UN PROJET DE DROIT INDIVIDUEL A LA FORMATION DES EUROPEENS EST EN GESTATION
Durant le semestre de la présidence française de l’Union européenne, le gouvernement a annoncé sa volonté d’avancer sur les sujets sociaux, dont la formation fait partie[1].
Une recommandation pour reconnaître un droit individuel à la formation des européens est annoncée, d’ici le mois de juin, par Centre Inffo.
L’idée d’un CPF européen est donc évoquée.
En 2017 sous la présidence de Jean-Claude Juncker à la Commission européenne, le « Socle européen des droits sociaux », proclamait le droit « [pour toute personne à] une éducation, une formation et un apprentissage tout au long de la vie inclusifs et de qualité ».
Fin 2020, l’Institut Jacques Delors (Paris) a publié un rapport en ce sens[2].
« Ce rapport dresse un état des lieux de la formation des adultes dans l’UE et appelle à une initiative européenne pour favoriser la création d’un droit individuel à la formation des adultes dans chaque État membre, en établissant des comptes de formation individuels conformément à des lignes directrices européennes. »
En mai 2021, la Commission européenne a donc envisagé une proposition de recommandation du Conseil relative aux comptes individuels de formation[3].
Elle a lancé une consultation publique sur les comptes individuels d’apprentissage qui s’est achevé à la mi-juillet 2021[4].
En décembre 2021, le résultat de cette consultation a été rendu publique[5].
APRÈS L’ADOPTION DE CES DISPOSITIONS PAR LE CONSEIL EUROPÉEN, LES RECOMMANDATIONS DEVRAIENT ÊTRE APPLIQUÉES DANS LES PAYS MEMBRES,
« Il appartiendra aux États membres de décider des caractéristiques des comptes de formation individuels, par exemple le montant des droits, leur financement et le mode de fonctionnement du cadre facilitateur. »
Cette formule signifie qu’en France, notre CPF ne devrait pas être trop impacté par le texte.
LA REDÉFINITION DE NOTRE CPF RESTE EN ATTENTE DANS L’IMMÉDIAT.
L’évolution du Compte Personnel de Formation (CPF) français resterait bien ouverte à la réforme attendue concernant :
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De nouveaux modes d’accès (dont l’interdiction du démarchage téléphonique, la prescription, etc.),
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Des contenus de formation privilégiés sur des priorités professionnelles et
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Des coûts s’inscrivant dans le budget dédié à ces actions, avec une éventuelle contribution de l’UE[6].
Mais cette redéfinition du CPF reste en attente dans l’immédiat.
Des négociations s’engagent qui pourraient aboutir sur des accords nationaux interprofessionnels (ANI) en juin 2022, c’est-à-dire après les périodes électorales du premier semestre !
Un récent article d’un quotidien national intitulé : « le CPF, terrain de chasse des escrocs[7] » illustre bien l’une des urgences d’une telle réforme…
LES DISPOSITIONS EUROPÉENNES CONCERNANT L’EMPLOI ET LA FORMATION RENCONTRENT DES LIMITES
Les dispositions européennes concernant l’emploi et la formation apparaissent comme des paris douteux, compte tenu de la diversité des règlementations nationales dans les 27 pays membres.
Si une réflexion générale nourrie des expériences de chaque pays peut s’avérer bénéfique, la perspective de règles communes précise applicable à tous les pays n’apparait pas comme un objectif sérieux.
Les sujets comme un « salaire minimum européen » apparait illusoire dans la mesure où il ne peut prendre en compte la diversité des situations et les écarts entre celles-ci.
Le dossier du régime « travailleurs détachés » illustre le défaut d’un système global, où les efforts pour corriger les problèmes constatés n’ont pu aller assez loin pour les résoudre (selon la ministre du Travail elle-même).
Le projet de Directive européenne concernant le statut des travailleurs des plateformes reste toujours en suspens…
Entre le rêve d’un système partagé et la diversité des réalités nationales, le second aspect s’impose.
[1] « La formation est une question fondamentale dans un contexte de transitions climatique et numérique, de nouvelles formes de travail, et d’enjeux de souveraineté industrielle. Comment on outille les salariés européens face à ces changements ? C’est une réflexion à avoir » – La directrice de cabinet du secrétaire d’État chargé des Affaires européennes,
[2] « Vers un droit individuel à la formation des adultes pour tous les européens » – Institut Jacques Delors (Paris) – 18/12/2020 – https://institutdelors.eu/wp-content/uploads/2021/02/Lifelong-Learning_FR_PP-WEB.pdf
[3] « L’objectif est que tout un chacun ait la possibilité de continuer à développer les compétences dont il a besoin pour conserver ou s’assurer un emploi durable sur le marché du travail en mutation de l’Union européenne, et ce tout au long de sa vie professionnelle. »
[4] Période de consultation : du 23 avril 2021 au 16 juillet 2021.
[5] Factual Summary report on the public consultation on the initiative on individual learning accounts (ILAs) Directorate-General Employment, Social Affairs and Inclusion 2021 – Ref. Ares(2021)7601891 – 09/12/2021 – https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/qanda_21_6477 – https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:52021DC0773
[6] « Les États membres peuvent aussi bénéficier d’un soutien de l’UE, notamment du Fonds social européen plus, du fonds européen de développement régional, du Fonds pour une transition juste, tout comme de la facilité pour la reprise et la résilience. »
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