Les résultats de la politique de prime à l’embauche, dites des « emplois francs », sont dérisoires par rapport au nombre des demandeurs d’emploi, résidant dans les quartiers de banlieue, encore reconnus comme QPV. Juste un effet d’aubaine pour quelques milliers employeurs.
UN SURSIS D’UN AN POUR LES EMPLOIS FRANCS
Le décret du 21 octobre 2020 relatif aux emplois francs[1] prolonge d’un an la mise en œuvre de ce dispositif[2] de discrimination positive, en faveur de publics résidant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) :
- Demandeurs d’emploi,
- Jeunes suivis par les missions locales ou adhérents à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP),
- Jeunes de moins de 26 ans[3].
Le décret comporte une mesure spécifique pour les jeunes de moins de 26 ans, il revalorise le montant de l’aide versée pour le recrutement en « emploi franc » sous certaines conditions.
Le gouvernement renforce très légèrement le dispositif des « emplois francs » pour le public des jeunes de moins de 26 ans résidant dans les quartiers de la politique de la ville, pour la première année d’un contrat de travail (cette mesure ne concerne pas pour lus publics plus âgés).
- Pour un recrutement en CDI à temps complet. La prime sera relevée à 7 000 euros pendant un an (au lieu de 5 000 euros), puis elle revient à 5 000 euros pour les deux années suivantes. Cette augmentation de l’aide de 167 euros par mois ne devrait pas changer grand-chose à l’embauche des jeunes.
- Pour un CDD d’au moins six mois à temps complet. Elle s’élèvera à 5 500 euros la première année pour un CDD d’au moins six mois, puis 2 500 euros l’année suivante au pro rata.
L’enveloppe budgétaire est augmentée, pour 2021, de plus de 40% sur un an, à 317 millions d’euros (au lieu de 224 millions antérieurement).
Reste à savoir si les emplois seront au rendez-vous pour consommer les crédits !
LE DISPOSITIF DES EMPLOIS FRANCS N’A PAS CONNU LE SUCCÈS.
Le dispositif initial des « emplois francs », lancé sous François Hollande, avait échoué, puis été abandonnée, avant d’être repris en 2018.
Le nombre de demandes d’aides d’« emplois francs » acceptées a été en 2018 de 3 783, puis il est passé à 15 616 en 2019[4].
Au 27 septembre 2020, le nombre restait inférieur à 13 500.
L’objectif 2020 de 40 000 « emplois francs » ne sera pas atteint.
La DARES ne précise pas la proportion du public de jeunes de moins de 26 ans parmi les « emplois francs ».
LES DISCOURS POLITIQUES NE CORRESPONDENT PAS AUX FAITS.
Les déclarations politiques de la ministre du Travail apparaissent très décalées par rapport à la modestie du dispositif des « emplois francs » et à son échec.
Elle affirme ainsi :
« Chacun doit pouvoir trouver sa place dans la République. Je ne peux pas accepter qu’un jeune ne trouve pas de travail parce qu’il n’a pas la bonne adresse ou qu’il n’a pas les bons codes. [5] »
Cette affirmation politique concerne une mesure marginale qui ne s’adresse pas spécifiquement aux jeunes et qui n’apporte pas une réelle solution. La politique de la ville a été réduite en terme territorial à 1 500 quartiers, sous le précédent quinquennat. Les mesures en faveur de l’emploi ont disparu progressivement (emplois aidés, etc.), en dehors des « emplois francs ». Le « plan Borloo » sur les banlieues de 2018 a été enterré par le président de la République.
La récente déclaration d’Emmanuel Macron[6], selon laquelle plus de 75% de propositions du rapport Borloo auraient été mises en œuvre, n’a pu que choquer les acteurs comme les élus locaux.
Cette affirmation est factuellement inexacte.
[1] Décret n° 2020-1278 du 21 octobre 2020 relatif aux emplois francs.
[2] Le dispositif des « emplois francs » est ouvert à tout employeur, situé ou non en quartier de politique de la ville (QPV), qui embauche un chômeur habitant dans ces quartiers. La nouvelle formule des « emplois francs » a été mise en place à titre expérimental en 2018, puis étendue en 2020 à l’ensemble des 1 500 quartiers prioritaires, faute de succès !
[3] « L’âge du salarié s’apprécie à la date de conclusion du contrat de travail. »
[4] Statistiques DARES – Marché du travail crise sanitaire au 13 octobre 2020. Figure 13.
[5] Déclaration de la ministre du Travail sur France 2.
[6] Discours sur « la lutte contre les séparatismes » prononcé aux Mureaux par Emmanuel Macron.
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