Un redressement des comptes lies à une dynamique de croissance semble écarté. La diminution du déficit annuel de 4 milliards d’euros va reposer sur une diminution des prestations chômage sans effet sur l’emploi.
UNE RENÉGOCIATION DE LA CONVENTION ASSURANCE CHOMAGE DÉBUTE.
Une renégociation entre les syndicats et les organisations patronales de la convention précisant les règles de l’assurance-chômage s’engage. La convention Unédic a été signée en 2014[1] par la CGPME, le MEDEF et l’Union Patronale Artisanale (UPA), et trois centrales syndicales : la CFDT, Force ouvrière et la CFTC, elle devra être renouvelé avant la fin juin 2016.
Le régime d’assurance chômage a une dette d’environ 26 milliards d’euros. Son déficit annuel atteint les 4 milliards d’euros. Il vient augmenter progressivement la dette de l’Unédic.
Deux rapports récents, de la Cour des Comptes et du gouvernement, appellent à un retour à l’équilibre des comptes et au remboursement de la dette[2]. La ministre a déclaré que « toutes les pistes doivent être étudiées » : de la dégressivité des allocations chômage à une baisse de leur montant et/ou de leur durée d’allocation.
- On assiste à un concours de propositions de diminution des allocations chômages avec des propositions très variées prenant en compte la durée minimale de cotisation, l’âge des demandeurs d’emploi ou le montant de leur salaire. Les régimes spéciaux sont une fois de plus l’objet de critiques basées sur le déséquilibre existant entre le montant des allocations et celui des cotisations en regard.
- Plusieurs pistes d’augmentation des recettes de l’assurance chômage sont aussi évoquées au travers de l’augmentation des taux de cotisation (peu probable en période de baisse des cotisations) ou la participation des employeurs et personnels de la fonction publique à l’effort de solidarité. Elles sont évoquées pour le principe mais sans chance d’aboutir.
Les salariés cadres, intermédiaires et supérieurs, pourraient bien être les victimes expiatoires de ces mesures de diminution des allocations. Ce mouvement engagé en 2014 a déjà conduit la CFE-CGC à ne pas ratifier la convention. Il vise une catégorie qui ne réagira pas sur le plan social. L’importance du montant des cotisations des cadres ne semble pas devoir protéger leurs droits à une indemnisation proportionnelle.
UN REDRESSEMENT DES COMPTES LIES À UNE DYNAMIQUE DE CROISSANCE EST ÉCARTÉ.
La stagnation du nombre de cotisants et l’augmentation du nombre de personnes indemnisées imposent une réduction des allocations pour se rapprocher de l’équilibre budgétaire. Le gouvernement semble reconnaitre que l’équilibre des comptes et le remboursement de la dette de l’Unédic ne viendront ni de la création d’emploi ni d’une diminution significative du nombre des allocataires[3].
L’intervention du gouvernement sur les choix à faire, en amont des négociations entre partenaires sociaux sur l’assurance chômage, semble supposer que l’État réfléchit, dès à présent, à des mesures de restrictions de l’indemnisation tenant compte de la probabilité d’un échec des négociations du premier semestre 2016. L’État est caution de la dette de l’Unédic, et subit la pression de la Commission européenne sur ce sujet, dans la mesure où ce déficit est une composante du déficit de la France.
Les allocations chômage seront revues à partir du mois de juillet 2016, à court ou moyen terme, mais sans modification réelle du système actuel. Une réforme de fond est très improbable, seules des « réparations d’entretien » interviendront. Il semble exclu qu’une économie de 4 milliards soit réalisée via une redéfinition structurelle de l’assurance chômage.
L’impact de la baisse des prestations chômage sur l’augmentation du recours aux diverses aides de solidarité ne semble pas vraiment prise en compte car les deux sujets ne dépendant pas des mêmes décideurs !
LES QUESTIONS DE L’ASSURANCE CHÔMAGE ET L’EMPLOI DIFFÉRENT.
L’équilibre de l’assurance chômage dépend évidemment du nombre d’emplois salariés dans le secteur privé, c’est-à-dire du nombre de cotisants et du montant de leurs cotisations.
Il dépend aussi d’autres facteurs. Par exemple, la réforme des retraites a imposé la prise en charge des 60/62 ans, et a conduit un sérieux transfert de charge du régime des retraites vers celui de l’assurance chômage, sans que personne ne prenne en compte cet impact[4]. Le financement forfaitaire de Pôle Emploi par l’Unédic est également significatif, etc.
Inversement, l’emploi ne dépend pas du régime de l’assurance chômage. Il dépend avant tout de l’activité, de la demande intérieure, des exportations, etc., il dépend de la création de nouveaux emplois.
C’est pourquoi les propos récurrents tenus par certains responsables politiques à l’encontre des demandeurs d’emploi sont parfois malheureux : ces déclarations laissent supposer que les chômeurs seraient des personnes qui ne veulent pas travailler. Il suffit de comparer le nombre des offres d’emploi au nombre de chômeurs pour constater que c’est inexact.
Il existe certes des cas de renoncement et de dépression de demandeurs d’emploi, des lenteurs dans les démarches, des abus dans le refus d’opportunité d’emploi, voire dans quelques cas de véritables fraudes aux allocations (reposant sur la production de faux papiers), qui doivent être traités par des réponses adaptées. Mais ces mesures nécessaires ne suffiront pas à apporter une réponse au chômage de masse. Ces déclarations mettent en cause des personnes qui ont perdu leur emploi et n’en trouvent pas, dans un contexte de stagnation économique et de croissance de la population active.
Le problème vient bien de l’absence d’emplois, pas des chômeurs.
La solution réside dans une relance économique permettant la création de millions d’emplois en France.
[1] L’arrêté du 25 juin 2014 a agréé cette Convention.
[2] La Cour des comptes a remis en janvier 2016 à l’Unédic, précise qu’« il n’est pas possible d’attendre de la seule reprise de la croissance la résorption de la dette de l’Unédic » et qu’il faut, d’une manière ou d’une autre, réduire les allocations. Un rapport du gouvernement a été transmis fin janvier 2016 à l’Assemblée nationale. Ce texte évoque des pistes comme la réduction la durée maximale d’indemnisation, le passage à un ratio de 0,9 jour indemnisé pour un jour cotisé ou l’abaissement du plancher d’indemnisation.
[3] Le gouvernement tient ainsi explicitement compte du faible taux de croissance en 2015 (+1,1%) et des perspectives économiques incertaines pour 2016 en ce début d’année.
[4] Une augmentation de l’âge légal de la retraite à 63 ou 65 ans augmenterait le déficit de l’assurance chômage de manière automatique d’autant plus que le taux de salariés dans ces tranches d’âge diminue. Cet impact devrait entrer dans les calculs si une vision globale des problèmes voyait le jour…
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