IL FAUT SAUVER LE SOLDAT FRANCE COMPÉTENCES.
Le Projet de loi de finances 2021[1] évoque la mise en œuvre d’une « Subvention exceptionnelle versée à France compétences », dans la cadre du Plan de relance.
Selon le texte, il s’agit de conditionner le versement d’une subvention exceptionnelle à l’atteinte de l’équilibre budgétaire par cet opérateur.
Le rapport conjoint IGAS/IGF sur les conséquences financières de la réforme de l’apprentissage et de la formation professionnelle (avril 2020), cet opérateur connaît un déficit à la fois conjoncturel et structurel, qui est lié aux règles du jeu mises en place par la loi de 2018 et ses textes d’application[2].
Le déficit conjoncturel en 2021 est accentué par les mesures prises pour faire face à la crise sanitaire qui diminue les recettes de France compétences.
Le déficit structurel est lié à une erreur (ou une faute) manifeste dans les prévisions de financement de la formation professionnelle et de l’alternance de la part dans le cadre des négociations budgétaires entre le ministère du Travail (et l’ancienne ministre) et le ministère des Comptes publics.
La formule du PLF 2021 ne reconnait pas cette erreur initiale dans l’application de la loi de 2018. Les choses ne semblent pas parties pour s’arranger.
LE SOUTIEN EXCEPTIONNEL À FRANCE COMPÉTENTE VISE LE DÉVELOPPEMENT DE L’APPRENTISSAGE.
Cette subvention exceptionnelle apparaît à la nécessité d’assurer le financement et le développement de l’alternance. Car l’apprentissage, dans le contexte actuel, est considéré comme constituant un vecteur important d’insertion professionnelle des jeunes dans l’emploi.
MAIS LE VERSEMENT DE CETTE SUBVENTION EST LIÉ À DES CONDITIONS PORTANT SUR LE BUDGET 2022 TROP DIFFICILE À ATTEINDRE.
L’opérateur est appelé à revoir les niveaux de prise en charge de l’alternance en 2021, « en visant une baisse annuelle des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage[3] ».
Cette exigence questionne sur l’évolution de la politique publique de soutien à l’apprentissage : viser une baisse annuelle des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage laisse rêveur par rapport aux annonces politiques qui ont été faites.
L’objectif annoncé est une baisse des dépenses (mesures de régulation financières) dès 2022. Il est exposé de manière explicite :
« Le versement exceptionnel de l’État à France compétences se justifie donc, mais nécessite en parallèle que soient mises en œuvre des mesures de régulation financière permettant d’assurer l’équilibre financier global de l’opérateur à partir de 2022. »
Au plus tard le 30 novembre 2021, « date règlementairement fixée »[4], France compétences doit présenter d’un budget 2022 à l’équilibre[5].
C’est la condition qui est posée, dans le PLF2021, pour que l’établissement public bénéficie de cette dotation exceptionnelle de l’État en 2021 !
MISSION IMPOSSIBLE À L’HORIZON !
Il est précisé dans le PLF 2021 que France Compétences devrait « concourir à l’objectif d’équilibre financier du système de la formation professionnelle continue et de l’apprentissage » et viser « la soutenabilité du système de la formation professionnelle continue et de l’apprentissage ».
Pour un observateur innocent, le jeu budgétaire entre les ministères et un établissement public, France Compétences, dont la gouvernance est assurée en fait par l’État apparait surréaliste.
Mais, surtout, il apparait dangereux pour la politique de formation et d’alternance qui fait aujourd’hui l’objet d’un suivi de la part des partenaires sociaux associés à l’État.
Les problèmes budgétaires de France Compétences doivent être résolus par le gouvernement dans le cadre d’une remise en cause générale et profonde de la loi de 2018. Ils ne peuvent être renvoyés à l’établissement comme le prétend l’exposé des motifs du PLF 2021.
[1] Article 56 du Projet de loi de finances 2021
[2] « France compétences, opérateur créé au 1er janvier 2019 par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, est chargé d’assurer le financement, la régulation et l’amélioration du système de la formation professionnelle et de l’apprentissage, pour un montant annuel de 10 Md€. » – Exposé des motifs figurant dans le PLF 2021.
[3] « En s’appuyant notamment sur les recommandations du rapport IGF/IGAS ».
[4] Article 56 – I.A
[5] « L’équilibre du budget est réputé atteint lorsque les dépenses totales n’excèdent pas les recettes existantes, y compris reports à nouveau et hors emprunt bancaire. »
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