LES PRINCIPES DE LA RÉFORME DES RETRAITES SONT BIEN FIXES, IL RESTE JUSTE DES DÉTAILS DE CALENDRIER A RÉGLER
La publication prévue du projet de loi sur la réforme des retraites, dont le texte a été finalisé par un haut-commissaire après 18 mois de travail, a été reporté[1].
Parmi les raisons de ce report figurent le contexte électoral des élections municipales de mars 2019, divers mouvements de mobilisation professionnelle (professions libérales, RATP, organisations syndicales, etc.) et, sans doute, la mise en évidence de contradictions internes au projet initial.
Les principes de la réforme sont déjà fixés : « système universel » par points et suppression des régimes spéciaux, par exemple, ceux de la RATP ou de la SNCF. Quelques exceptions au « régime universel » apparaissent possibles.
La question semble porter sur le délai et les conditions de mise en œuvre[2] avec une loi-cadre suivie de nombreux textes d’applications étalées dans le temps[3].
La réforme des retraites fera l’objet de consultations sur quatre thèmes : conditions d’ouverture des droits, l’âge de départ à la retraite, la durée de cotisation et le pilotage financier du système.
L’IDÉE DE TRAVAILLER PLUS LONGTEMPS « N’EST PLUS TABOUE »
Le premier ministre a déclaré que : « l’idée de travailler plus longtemps n’est plus taboue ». Pour un départ à la retraite à taux plein, les deux variables demeurent, d’une part, la durée de cotisation et, d’autre part, la question de la prise en compte de l’âge du travailleur. C’est peut-être la seule question où un flou demeure à ce jour.
Le Premier ministre a cité, par conséquent, la nécessaire mobilisation des entreprises pour maintenir les plus de 60 ans en activité.
Il vient d’ailleurs d’annoncer à ce propos la mise en place d’une mission sur le maintien des seniors dans l’emploi pour faire des propositions sur le sujet, en collaboration avec la ministre du Travail.
Une politique en faveur du maintien dans l’emploi des seniors existe déjà, mais elle reste d’un effet assez marginal.
LA QUESTION DU RELÈVEMENT DE L’AGE LÉGAL DE LA RETRAITE RESURGIT.
L’élévation de l’âge de la retraite de 60 à 62 ans a eu des conséquences directes sur les budgets de la solidarité et du chômage. Ces transferts de charges[4] étaient prévisibles, mais ils ont été volontairement ignorés lors de la précédente réforme des retraites.
Le même schéma semble se répéter quant à ce projet déjà finalisé de réforme qui vise à remonter d’une manière ou d’une autre l’âge de la retraite à 64 ans ou plus pour valider des points nécessaires.
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Faire travailler deux ans de plus les salariés en poste, en imaginant que cela soit possible, revient à retirer un à deux millions d’emploi ; c’est à dire à freiner l’entrée sur le marché du travail de jeunes.
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Ne pas permettre aux chômeurs de plus de 60 ans de prendre leur retraite conduit à une dépense en allocation chômage ou en aides de solidarité.
Une fois de plus, on constate que la question de l’emploi est directement touchée par une prolongation imposée des carrières, et qu’elle n’a pas été abordée.
LA CLÉ DE LA QUESTION DES RETRAITES REPOSE AVANT TOUT SUR UNE BONNE POLITIQUE DE L’EMPLOI.
Le nombre de personnes en emploi constitue la seule condition de retour à l’équilibre du système des retraites, comme celui des autres régimes sociaux.
Le projet actuel de la réforme des retraites du gouvernement repose sur le présupposé d’un nombre insuffisant d’actifs en emploi.
La meilleure solution pour payer les retraites est le « plein emploi » avec un travail pour trois millions de jeunes et de chômeurs.
Ne serait-t-il pas plus judicieux de favoriser l’entrée sur le marché du travail d’une bonne part des jeunes ?
Pour donner un exemple type, un début de carrière à 25 ans, avec 42,5 ans de cotisation retraite (avec des années comptées demain en points), mène aujourd’hui à 67,5 ans pour obtenir une retraite à taux plein sans interruption de carrière. Ce qui est possible dans le public et rare dans le privé (où les trous dans la carrière sont fréquents)[5].
Dernier Billet paru sur ce sujet : « Quel serait l’effet sur l’indemnisation chômage, le RSA et les autres aides d’un recul de l’âge des retraites ? » – 05/04/19 – https://bit.ly/2TVoz14
[1] Le Premier ministre a dit « prendre le temps » pour élaborer le régime universel des retraites voulu par Emmanuel Macron, dont l’adoption est annoncée à l’été 2020. « Nos convictions (…) sont fortes et notre détermination est entière, mais la réforme n’est pas écrite. »
[2] La mise en place du système universel ne concernerait ni les retraités actuels ni les actifs proches de la retraite, nés jusqu’en 1963.
[3] Selon le premier ministre, ce délai servira à « définir le système cible et les générations concernées » par le « système universel » par points.
[4] Des personnes sans emploi se sont trouvées au chômage indemnisé avec une allocation chômage d’un montant supérieur à celui de leur future pension (tant mieux pour eux) et ils ont continué à acquérir des trimestres supplémentaires. Il y a eu de fait un transfert de charges de la Caisse de retraite vers l’assurance chômage sans élévation des cotisations chômage.
D’autres personnes entre 60 et 62 ans se trouvant « sans emploi et sans indemnités chômage » sont venues grossir les rangs des bénéficiaires des aides de solidarité comme le RSA, etc., ce qui explique en partie la croissance du nombre de bénéficiaires et celle des dépenses de la CNAF. Il y a eu un transfert de charges de la Caisse de retraite vers la CNAF.
Des actifs ont prolongé leur carrière de deux ans ou plus freinant le recrutement des plus jeunes qu’eux, compte tenu de la diminution du nombre net d’emplois en France durant toute cette période. Les personnes qui n’ont pas pris ces postes, ou leurs équivalents, ont, pour une part au moins, bénéficié de l’allocation chômage.
L’augmentation du nombre de chômeurs et bénéficiaires du RSA est en grande partie liée au relèvement de l’âge de la retraite lors de la précédente réforme des retraites.
[5] Exemple, un diplôme bac+5 obtenu à 23 ans (avec une scolarité sans incident ou redoublement) conduit à une fin de carrière à 65,5 ans, au plus tôt en cas d’embauche immédiate et sans incident de carrière. Notons qu’un tele ce jeune aura fait 20 ans d’études et que l’on peut attendre qu’il soit à même de travailler !
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