L’ACCÈS A L’INDEMNISATION CHÔMAGE DE SALARIES DÉMISSIONNAIRES PORTEURS DE PROJETS EST PRÉVU POUR LE 1ER NOVEMBRE.
Bpifrance est l’organisme en charge de l’ensemble des interventions en matière de soutien à la création d’entreprises et à l’entrepreneuriat[1]. Il vient de communiquer à propos de l’accès des salariés démissionnaires à l’indemnisation chômage.
En effet, à compter du 1er novembre 2019, tous les salariés démissionnaires pourront prétendre à une indemnisation au titre de l’assurance chômage, mais sous deux conditions
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Avoir au moins 5 ans d’ancienneté dans leur entreprise[2], c’est-à-dire avoir été employé de manière « ininterrompue »,
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Justifier d’un projet professionnel.
Ces dispositions visent une catégorie particulière : celle des salariés en CDI d’au moins trente ans (pour avoir cinq ans d’ancienneté).
Le prochain Décret portant de la réforme de l’assurance chômage devrait le préciser. L’indemnisation serait équivalente à celles des autres demandeurs d’emploi.
Bpifrance précise que :
« ces mêmes salariés pourront bénéficier à compter du 1er janvier 2020 d’un accompagnement gratuit dans le cadre de leur projet avec notamment le déploiement du conseil en évolution professionnelle (CEP) ».
Le recours au CEP, parait, d’une part, une disposition générale, et d’autre part, semble plutôt devoir être exercé durant la période où le salarié est encore en emploi et avant de décider de sa démission !
IL SERA DIFFICILE DE JUGULER LE NOMBRE DE CES DÉMISSIONS INDEMNISÉES
Ce nombre va dépendre :
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de l’engouement des salariés pour un tel dispositif, celui-ci peut être poussé par diverses motivations personnelles (souhait de rupture, etc.) ou professionnelles,
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de la manière dont Pôle emploi validera l’existence d’un projet professionnel et les critères qui seront réellement pris en compte sont encore inconnus.
La fourchette de 20 000 à 30 000 démissionnaires concernés a été évoquée par la ministre du Travail. Mais, cette estimation ne repose sur aucune base sérieuse.
Le nombre pourrait atteindre, ou dépasser, les 250 000, si le contrôle est « souple ».
Cette formule est susceptible de générer des démissions, c’est pourquoi elle a été l’objet de critiques de responsables syndicaux comme de responsables patronaux.
Il faut prendre en compte le fait qu’une fois qu’il est « demandeur d’emploi », le salarié démissionnaire peut bénéficier d’un système d’aide très complet, dans le cadre d’un projet de création ou de reprise d’entreprise[3]. Il peut, en particulier, choisir entre le maintien de tout ou partie de ses allocations chômage ou d’une aide financière versée sous forme de capital.
LA DISPOSITION QUI VA ÊTRE MISE EN PLACE NE RÉPOND PAS AUX PROMESSES DE CAMPAGNE FAITES PAR EMMANUEL MACRON EN 2016 ET 2017.
Le candidat à la présidentielle, Emmanuel Macron, avait en effet affirmé :
« Nous ouvrirons les droits à l’assurance-chômage aux salariés qui démissionnent » (…) « Tous les cinq ans, chacun y aura droit, s’il choisit de démissionner pour changer d’activité ou développer son propre projet professionnel. Ceci incitera les entreprises à investir pour améliorer la qualité de vie au travail afin de conserver leurs salariés, dont nous renforçons ainsi le pouvoir de négociation. »
Le gouvernement a réduit cette promesse « universelle » en introduisant une condition assez limitative pour en limiter son impact financier.
Le « projet d’évolution professionnelle » devrait a priori :
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Consister en une reconversion nécessitant des formations.
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Avoir été jugé comme « réel et sérieux », avant la démission, par la commission paritaire régionale compétente.
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Répondre « raisonnablement aux besoins du marché du travail ».
Mais il reste à savoir comment cette intention va se traduire dans la pratique des textes et du terrain.
CE TYPE DE DÉMISSION INDEMNISE POUR PROJET PROFESSIONNEL VIENDRAIT S’AJOUTER AUX DÉROGATIONS DÉJÀ EXISTANTES.
Environ 50 000 salariés démissionnaires bénéficient déjà, chaque année, de mesures dérogatoires en fonction de leur situation personnelle (mobilité familiale, etc.).
La liste de ces « cas de démissions considérées comme légitimes » est précisé dans l’Accord d’application du 14 avril 2017 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage[4].
Si l’on prend l’estimation de 25 000 « démissions avec projets » indemnisées, on peut conclure que de l’ordre de 75 000 démissionnaires sur 1 million seraient indemnisés en 2020.
Il est vrai que la multiplication du nombre des ruptures conventionnelles[5] a eu pour conséquence de diminuer le nombre des démissions.
A fin mai 2019, sur une année courante, elles se sont élevées à 441 000 demandes homologuées et elles ouvrent droit à une indemnisation chômage.
[1] La Caisse des Dépôts, Bpifrance et l’Agence France Entrepreneur ont acté le transfert à Bpifrance de l’ensemble des interventions en matière de soutien à la création d’entreprises et à l’entrepreneuriat. Ce transfert a eu lieu le 1er janvier 2019.
[2] « Ce droit pourra être renouvelé tous les 5 ans soit 8 fois sur une vie professionnelle de 40 ans. » (Bpifrance). Cette formulation apparait bizarre, quand on y réfléchit…
[3] https://bpifrance-creation.fr/encyclopedie/aides-a-creation-a-reprise-dentreprise/aides-sociales-financieres/aides-financieres
[4] L’Accord d’application n° 14 du 14 avril 2017 pris pour l’application des articles 2, 4 e) et 26 §1er b) du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage. https://www.unedic.org/indemnisation/textes-reglementaires/conventions-dassurance-chomage/accord-dapplication-ndeg-14-du
Le droit aux allocations chômage du salarié démissionnaire – 28.11.18 – https://travail-emploi.gouv.fr/droit-du-travail/la-rupture-du-contrat-de-travail/article/le-droit-aux-allocations-chomage-du-salarie-demissionnaire
[5] Elle permet à l’employeur et au salarié en contrat à durée indéterminée (CDI) de convenir d’un commun accord des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle individuelle ou collective est possible sous conditions et indemnisation.
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