Les cadres apparaissent comme des perdants de la réforme du Compte personnel de formation (CPF).
La principale raison est que la formation des cadres correspond à un cout plus élevé, entre 500 et 1 000 euros par jour de formation, compte tenu de la nature des contenus enseignés, que celui des formations destinés à des salariés peu qualifiés.
Le grave défaut de la monétisation du CPF consiste en la pratique d’un tarif unique, fixé à 500 € par an pendant 10 ans, pour totaliser 5 000 €[1].
Il ne conduit pas au même potentiel de formation pour tous les salariés.
AVEC LA DISPARITION DU COMPTAGE EN JOURS DE FORMATION, LA MONÉTISATION RÉDUIT ARBITRAIREMENT LE POTENTIEL DE FORMATION POUR LES PERSONNELS QUALIFIES.
D’abord, la récupération des droits acquis ces dernières années apparait comme une réduction de la capacité de formation des cadres puisque les heures inscrites sur le compte personnel de formation et les heures acquises au titre du droit individuel à la formation au 31 décembre 2018 sont converties en euros à raison de 15 euros par heure[2]. Or l’heure de formation se serait située récemment, pour les OPCA, à hauteur de 37 euros…
Par exemple, un cadre qui avait droit à 5 jours de formation n’aura plus droit qu’à 2.
D’autre part, la recherche de financement complémentaire n’apparait pas clairement. Un abondement de l’entreprise ou de la branche professionnelle du salarié, des Régions, de « France Compétences », de l’Unédic et Pôle emploi, n’aura évidemment rien automatique dans le contexte actuel. Chaque formation devra répondre à un projet professionnel validé par le cofinanceur et entrer dans l’enveloppe budgétaire disponible de celui-ci.
Ce mécanisme va impacter les organismes de formation et leur offre par le prix. Il est à prévoir le développement de formations courtes, et moins chères, qui porteront sur une simple mise à jour de connaissances sans montée en compétences des salariés qualifiés.
Pour un purement projet personnel, l’encadrant ou le cadre devra le plus souvent compter sur son CPF complété de ses fonds propres. L’investissement de cadres sur leur propre formation pourrait se développer[3]. Cela reste à suivre.
LA FORMATION PROFESSIONNELLE EST INDISPENSABLE POUR TOUS LES SALARIÉS
De manière implicite la formation professionnelle n’est fléchée par l’État vers des profils peu ou pas qualifiée, jeune ou moins jeune, en emploi ou sans emploi. Il s’agit de la part du gouvernement de la confirmation d’un choix idéologique déjà ancien.
Il me semble que la formation professionnelle est indispensable pour tous les salariés volontaires et qu’un système orienté comme actuellement ne répond pas aux besoins dans une période de changements technologiques (digital, etc.) et organisationnels profonds.
Le faible taux de chômage des cadres ne doit pas constituer un prétexte au freinage de leur formation professionnelle.
Autre exemple, la formation professionnelle des plus de 55 ans en particulier est un impératif un peu oublié.
La principale organisation syndicale de ce secteur, la CFE-CGC, décrit bien la situation pour 2019 :
« la monétisation du CPF entraîne une inégalité des droits suivant les branches professionnelles.
De plus, les niveaux d’alimentation et les plafonds sont sous-dimensionnés par rapport au coût des formations.
Sans accord d’abondement en entreprise ou dans les branches, une diminution importante de son utilisation par les actifs est à prévoir. »[4]
[1] Décret n° 2018-1329 du 28 décembre 2018 relatif aux montants et aux modalités d’alimentation du compte personnel de formation
[2] Décret n° 2018-1153 du 14 décembre 2018 relatif aux modalités de conversion des heures acquises au titre du compte personnel de formation en euros (JO du 15.12.18)
[3] Les frais de formation (frais pédagogiques, restauration, hébergement, transport) sont déductibles de votre impôt sur le revenu brut http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/7672-PGP
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