaires de la GJ | Moyenne [1] | Ecart |
VI | Sortie avant la troisième générale | 10% | 4% | +6 |
V bis | 1ère année de CAP-BEP, sortie de 3ème | 19% | 6% | +13 |
V non-validé | Niveau CAP-BEP sans diplôme | 18% | 8% | +10 |
V avec diplôme | CAP-BEP | 20% | 15% | +5 |
IV non-validé | Niveau Baccalauréat sans diplôme | 10% | 6% | +4 |
IV avec diplôme | Baccalauréat | 21% | 21% | – |
I, II et III, avec ou sans diplôme | Au moins Bac+2 | 2% | 40% | – 38 |
[7] Sortie de Garantie Jeunes
Sortie du dispositif | Renouvellement | Rupture | Ensemble | |
Pourcentage des sorties | 76,1% | 1,8% | 22,1% | 100% |
Durée moyenne en GJ | 12 mois | 17,3 mois | 7,5 mois | 11,1 mois |
Motifs des sorties | Sortie du dispositif | Renouvellement | Rupture | Ensemble |
Accès à l’autonomie avec « situation active » | 41,3% | 36,2% | 1,7% | 32,5% |
Accès à l’autonomie « sans situation active » | 52,0% | 51,7% | 1,9% | 40,9% |
Abandon du jeune | 1,2% | 1,9% | 21,6% | 5,7% |
Non-respect des engagements | 1,1% | 2,5% | 47,2% | 11,3% |
Réorientation vers un autre dispositif | 4,1% | 5,3% | 5,2% | 4,4% |
Autre | 0,4% | 2,4% | 22,4% | 5,3% |
[9] Jeunes entrés en Garantie jeunes sur les territoires de vague 1 de l’expérimentation entre juin et décembre 2014 ou entrés sur les territoires de vagues 1, 2 ou 3 entre mi-mars et mi-juillet 2015.
[10] Trois enquêtes successives sur des bénéficiaires de la Garantie jeunes
Interrogation 1 | Interrogation 2 | Interrogation 3 | |
Nombre de mois depuis l’entrée en GJ (en moyenne) | 7,9 mois | 13,7 mois | 19,1 mois |
En emploi y compris alternance, intérim, stage et service civique | 28,5% | 36,9% | 41,1% |
[11] Emploi : bilan positif pour la garantie jeunes, dispositif d’aide pour les 16-25 ans en décrochage – Le Monde – Par Bertrand Bissuel – 18 avril 2019 – https://lemde.fr/2V2Ot7P
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