La responsabilité de la persistance du travail au noir est partagée entre les employeurs et les travailleurs, avec un croisement variable des motivations, selon les cas.
Les dispositions fiscales peuvent également venir s’ajouter au tableau, selon leur évolution annuelle.
Ce facteur fiscal concerne directement le recours aux emplois à domicile.
Le phénomène du travail au noir a des conséquences à deux niveaux :
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Les chiffres de l’emploi : en nombre d’actifs en emploi et en nombre d’heures réellement travaillées et
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Les recettes fiscales perçues qui pèsent la politique sociale dans son ensemble.
L’important serait de connaitre plus précisément le poids réel du travail au noir dans le marché de l’emploi.
NOMBRE DE TRAVAILLEURS AU NOIR[1].
On estime que 2,5 millions de personnes pratiqueraient, pour tout ou partie, un travail non déclaré.
Ce nombre, qui traduit un travail clandestin, reste par nature évidemment incertain.
Un rapport du Conseil d’orientation pour l’emploi (COE)[2] estimait ainsi que le travail non déclaré concernerait autour de 5% des personnes de plus de 18 ans et représenterait entre 2 et 3% de la masse salariale versée par les entreprises.
Le rapport décrit la variété des infractions.
D’une part, des fraudes « classiques », avec non déclaration d’activité (ou d’emploi salarié)[3], sont les plus fréquentes.
Le travail dissimulé peut être total ou partiel. Il se présente sous deux formes : la dissimulation d’activité (pas d’immatriculation, ni de déclaration) et la dissimulation d’emploi salarié (pas de déclaration préalable à l’embauche, pas de bulletin de paie, nombre d’heures déclarées inférieur au nombre d’heures effectuées).
D’autre part, des fraudes sont également permises par la forme particulière du travail, de la part :
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De micro-entrepreneurs, qui ont peu d’obligations déclaratives et interviennent ponctuellement,
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De travailleurs plateformes mettant en rapport avec des particuliers (livraisons, transports…),
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De travailleurs détachés, travaillant pour des entreprises basées à l’étranger.
Coté travailleurs la pratique porté pour l’essentiel un travail non déclaré en complément d’un statut principal.
En particulier, c’est le cas de retraités et des jeunes (lycéens, étudiant, demandeurs d’emploi, etc.) ayant des revenus et aides sociales.
C’est aussi le cas de salariés qui « complètent » leurs revenus par un travail au noir ponctuel ou régulier.
Côté employeurs, les secteurs les plus concernés sont l’hôtellerie-restauration, le commerce de détail alimentaire, la construction, le gardiennage l’agriculture et les services à la personne.
LE TRAVAIL AU NOIR
Le travail au noir désigne l’exercice d’une activité professionnelle rémunérée qui échappe à toute déclaration légale, vis-à-vis des autorités fiscales et sociales[4].
C’est-à-dire qu’il se caractérise par le non-paiement des impôts, des cotisations sociales et par l’absence de déclaration d’activité, plaçant ainsi le travailleur et l’employeur en marge des obligations légales et fiscales.
LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR
En 2023, le réseau des Urssaf aurait amélioré du ciblage de ses contrôles contre la fraude à la Sécurité sociale [5].
En 2023, l’Urssaf a continué de déployer le plan d’action relatif à la lutte contre la fraude à la Sécurité sociale, sous l’égide du ministère des Comptes publics.
Sa stratégie s’appuie sur plusieurs actions : renforcer l’évaluation de la fraude, développer de nouvelles méthodes de ciblage (datamining), accentuer la lutte contre la fraude dans le cadre de la mobilité internationale (détachement/pluri activité), renforcer le contrôle des travailleurs indépendants et de l’économie numérique, optimiser le recouvrement des créances issues de la lutte contre le travail dissimulé.
