LA DIMINUTION DE L’INDEMNISATION CHÔMAGE ARRIVE
L’assurance chômage a disparu avec l’abandon des cotisations chômage des salariés. Reste un mécanisme d’indemnisation alimenté par l’État (CSG) et par le patronat via l’Unédic. Le financement dépend désormais de l’État.
Les effets de la réforme de l’indemnisation chômage, décidé par le gouvernement, se profilent. Après les annonces et la parution des décrets, le calendrier progresse.
L’Unédic va présenter aux partenaires sociaux un document de travail lors de son Conseil d’administration du 24 septembre. Plusieurs documents ont déjà circulé en juillet et ces derniers jours. Les mesures vont commencer à s’appliquer dès le 1er novembre 2019, puis en avril 2020.
Elles conduiront, selon les cas, à un retard dans l’entrée dans le régime d’indemnisation, à une réduction de la durée d’indemnisation ou à la baisse du montant des allocations, pour une bonne part (a priori plus de 40%) des chômeurs indemnisés.
Les demandeurs d’emploi, comme les nouveaux inscrits à Pôle emploi, vont connaitre pour une bonne part une diminution ou une suppression de leur indemnisation.
CETTE REFORME S’APPUIE SUR UNE OPINION FAVORABLE DE LA PART D’ACTIFS EN EMPLOI STABLE
L’annonce de la réforme à l’été n’a pas permis aux organisations syndicales de mobiliser autrement que symboliquement contre cette diminution des prestations du régime. Les chômeurs ne se sont pas mobilisés en faveur du maintien de leur indemnisation, en dehors de rares actions locales et ponctuelles associatives.
Pour caricaturer, les salariés en CDI se semblent peu concernés par la situation des chômeurs et les précaires sont peu syndiqués.
Il faut reconnaitre qu’une part des actifs en emploi (salariés en CDI et fonctionnaires) ressentent une sourde hostilité, implicite ou explicite, pour les chômeurs indemnisés, tant qu’ils ne sont pas confrontés eux-mêmes, ou leurs proches, à un problème d’emploi.
Le gouvernement s’appuie, à tort ou à raison, sur cette opinion hostile aux « assistés », auxquels sont assimilés injustement les bénéficiaires de l’« assurance chômage »[1].
LE FINANCEMENT UNEDIC DE POLE EMPLOI SERA MIS EN CAUSE.
La proportion des demandeurs d’emploi indemnisés au titre du chômage est aujourd’hui de l’ordre de 40% des inscrits à Pôle emploi, elle va nettement diminuer avec l’application de la réforme. De ce fait, le financement de Pôle emploi par l’Unédic (11% de son budget), aujourd’hui majoritaire, va avoir tendance à perdre encore davantage sa signification.
Si la part des inscrits indemnisés diminue à moins de 30%, pourquoi l’Unédic paierait plus de 30% du budget de Pôle emploi ?
Rappelons que les comptes de l’Unédic sont dès à présent équilibrés, sans sa participation au financement de Pôle emploi…
LA CONCRÉTISATION INDIVIDUELLE DE LA BAISSE DE L’INDEMNISATION VA CONDUIRE À UN MÉCONTENTEMENT ET DES CHANGEMENTS DE COMPORTEMENTS.
La concrétisation individuelle de la baisse de l’indemnisation pourrait être à l’origine d’une insatisfaction des intéressés et de leurs proches, qui se manifestera progressivement, mais surement, sous des formes difficiles à prévoir (« gilets jaunes » ou équivalents).
Mais parallèlement à une insatisfaction de cette perte de droits, ce qui semble à prévoir, c’est le changement d’attitudes des demandeurs d’emploi retravaillant « un peu », à temps partiel et/ou en contrat court.
Beaucoup choisiront le maintien d’une indemnité pleine (sans recours à un travail ponctuel), le passage à la prime à l’emploi, le basculement dans le RSA, etc.
L’incitation des salariés en contrat court à travailler davantage, suite à la réduction ou la suppression de leur indemnisation chômage, évoqué par la ministre du Travail, a toute chance d’avoir un effet marginal. Car leur emploi en CDI dépend de la demande d’un employeur. Or les mesures prises touchant quelques rares branches professionnelles[2] sont à la fois trop complexes et trop insuffisantes pour s’avérer efficaces. C’est une plaisanterie.
Difficile de dire comment va se traduire la dégressivité de l’indemnisation des cadres, au bout de 6 mois. Sans toucher un public nombreux, elle peut se traduire par des conséquences dramatiques dans certains cas. Les organisations syndicales savent que cette mesure de dégressivité de l’indemnisation constitue un test et a vocation à être élargie à d’autres catégories de salariés, dans l’esprit qui est le sien !
Les mesures prises par le gouvernement semblent avoir fait une complète impasse sur les transferts pourtant prévisibles d’un budget sur un autre (budget Unédic vers budget Solidarité).
L’IMPORTANT IMPACT HUMAIN ET FINANCIER SERA CONNU EN 2021
L’impact humain et financier devrait être précisément connu courant 2021, après une première année d’application complète des nouvelles dispositions.
Dans l’immédiat, les prévisions du nombre de personnes impactées varient dans une fourchette allant de 800 000 et 1 200 000. Encore faut-il savoir si l’on parle du nombre des chômeurs indemnisés à une date donnée, ou au cumul du nombre des personnes touchées en un an.
L’Unédic veillera évidemment scrupuleusement à donner le paysage du recul du nombre de personnes indemnisées dans le cadre de ses comptes. L’opposition de l’ensemble des organisations syndicales à cette réforme va générer une grande transparence sur ses effets.
LES CONSÉQUENCES DE CES MESURES POLITIQUES ET BUDGÉTAIRES NOURRIRONT LE DÉBAT AVANT LES ÉCHÉANCES ÉLECTORALES DE 2022.
[1] Il s’agit d’une base électorale favorable à la politique menée par l’exécutif.
Le discours récurrent et excessif de l’exécutif sur les « emplois non pourvus », qui sont en faible nombre selon Pôle emploi, ou sur le fait de faire gagner plus à « ceux qui travaillent », alimente cette hostilité vis-à-vis des chômeurs.
Il est vrai que les personnes en emploi stable, CDI et fonctionnaires, constituent (heureusement par ailleurs) une grande majorité des salariés. Le discours s’adresse à cette majorité en sécurité professionnelle. Ce qui est un bon calcul de marketing politique.
[2] Elles touchent des branches professionnelles qui n’ont pas pu ou su se défendre alors que d’autres échappent à ces mesures.
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