Les protestations contre les annonces de la ministre du Travail à propos du projet de décret d’application concernant la réforme de l’assurance chômage se multiplient (partis politiques, ensemble des organisations syndicales et des associations de chômeurs, etc.).
Même le concepteur de cette réforme[1] émet de sérieux doutes sur l’opportunité de son application dans le contexte actuel, car dit-il fort justement : « la situation a radicalement changé »[2].
LES MESURES PRISES VONT TOUCHER UNE LARGE PART DES CHÔMEURS INDEMNISES
Le nouveau mode de calcul de l’indemnisation des demandeurs d’emploi qui devrait être appliqué au 1er juillet, et touchera les permittents (alternant contrats courts et période de chômage), vient en tête des mesures contestées.
L’étude d’impact de l’Unédic de novembre 2020, est largement citée plus de 830 000 personnes (38% des allocataires) connaîtront une baisse d’indemnisation de 20% en moyenne par rapport aux allocations touchées avec les règles actuelles, même si elles auront des droits plus longs.
Le décret devrait introduire un niveau plancher qui limitera la baisse maximale et reste à connaitre précisément.
Les autres mesures auront un effet un peu décalé, mais :
-
L’allongement à 6 mois de la durée de travail, ouvrant l’accès à l’assurance-chômage, conduira à un non accès aux droits, en particulier pour des jeunes entrants sur le marché du travail,
-
La dégressivité de l’indemnisation frappera des cadres dans une période où la chute des embauches va perdurer au moins en 2021.
Applicable en septembre 2022, il est difficile si l’instauration d’un bonus-malus sur les cotisations chômage des entreprises employant des contrats courts (dans sept secteurs) limitera les embauches ou modifiera les pratiques.
« LE GOUVERNEMENT PRÉPARE UNE BOMBE A RETARDEMENT ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET POLITIQUE POUR LES PROCHAINS MOIS. »
Le constat de Solidarités nouvelles face au chômage (SNC) apparait judicieux :
« Le gouvernement prépare une bombe à retardement économique, sociale et politique pour les prochains mois. Il n’y pas d’équité dans cette réforme. La première chose que les personnes que nous accompagnons nous disent, c’est qu’elles veulent travailler. Arrêtons de stigmatiser les chercheurs d’emploi. Nous devrions leur tendre la main. Cette politique va avoir des conséquences très néfastes sur notre société. » – Gilles de Labarre, président de SNC
***
L’acharnement à appliquer cette réforme de l’assurance-chômage est un choix politique peu compréhensible dans les circonstances présentes. Il pèsera très négativement sur le bilan du quinquennat. Ce sujet sera traité dans les programmes des élections nationales de 2022 !
[1] Le Directeur du cabinet de Muriel Pénicaud (mai 2017-juillet 2020), Antoine Foucher a participé à la version initiale de la réforme de l’assurance-chômage en juillet 2019.
[2] « Tout le monde sent bien que nous sommes en train de changer de monde et que nous entrons dans une nouvelle époque. Ce dont le pays a besoin, c’est d’un diagnostic clair sur ce changement, et d’un nouveau projet qui nous explique quelle France nous pouvons et voulons être dans cette nouvelle période historique. Tant que ce travail politique de diagnostic et de proposition n’est pas fait, les réformes sont difficilement compréhensibles. » – Antoine Foucher.
Pas de commentaire sur “Comment s’annonce la baisse de l’indemnisation d’une part des demandeurs d’emploi ?”