Le marché du travail à la rentrée 2020 va être caractérisé par une priorité accordée à la sauvegarde de l’emploi et par des vagues importantes de licenciements économiques (réduction des effectifs ou fermetures d’entreprises), une fois que la période de stockage permise par le chômage partiel retombera. Il apparait probable que le maintien des salariés en emploi prime dans la politique de la plus grande part des entreprises.
De plus le réservoir des travailleurs au chômage (anciens salariés, intérimaires ou indépendants) se trouvera à un niveau très élevé, avec des profils expérimentés souhaitant retrouver un emploi au plus vite.
L’ACCÈS DES JEUNES AU PREMIER EMPLOI A ÊTRE DIFFICILE A LA RENTRÉE 2020.
Dans un contexte de baisse massive du nombre des emplois dans le privé, les jeunes arrivés au terme de leur formation en 2020 risquent de voir se rallonger fortement leur délai d’accès à un premier emploi.
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Pour les jeunes qui achèvent des études générales (non professionnelles), diplômés ou non (échecs universitaires), la recherche d’emploi risque d’être assez longue. Elle doit s’orienter, sans a priori, sur la demande existante à la rentrée 2020 dans tous les secteurs.
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Pour les jeunes qui achèvent des études à caractère professionnel (CAP, bac pro, DUT, BTS, licence pro, master pro ou doctorat), les perspectives vont être très différentes selon les diplômes et les secteurs professionnels visés.
La crise va toucher tout autant les indépendants (créateurs d’entreprise, start-uppeurs, etc.) que les salariés.
Des professions apparaissent sinistrées (par exemple aujourd’hui celle des avocats). Les emplois proposés à des débutants dans les secteurs « prohibés » ou impactés, tels que le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, les activités de loisirs collectifs, l’évènementiel et le spectacle, le transport aérien, le commerce international, etc. risquent d’être très peu nombreux à la reprise, sauf exceptions. Comme pour les professions qui s’y rattachent (par exemple, information et publicité).
D’autres professions et secteurs devraient poursuivre leur vie de manière à peu près stable. C’est le cas des professions de santé, le commerce en ligne ou de certaines professions du numérique. De même, le recrutement de fonctionnaires sera assuré, avec des adaptations prévues à la tenue des concours.
LES PRÉVISIONS DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUR LES DÉBOUCHÉS DE LEURS FORMATIONS NE VONT PAS SE VÉRIFIER.
Les prévisions des établissements comme des organismes publics (CEREQ, DGESIP, etc.) et privés sur l’accès à l’emploi des diplômés, qui concernent le temps d’accès à l’emploi, la rémunération moyenne des diplômés, etc., n’ont plus beaucoup de sens à ce jour, en dehors de diplômes de certaines grandes écoles et de masters2 dans des universités réputées, qui vont tirer leur épingle du jeu.
Cette rupture entre les « promesses » éducatives et la situation issue de la crise sociale pour les jeunes va apparaitre profonde pour eux-mêmes et leur famille.
C’est d’autant plus grave que la durée de cette crise parait devoir porter sur plusieurs années. La rentrée 2021 semble avoir peu de chance d’être bonne encore au niveau des embauches de débutants. Même si tout porte à penser à un retour à la « normale » à moyen termes.
La crise économique de 2008 a été marquée par une phase de diminution des embauches en premier emploi des jeunes, avec une période proche de zéro recrutement, puis une reprise très lente de la publication d’offres d’emploi et de recrutement.
La difficulté déjà vécue de ces crises pour les jeunes réside dans le fait que, pour une partie d’entre eux, la durée d’accès à un premier emploi stable dépasse une année et qu’en conséquence, ils se retrouvent en concurrence avec des jeunes, diplômés l’année suivante et « plus frais ».
L’expérience prouve que les diplômes ont une date de péremption.
Or, la crise de 2020 apparait beaucoup plus grave pour l’emploi que celle de 2008.
Pour les jeunes diplômés en 2020, il semble important de conseiller une poursuite d’études, dans la mesure du possible, et de leurs moyens.
En effet, rien n’empêche de mener de front une recherche d’emploi et de poursuivre des études, puis, si une opportunité d’emploi sérieuse se présente, de la saisir sans attendre. Reste à réaliser un choix pertinent de poursuite d’études laissant la possibilité de finaliser cette formation dans le temps.
DES ACTEURS DE LA FORMATION SUPÉRIEURE CONFIRMENT CETTE INQUIÉTUDE SUR L’ACCÈS A L’EMPLOI DES JEUNES ET PROPOSENT DES MESURES.
La CPU, la CGE, la Cdefi, Syntec Conseil, l’ANAF et la FNEGE[1] font le diagnostic suivant :
« Compte-tenu de la crise économique liée au Covid-19, une part importante des 700 000 jeunes terminant cette année leur formation initiale risque de se trouver sans emploi. La récession économique importante dans laquelle la France entre suite à la crise du Covid-19 et l’absence de visibilité sur l’avenir, même proche, se traduisent déjà par une réduction, voire un gel des embauches dans les entreprises. »
Leurs constats sont judicieux. Par exemple, les jeunes français auront des difficultés à trouver un emploi à l’étranger avec les restrictions à la délivrance de visas dans le monde entier.
Ils invitent gouvernement[2] et entreprises[3] à éviter une explosion du taux de chômage des jeunes quittant cette année leur formation initiale.
Mais ces demandes[4] même si elles aboutissaient, semblent malheureusement insuffisantes à apporter des réponses à une crise incontournable.
LES ACTEURS DE L’EMPLOI DOIVENT SE PRÉPARER A ACCOMPAGNER UNE VAGUE EXCEPTIONNELLE DE JEUNES SANS EMPLOI EN 2020 ET 2021
Pôle emploi, les Missions locales et l’Apec doivent se préparer à accueillir une vague de jeunes exceptionnelle, au-delà du simple offre en outils en ligne, même si ceux-ci existent et sont souvent bien conçus !
[1] Syntec Conseil (organisation des cabinets de recrutement), la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs, la Conférence des présidents d’université (CPU), la Conférence des grandes écoles (CGE), la Fondation Nationale pour l’Enseignement de la Gestion des Entreprises (FNEGE) et l’Association nationale des apprentis de France.
[2] Ils appellent : « le gouvernement pour qu’à la fin de l’année 2020, les entreprises françaises soient accompagnées pour être en capacité de continuer d’employer la majeure partie des jeunes arrivant sur le marché du travail, évitant ainsi une explosion du taux de chômage des jeunes quittant cette année leur formation initiale ».
[3] « Nous appelons donc les entreprises qui le peuvent, celles que la crise ne met pas trop en difficulté, à mesurer la gravité de la situation et à prendre des engagements forts pour l’embauche des jeunes. »
[4] Voici les mesures proposées : Exonération totale « de charges patronales et salariales les salaires pour l’embauche en CDI des jeunes diplômés » ; Augmentation de l’aide aux employeurs d’apprentis et la rendre éligible à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, et pour tous les niveaux de qualification (en rouvrant notamment la possibilité de l’aide unique à l’embauche pour un contrat d’apprentissage dans le supérieur) ; Doublement de la durée de l’Aide à la Recherche du Premier Emploi (ARE) pour les jeunes disposant de faibles ressources (8 mois contre 4 mois actuellement) ; demande aux banques un report général des premières mensualités de remboursement des prêts étudiants tant que les étudiants concernés n’auront pas trouvé de premier emploi…
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