LE PREMIER MINISTRE VIENT D’ANNONCER LE MAINTIEN DES CONDITIONS D’INDEMNISATION EXCEPTIONNELLE DU CHÔMAGE PARTIEL POUR UN MOIS DE PLUS, c’est-à-dire jusqu’au 1er novembre.
Ce report pourrait être suivi d’autres, si nécessaire, selon les propos du Premier ministre.
Ce revirement s’explique par le poids encore important de salariés concernés en particulier dans certains métiers et branches professionnelles. Et encore, les chiffres du chômage partiel, connus pour juillet, se trouvent minorés par les congés payés, comme le seront ceux du mois d’aout.
Seuls les secteurs du tourisme, de l’événementiel, de la culture et du sport devait initialement conserver le dispositif actuel jusqu’à la fin de l’année. Puis des professions impactées (commerce, traducteurs, etc.) ont été ajoutées et on débouche aujourd’hui sur une mesure générale.
Deux remarques s’imposent :
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Le cout pour l’État et l’Unédic va encore augmenter.
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Ce report ne fait que reculer les mesures de licenciements économiques pour des entreprises dont les effectifs doivent être réduits, en raison d’une diminution durable de l’activité, contrairement au chômage partiel de longue durée (APLD) qui mise sur une reprise à termes.
Il existe évidemment de nombreuses entreprises dont la situation où le doute sur la reprise persiste. Mais avec le temps, il va être nécessaire de prendre en compte la réalité ; par exemple si les commandes ont baissé de 10, 20 ou 30%…
La politique menée en manière d’emploi s’inscrit dans une stratégie politique générale d’évitement.
Elle tourne le dos à une position d’affrontement avec la réalité (cas d’entreprises condamnées débouchant sur des licenciement économiques) qui aurait évidemment un cout psychologique, matériel, moral et surtout politique, élevé.
Force est de reconnaitre que la position d’évitement adoptée (maintien d’un chômage partiel exceptionnel) devrait atteindre ses limites dans un contexte reconnu de récession en 2020.
LES RÉDUCTIONS D’EFFECTIFS RESTENT CONTENUES[1] PAR LA STRATÉGIE D’ÉVITEMENT QUI A ÉTÉ CHOISIE PAR LE GOUVERNEMENT.
49 000 salariés sont concernés par un dépôt de PSE depuis le mois de mars.
Mais sans qu’il existe une vague de licenciement économique importante, on compte néanmoins une réduction très significative des effectifs du secteur privé (plus de 600 000), au travers de :
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L’annulation, ou le report, d’embauches prévues ;
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Le recours au non-renouvellement de CDD ou des missions d’intérim ;
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Les ruptures conventionnelles, dont le nombre est en nette augmentation.
LES PERSPECTIVES DES ENTREPRISES SONT MARQUÉES PAR UNE FORTE INCERTITUDE ET UNE GRANDE HÉTÉROGÉNÉITÉ ENTRE SECTEURS.
La cinquième édition de l’enquête Acemo spéciale Covid, réalisée par la Dares[2], indique que : « les perspectives des entreprises sont marquées par une forte incertitude et une grande hétérogénéité entre secteurs ».
Dans le détail,
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43% des effectifs salariés travaillent dans des entreprises qui anticipent un retour à l’activité normale d’ici 3 mois (après 44% fin juin)[3],
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27% des effectifs salariés travaillent dans des entreprises qui ne voient pas de retour à la normale avant la fin de l’année (après 35% en juin).
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30% des salariés se trouvent dans une entreprise qui ne savent pas dater un retour à la normale. Ce dernier chiffre remonte nettement à 30% contre 21% à fin juin. Il traduit l’incertitude touchant près du tiers des effectifs salariés du privé dans les entreprises de plus de 10 salariés.
La principale cause évoquée par les entreprises conduisant à une réduction d’activité est la perte de débouchés (77%)[4].
Les fermetures administratives (12%), le manque de personnel pouvant travailler[5] (5%) ou les difficultés d’approvisionnement (6%) sont moins significatives.
Le renforcement des obligations sanitaires décidées à la fin août va venir renforcer ces difficultés.
LES ENTREPRISES QUI ENVISAGENT DES EMBAUCHES SONT PEU NOMBREUSES.
L’enquête DARES fait apparaitre, pour les entreprises dont les effectifs ont diminué, que :
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La moitié ne prévoient pas un retour au niveau antérieur, « même s’il subsiste encore beaucoup d’incertitude »,
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39% des entreprises ne se prononçant pas sur les évolutions de leurs effectifs.
Il reste une part des entreprises qui ont conservé des effectifs stables et quelques-unes qui augmentent leurs effectifs (6% en juillet, après 8% en juin et 4% en mai).
[1] Comme c’est le cas depuis le mois d’avril.
[2] « La cinquième édition de l’enquête Acemo spéciale Covid, réalisée par la Dares avec l’appui de l’Insee, a interrogé les entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole entre le 30 juillet et le 18 août 2020, sur leur situation et les conditions d’emploi de la main-d’œuvre en juillet. »
[3] « Les entreprises qui n’anticipent aucune difficulté pour la reprise de leur activité sont de plus en plus nombreuses (21% après 17% en juin, 10% en mai et 6% en avril). »
[4] « Les causes évoquées de réduction d’activité sont avant tout la perte de débouchés (77% après 64% en juin) devant les fermetures administratives (12% après 20% en juin), plutôt que le manque de personnel pouvant travailler (5% après 10% en juin) ou les difficultés d’approvisionnement (6%, comme en juin). »
[5] En juillet, 120 000 personnes étaient en activité partielle pour raison de vulnérabilité ou pour garde d’enfants.
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