LE CHÔMAGE PARTIEL NE SERA PAS ÉTERNEL !
La ministre du Travail a réaffirmé que :
« L’État ne peut pas durablement prendre en charge, payer les salaires de millions de personnes dans le secteur privé » (…) « Le système actuel ne va pas perdurer très longtemps. »
Le chiffre exact des demandes d’indemnisation (DI) de chômage partiel intervenues depuis mars et le montant du budget induit ne sont toujours pas officiellement connus.
Selon la ministre du Travail le nombre de plans sociaux en France reste encore comparable à celui de 2019, « mais il y en a beaucoup qui se préparent, c’est pour ça que nous voulons sortir ce nouveau dispositif pour le 1er juillet, pour que ce soit une alternative » pour éviter « un tsunami de licenciements ».
L’OBJECTIF CONSENSUEL EST DE TENTER D’ÉVITER AU MAXIMUM LES PLANS SOCIAUX
Mais y parvenir n’est pas si simple.
La ministre a évoqué un système d’activité partielle de longue durée (APLD)[1] pour la période qui vient :
« un dispositif spécifique d’activité partielle, mis en place par un accord collectif d’entreprise ou de branche », qui donnerait lieu à indemnisation « en contrepartie du maintien dans l’emploi ».
« Les conditions de cette activité partielle de longue durée seront définies d’ici à quinze jours », suite à des concertations avec les partenaires sociaux.
L’activité partielle de longue durée (APLD) est une alternative au chômage partiel qui a déjà été mise en œuvre. La convention d’activité partielle de longue durée est signée entre une entreprise qui doit réduire son activité et l’Etat[2]. Son but est de compenser la diminution de salaire subie par les salariés de l’entreprise et d’éviter les licenciements économiques.
Dans la période actuelle, il s’agirait de soutenir des entreprises dont les perspectives de reprise d’activité sont jugées « plus tardives », dont « le tourisme, l’aéronautique, l’automobile et, parfois, des entreprises même dans des secteurs qui vont mieux ».
Le contour des secteurs concernés ne semble pas définitivement arrêté. Chaque branche professionnelle va défendre ses intérêts en présentant ses dossiers.
Il serait envisagé de promouvoir des accords collectifs sur la réduction du temps de travail liée à la baisse d’activité[3] ; l’État viendrait alors « compenser une partie de la perte de pouvoir d’achat » des salariés en échange de contreparties négociées en termes de maintien d’emploi.
L’appréciation du niveau et de la durée de ces mesures fera sans doute débat, tout comme le contour des secteurs bénéficiaires de telles mesures.
LES ENTREPRISES DISPOSENT DE DEUX PISTES POUR SE RÉORGANISER SEULES EN ÉVITANT DES LICENCIEMENTS : LES ACCORDS DE PERFORMANCE COLLECTIVE OU DES BAISSES DE SALAIRES IMPOSÉES COMME ALTERNATIVE AUX LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES.
La première solution est la mise en œuvre des Accords de performance collective (APC)[4]. Les directions vont pouvoir demander un « effort » à leurs salariés, en s’engageant à ne pas licencier pendant un laps de temps limité à cinq ans.
Cela pourra concerner le temps de travail, les rémunérations ou l’organisation du travail, selon les termes de l’APC.
Le nombre des APC connus tournerait autour de 350 de grandes entreprises (PSA Vesoul, Generali, Schneider Electric, Bouygues Construction, etc.) à des entreprises de moins de 50 salariés. C’est un nombre assez faible mais la déclaration n’est pas obligatoire. le nombre réel n’est pas connu.
Le refus de l’application de l’accord pour un salarié constitue un motif justifiant le licenciement.
La situation de crise ne devrait pas a priori inciter à de nouveaux accords.
Ce type de procédures est aujourd’hui explicitement encouragé par le gouvernement comme étant des « alternatives au licenciements »[5].
La seconde solution pour toutes les entreprises consiste à proposer à un salarié une baisse de salaire en vue d’éviter son licenciement (dans le cas d’une procédure de licenciement économique)[6].
Pour emprunter cette voie, l’employeur doit justifier de ses difficultés économiques, en justifiant d’une baisse des commandes, de la fréquentation ou encore d’une diminution du chiffre d’affaires.
Dans le contexte de crise actuel, les justifications devraient être possible pour de nombreuses entreprises.
A titre d’exemple, certaines entreprises ont déjà entamé des procédures comme Ryanair France ou Derichebourg Aeronautics Services.
DANS DES CAS PLUS GRAVE, LE RECOURS A LA FORMATION VA S’IMPOSER.
La ministre du Travail a aussi eu l’occasion d’évoquer les autres cas :
« Pour les entreprises, dont l’activité ne repartira pas, il faudra sans doute renforcer la dimension formations et reconversion des salariés, en cas de reclassement pour aller vers d’autres secteurs qui recrutent. »
« Notre boussole est claire : la préservation de l’emploi ou la reconversion des compétences pour répondre à des offres existantes ou à venir. »
LE TROISIÈME PROJET DE BUDGET RECTIFICATIF SERA PRÉSENTÉ EN CONSEIL DES MINISTRES LA SEMAINE PROCHAINE, POUR FINANCER DES POLITIQUES SECTORIELLES.
Il devrait mobiliser 40 milliards d’euros, de plus, pour soutenir les secteurs en difficulté, comme l’automobile (8 Md€), le tourisme (18 Md€), l’aéronautique ( ?), le secteur de la technologie (1,5) ou le petit commerce.
Sont prévues à la fois des mesures budgétaires et des mesures de soutien à la trésorerie des entreprises (garanties de prêts). Le texte du projet de loi sera à examiner, puis ses textes d’application.
[1] « Pour les secteurs, comme l’automobile, qui vont rester durablement affectés par la crise mais qui disposent de perspectives à moyen ou long terme, nous travaillons en effet à la création d’un dispositif d’activité partielle de longue durée » – La ministre du Travail.
[2] Cette allocation est financée par l’État, l’entreprise et Unédic. Elle est soumise à une procédure de consultation du personnel. La convention d’activité partielle de longue durée ne peut être conclue que pour une période comprise entre 3 et 12 mois.
[3] « Si par exemple il y a 20% d’activité en moins, au lieu de licencier 20% des salariés, tout le monde reste » – La ministre du Travail.
[4] article L2254-2 du Code du travail
Issu des ordonnances de 2017. Les APC ont succédé à des dispositifs antérieurs : accords de maintien dans l’emploi (AME), accords de préservation et de développement de l’emploi (APDE) et accords de mobilité interne (AMI). Les AME, les APDE et les AMI conclus jusqu’au 23 septembre 2017 continuent d’être appliqués jusqu’à leur terme.
[5] Le 2 juin sur RTL à ce sujet, le ministre de l’Économie a estimé « qu’il y ait des accords d’entreprise de longue durée qui permettent de préserver l’emploi, en inventant des dispositifs imaginatifs, (…) ça oui, c’est même souhaitable ».
[6] Cette procédure ne fait pas appel à un délégué syndical.
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