Le CPF fait actuellement débat.
Un intéressant article vient d’être publié à ce sujet par Paul Santelmann, consultant/expert en ingénierie des compétences, il s’intitule : « Compte personnel de formation : une illustration de l’impasse de l’accès personnalisé ».
En voici des extraits, l’article reste à lire dans son intégralité : https://bit.ly/2YLhSqY [1].
Le diagnostic sur le CPF est précis :
« Suite à quelques tâtonnements (DIF puis CPF en heures de formation), la loi de 2018 a instauré un nouveau compte personnel de formation (CPF) organisé autour de la monétisation et de l’accès direct à un site rassemblant des dizaines de milliers d’offres de formation « sur étagère ».
« Selon la DARES, en 2020, 984 000 formations ont été suivies dans le cadre du compte personnel de formation (CPF), contre 517 000 en 2019. Le passage au « parcours achat direct » (PAD), qui facilite l’accès à l’offre de formation, est particulièrement favorable aux femmes, aux moins de 30 ans et aux plus de 60 ans, aux demandeurs d’emploi et aux salariés non cadres. Mais l’utilisation du CPF par 2,8% de la population active permet-elle une telle exaltation institutionnelle ?
Outre le fait que l’on n’évalue pas un système de formation par le nombre d’entrées mais par ses effets concrets pour les utilisateurs, il paraît nécessaire d’identifier à quel type de formations ce dispositif permet d’accéder au regard du monumental catalogue (« Mon Compte Formation ») proposé par la Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire de ce qu’il faut bien appeler une usine à gaz.
Il ne s’agit pas ici de nier l’intérêt de telle ou telle formation mais d’évaluer l’efficacité sociale et économique d’un dispositif financé par les fonds publics et qui s’ajoute à plus d’une vingtaine de dispositifs et de programmes différents échappant à toute cohérence. » – Paul Santelmann
La nature des entrées en formations, donnée par la Caisse des dépôts, vient alimenter des critiques.
En 2020, parmi les entrées en formation CPF[2], sont arrivées en tête, au-dessus de 5% du total de 984 000 entrées en CPF :
- Le permis de conduire de catégorie B, pour 13%, soit 126 000,
- Les actions de formation dispensées aux créateurs/repreneurs d’entreprise, pour 8%, soit 75 000,
- Des formations informatiques (TOSA, PCIE), pour 7%, soit 63 000,
- Les tests de langue (TOEIC, BULATS), pour 7%, soit 62 000,
- Le Certificat d’aptitude à la conduite de chariots élévateurs et transpalettes (Caces), pour 6%, soit 59 500,
- Le bilan de compétences pour 5%, soit 50 000.
La Caisse des dépôts regroupe l’objet de l’ensemble des entrées en CPF de la sorte
. 30% pour le transport, la manutention et le magasinage,
. 19% pour le développement des capacités d’orientation, d’insertion et de réinsertion,
. 18% pour les langues,
. 7% pour l’informatique,
. 5% pour la sécurité.
L’issue des formations par rapport aux certifications n’est pas précisée.
La durée des formations s’est réduite de manière brutale :
« Le nouveau CPF a-t-il bénéficié d’une dynamique nouvelle ? (…) Cet affichage qui peut laisser croire à un relatif succès du dispositif doit être évalué au regard des contenus et des durées de formation. Or selon l’étude de la DARES, la durée moyenne des formations CPF de 2016 à 2020 est passée de 296 à 67 heures et la moitié des formations réalisées en 2020 a duré moins de 20 heures (contre 94 heures en 2016). Sans faire de la durée de la formation un critère absolu d’efficacité sociale, économique ou pédagogique, il est clair que les formations concernées ne modifient pas le niveau de compétences de la population active et qu’elles ne justifient pas la « cathédrale » organisationnelle mise en place. » – Paul Santelmann.
Le coût des formations du CPF a également diminué.
« Selon la Caisse des dépôts, « 1 million de formations ont été suivies depuis le lancement de l’application, pour 1 milliard d’euros dépensés ». Ainsi, le coût moyen d’une formation est de 1 000 euros, ce qui est ridiculement bas pour toute formation visant une qualification utile à l’économie et à l’évolution professionnelle des moins qualifiés. Pour résumer, le CPF est constitué de formations de 67 heures en moyenne pour 1 000 euros, soit l’heure de formation à 15 €. » – Paul Santelmann.
La conclusion de cet article de Paul Santelmann me semble poser de bonnes questions.
« En tout état de cause, si le CPF permet aux chômeurs d’accéder à des formations avec un abondement budgétaire des pouvoirs publics, il ne semble pas être un dispositif ambitieux de montée en compétences des moins qualifiés. Il illustre surtout une perte de sens de ce qu’est la formation professionnelle et la marginalisation des partenaires sociaux dans le portage de la formation continue, réduit à un marché consumériste, sur fonds publics et dont les objectifs sont pour le moins filandreux… »
[1] Compte personnel de formation : une illustration de l’impasse de l’accès personnalisé – https://bit.ly/2YLhSqY
[2] Le bilan 2020 du Compte personnel de formation (CPF) – Inffo Formation n°1000 – 15 au 31 décembre 2020, par Centre Inffo – Le 08 février 2021.
Pas de commentaire sur “Les critiques à l’encontre du Compte personnel de formation (CPF) se multiplient.”