Le lien entre l’insertion et l’emploi apparait plus étroit dans la phase qui a débuté avec le confinement en mars.
DEPUIS MARS 2020, LES MOTIFS DE PERTE DE RESSOURCES LIÉES AU MARCHE DU TRAVAIL SONT TRÈS VARIÉS.
On constate à la fois :
- Des fins de situations de travail pour des salariés (fin de CDD ou d’intérim, signature de ruptures transactionnelles, licenciements de salariés en CDI, etc.), des artisans et des autoentrepreneurs,
- Pour des étudiants, la perte d’emplois à temps partiel, ou de tâches ponctuelles (à apprécier entre les salariés étudiants et des étudiants travaillant moins de 8h hebdomadaire).
- Des difficultés d’accès à une premier emploi pour certains jeunes débutants, diplômés ou non, avec le non accès à l’assurance chômage pour des jeunes ayant « trop peu » travaillés,
- Des fins de périodes indemnisés pour des demandeurs d’emploi de longue durée ; des chômeurs ne trouvent pas d’opportunités d’emploi, ce qu’illustre le faible nombre de sortie de Pôle emploi, ayant, ou pas, accès aux ASS en fonction de leur situation personnelle, etc.
S’y ajoutent la perte d’une part de perte de revenus pour des salariés en chômage partiel, depuis plusieurs mois, ou des indépendants, suite à une chute significative de leurs activités.
Les annonces des associations caritatives[1] sur le nombre de personnes touchées demandent à être nuancées, car le phénomène est récent. L’estimation du basculement d’un million de Français dans la pauvreté[2] est probablement excessive[3], depuis la mi-mars à ce jour (soit 7 mois), mais pas forcément dans l’avenir.
Exemple : une bonne part des intérimaires ayant perdu leur emploi en mars, l’on retrouvé progressivement à partir de juin, d’après les chiffres de la DARES, jusqu’à la période qui s’est ouverte en octobre : couvre-feu, puis reconfinement.
Néanmoins, en prenant du recul, des indicateurs illustrent la détérioration de l’emploi, comme la montée de la pauvreté. C’est le cas de hausse de 10% des dépenses du revenu de solidarité active (RSA) depuis 2018.
Enfin, il semble judicieux de prendre en compte une sorte de frontière entre,
- D’une part, la précarité liée à une succession aléatoires de contrats courts (situation irrégulière de travail rompant avec un certain équilibre) et,
- D’autre part, la pauvreté[4], avec des ressources dépendant le plus souvent des aides sociales (sans période d’emploi).
Un public est proche de l’emploi, un autre ne l’est pas à un moment donné. La situation de chacun peut évidemment évoluer dans le temps. La réponse à cette question conditionne le rapport entre accompagnement vers l’emploi et insertion sociale. Elle est tout à fait connue de tous les professionnels qui suivent les bénéficiaires du RSA.
Près de 38% des chômeurs se trouvent sous le seuil de pauvreté. Le seuil de pauvreté s’appuie sur des statistiques sur les ressources[5]. Il ne traduit pas la diversité des situations dont : le type de logement, le territoire (urbain, rural, etc.), le contexte familial, les activités (garde de ses enfants, etc.) etc.
LE GOUVERNEMENT DONNE LA PRIORITÉ AU SOUTIEN A L’INSERTION PAR L’EMPLOI.
Diverses mesures d’aide sociale ont été prises, ou annoncées, par le gouvernement[6].
Le Premier ministre a ainsi déclaré :
« L’attention aux plus démunis et aux plus vulnérables est plus que jamais au centre des priorités de mon gouvernement. »
D’une manière plus générale, les revendications des associations portent sur une hausse des principaux minima sociaux et l’ouverture du RSA aux jeunes à partir de 18 ans. Le gouvernement a annoncé en réponse qu’il ne procèderait ni à une revalorisation des minima sociaux ni à une extension du RSA aux jeunes de 18 à 25 ans.
Le gouvernement continue à donner la priorité aux aides à l’insertion par l’emploi.
Cette priorité semble logique dans une situation marquée par une progression du nombre des emplois, comme de 2016 à 2019. Mais, dans une période destruction d’emplois et de croissance du nombre des actifs, le contexte apparait fort différent.
DES ANNONCES DÉJÀ CONNUES CONCERNANT LE SOUTIEN A L’EMPLOI ONT ÉTÉ CONFIRMÉES, RESTE A CONNAITRE LEUR APPLICATION.
- Une croissance des effectifs de jeunes de 16 à 25 ans bénéficiant de la « garantie jeunes[7]» qui passerait de 100 000 (chiffre théorique non atteint en 2020) à 150 000 en 2021.
- Des moyens seraient dédiés aux Structures d’insertion par l’activité économique (SIAE), pour augmenter le nombre de postes proposées en IAE.
- Le nombre des Parcours Emploi Compétences (PEC) seraient développés dans le secteur non marchand[8]. Au 11 octobre, 56 000 PEC avaient été signés depuis janvier 2020, contre 82 500 en 2019 sur la même période, soit -32%.
- Des aides à la mobilité seraient déployées pour favoriser l’accès à un emploi éloigné du domicile[9].
- Quant au Service public d’insertion (SPI), il devrait être expérimenté sur quelques territoires en 2021, mais pas généralisé avant 2022.
Compte tenu du recul du nombre des bénéficiaires de ces dispositifs (garantie jeunes, IAE ou PEC) sur les trois premiers trimestre 2020, le redressement semble être un premier objectif, avant de réaliser une croissance des effectifs, dans le contexte des mesures sanitaires actuelles, et leur maintien à l’horizon du 1er avril 2021.
[1] Fondation Abbé Pierre, Médecins du monde, Secours catholique, ATD Quart Monde, Emmaüs…
[2] L’Insee estimait à 9,3 millions le nombre des personnes vivant déjà au-dessous du seuil de pauvreté monétaire (1 063 euros par mois et par unité de consommation), soit 14,8% des ménages en 2018.
[3] « Ce chiffre d’un million supplémentaire de pauvres est malheureusement une estimation basse, compte tenu des 800 000 pertes d’emploi attendues fin 2020 », selon le directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS).
[4] En 2018, 37,8% des chômeurs étaient statistiquement pauvres, contre 8,4% des personnes en emploi (chiffres stables par rapport à 2017).
[5] Le seuil de pauvreté est calculé sur la base de 0,60% du niveau de vie médian de la population. Le SMIC net à temps plein est supérieur de plus de 10% au seuil de pauvreté.
[6] Le 24 octobre, le premier ministre a annoncé un plan à l’intention des plus précaires, doté de 1,8 milliard d’euros, qui s’ajoute aux mesures prises durant la crise (1,5 milliard d’euros) et à celles figurant dans le plan de relance (6 milliards d’euros) pour les années à venir.
[7] Avec un accompagnement par les Missions locales et une allocation financière de 497 euros par mois pendant un an
[8] Les emplois aidés, avaient été supprimés dès l’été 2017, après l’élection d’Emmanuel Macron.
[9] Aides à la mobilité, locations de voiture à tarif préférentiel, microcrédits pour l’achat d’un véhicule, et soutien aux plates-formes d’information et de mise en relation pour du covoiturage.
Pas de commentaire sur “Comment les destructions d’emploi en 2020 conduisent à la montée de la précarité et de la pauvreté ?”