Il existe différentes actions de contrôles : des contrôles ciblés fondés sur la sélection d’entreprises présentant un risque d’erreur, de présomption de fraude ou un profil de risque élevé de dissimulation d’activité/déclaration d’emploi salarié ; des contrôles aléatoires pouvant viser tout type d’entreprise sur l’ensemble du territoire ; Mais aussi les actions de prévention destinées à sensibiliser le plus grand nombre[6].
Le montant de ses redressements opérés au titre de la lutte contre le travail dissimulé[7] a atteint près de 1,177 milliard d’euros, soit +49%, par rapport aux 788 millions identifiés en 2022[8].
En 10 ans, le réseau des Urssaf a quadruplé le montant annuel des redressements réalisés[9].
Ces redressements concernent les employeurs (91%) et les travailleurs indépendants (9%).
ACTION CIBLÉE SUR LES EMPLOYEURS
Les redressements opérés à l’issue d’une action ciblée sur les employeurs s’élèvent à 1 milliard d’euros, en progression de 54% sur un an, et représentent 91% des résultats financiers globaux.
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Sur les seules actions ciblées à l’égard des employeurs, le redressement moyen s’élève à 344 360 euros.
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Les actions ciblées à l’égard de travailleurs indépendants ont généré des montants de redressement de 90,5 millions d’euros, en progression de 18,8 % sur un an. Elles concentrent ainsi 9 % des redressements totaux.
Les 100 plus importants redressements liés à la lutte contre le travail dissimulé représentent 2,6% des actions ciblées à l’égard des employeurs, mais totalisent 45% des redressements globaux.
Les secteurs majoritairement redressés son le BTP (61%), les services aux entreprises (23%) et le commerce (4,2%)[10].
[1] Selon un rapport du Conseil d’orientation pour l’emploi de 2019.
[2] Ces chiffres sont issus du croisement de différentes bases : statistiques nationales, données fiscales, contrôles de la Direction générale du travail…
[3] Les personnes interrogées « pratiquent pour l’essentiel un travail non déclaré en complément d’un statut principal (salarié, retraité, étudiant, etc.). Il est souvent appréhendé comme une réaction naturelle face à des conditions de vie jugées précaires et semble ancré dans les habitudes individuelles et collectives ».
[4] Le travail non déclaré revêt différentes formes de pratiques clandestines telles que le travail dissimulé, où l’employeur ne déclare pas le salarié aux organismes sociaux, la non-déclaration d’activité, quand un individu exerce une activité lucrative sans s’inscrire officiellement en tant qu’entreprise ou l’emploi au noir, où des transactions financières ne sont pas déclarées aux autorités fiscales.
[5] En 2023, l’Urssaf a continué de déployer le plan d’action relatif à la lutte contre la fraude à la Sécurité sociale, sous l’égide du ministère des Comptes publics.
[6] Diverses initiatives de communication ont été prises, par le ministère du Travail, pour détourner employeurs et travailleurs d’un recours au travail au noir.
[7] Cotisations et contributions sociales en 2023.
[8] Des redressements fiscaux auraient été déclenché à hauteur de 3,5 milliards d’euros entre 2018 et 2022. L’objectif a été fixé depuis à 5 milliards. Mais ces mesures, vis-à-vis des employeurs, s’avèrent peu efficaces. « Le taux de recouvrement des redressements notifiés est encore bien trop faible (10 à 15%) pour être dissuasif et le nombre de sanctions pénales diminue d’année en année ».
[9] « Les effectifs mobilisés augmentent de manière inédite. 7,4 % de temps supplémentaires ont été dédiés aux contrôles de lutte contre le travail dissimulé en 2023 grâce à des redéploiement internes. En 2023, l’Urssaf a recruté 64 nouveaux inspecteurs et contrôleurs spécialisés dans la lutte contre la fraude, qui viendront renforcer les équipes à l’issue de leur formation. »
[10] Redressement 2023 par secteurs
Secteurs | Montant en millions d’euros | En % |
BTP | 716 | 61% |
Services aux entreprises | 270 | 23% |
Commerce | 49,4 | 4,2% |
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