LA MISE EN PLACE DE PLANS DE RUPTURE CONVENTIONNELLE COLLECTIVE DÉMARRE
Sans débattre ici du bien-fondé de la mise en place du dispositif de « rupture conventionnelle collective (RCC) »[1], il apparait que celui-ci devrait produire une accélération des allègements d’effectifs dans nombre d’entreprises.
Le nombre de plans acceptés devrait probablement connaitre une pointe au second semestre 2018, le temps que les procédures se mettent en œuvre dans les entreprises.
Plusieurs grandes entreprises ont déjà annoncé leur intention d’avoir recours à des ruptures conventionnelles collectives pour réduire leurs effectifs sans passer par un PSE. La recherche de productivité et de baisse de la masse salariale tout comme la volonté de rajeunissement du personnel touche des entreprises en très bonne santé.
Par exemple, le groupe automobile PSA (Peugeot, Citroën, DS) annonce déjà pour 2018 dans son « Dispositif d’Adéquation des Emplois et des Compétences (DAEC) » 2018 : 2 000 suppressions de postes comprenant : 1 300 ruptures conventionnelles collectives et 900 dispenses d’activité pour des seniors[2]. Les ruptures conventionnelles concerneraient les métiers de structure : communication, ressources humaines, direction financière, etc. et non la production.
Autre exemple, la direction de la chaîne de prêt-à-porter féminin, Pimkie, a voulu supprimer, dans le cadre d’un plan de rupture conventionnelle collective, plus de 10% de ses effectifs (208 postes sur un effectif total de 1 900 salariés en France) en évoquant ses difficultés économiques. Elle a été bloquée par un refus des organisations syndicales
LE CUMUL DES PLANS DE RUPTURE CONVENTIONNELLE COLLECTIVE AURA SANS DOUTE UN EFFET SIGNIFICATIF SUR LE NOMBRE DES CHÔMEURS
Le cumul de ces mesures, entreprise par entreprise, va sans doute produire des effets significatifs à terme, qui restent difficiles à prévoir ou à chiffrer, comme :
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une augmentation du nombre des demandeurs d’emploi indemnisés et
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une baisse du nombre de créations nettes d’emplois.
Le recours de l’employeur à un plan de rupture conventionnelle collective de préférence à un plan social aura des conséquences sur le statut demandeurs d’emploi par rapport au chômage.
Ces demandeurs d’emploi seront en catégorie A (immédiatement disponibles et tenus à la recherche d’emploi) et non dans une catégorie de non tenus à la recherche d’un emploi) pendant un an.
Ils seront indemnisés. Mais ils ne bénéficieront ni d’un « Contrat de sécurisation professionnelle » issu du plan social, qui permet un suivi plus intensif des et assure, ni d’une indemnité plus importante que celle de base.
L’APPRÉCIATION DE L’IMPACT DES PLANS DE RCC DEMANDERA QUELQUES ANNÉES
La volonté, d’une part, et la capacité, d’autre part, de blocage par des syndicats, disposant d’une majorité des voix aux élections des représentants du personnel, sont difficiles à évaluer par avance. La réussite d’un plan de RCC va différer en fonction de l’équilibre syndical de chaque entreprise, mais aussi, et surtout :
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de la taille des entreprises,
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de leur situation économique (RCC en substitution à un probable plan social ou optimisation),
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du contexte territorial (zone rurale, ville moyenne ou périphérie de métropole),
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de l’âge moyen des salariés (forte proportion de seniors),
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des secteurs porteurs d’emploi, ou non, pour la reconversion,
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etc.
Le caractère volontaire des départs apparait évidemment, a priori, moins traumatisant pour les salariés qu’un plan social avec un licenciement économique, dans la pratique chaque cas sera différent. On ne peut exclure que des pressions sur les salariés puissent s’exercer en interne à une entreprise …
Le contrôle des services du Travail (s’il est encouragé par une injonction de l’État) et les contentieux individuels à venir témoigneront de la réalité des ruptures conventionnelles collectives (RCC) selon les cas.
[1] Le plan de rupture conventionnelle collective diffère du transactionnel individuel, dans la mesure où il provient d’une initiative unilatérale de l’entreprise qui élabore le plan qu’elle propose aux représentants du personnel avec une argumentation souple, sans avoir à fournir un motif. Néanmoins les motivations du recours à un tel plan devront obligatoirement être formulées, d’une manière ou d’une autre, lors de la présentation du plan RCC aux syndicats. Ils influeront sans doute sur sa réussite.
[2] PSA aurait déjà supprimé près de 25 000 postes en quatre ans, selon la CGT, et comptait 62 000 salariés à la fin 2016. L’entreprise envisagerait de recruter 1 300 CDI en 2018 dans sa division automobile et 2.000 jeunes en alternance. Mais ces chiffres peuvent difficilement venir en balance avec ceux du plan de rupture conventionnelle collective dans la mesure ou d’autres mouvements de personnel interviennent parallèlement : mutations internes ou externes, départs en retraite, recours à l’intérim, etc.
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