Le 20 janvier, Emmanuel Macron a reçu à Versailles, pour la 3e édition du sommet « Choose France », quelque 200 patrons venus du monde entier pour inciter des entreprises étrangères à investir en France. Les annonces d’investissements s’élèveraient à 8 milliards d’euros au total. Ont été cités parmi les investisseurs l’armateur suisse MSC Croisières, le groupe américain Coca-Cola, l’équipementier télécoms suédois Ericsson, le groupe pharmaceutique AstraZeneca, etc. ainsi que le groupe suisse Adecco !
« Le Groupe Adecco réaffirme ses ambitions pour la France : développer ses investissements en matière de formation et renforcer ses ambitions en matière de flexibilité responsable. »
LE GROUPE ADECCO SOUHAITE DÉVELOPPER SES ACTIVITÉS DANS LE DOMAINE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE.
« The Adecco Group »[1] se présente comme un leader mondial des « solutions en ressources humaines ». Il souhaite s’appuyer sur ses marques comme Adecco (intérim), Modis (conseil en ingénierie, services numériques et sciences de la vie), Lee Hecht Harrison Altedia (conseil spécialisé dans la réorientation professionnelle et le développement de cadres dirigeants) ou General Assembly[2] (formation en nouvelles technologies).
Cette annonce intervient dans un contexte mitigé puisque le Groupe Adecco a enregistré sur un an une baisse du chiffre d’affaires de 4% (sur la base des résultats de l’entreprise au troisième trimestre 2019)[3]. Son marché français a reculé de 6% !
Le groupe considère la France comme un marché stratégique en raison du poids important de l’intérim dans notre pays[4], même si cette activité apparait en recul depuis près de deux ans (à 791 000 postes au 3e trimestre 2019). Il vient d’annoncer qu’il va « investir » 100 millions d’euros pour former 45 000 intérimaires et collaborateurs, en France, en 2020 :
- 10 000 personnes via le CDI intérimaire,
- 27 000 intérimaires, plus 2 000 autres intérimaires (via les dispositifs d’insertion),
- 6 000 collaborateurs permanents de la société.
Le prix moyen de la formation par personne serait donc de l’ordre de 2 200 €.
LE GROUPE ENVISAGE D’EMPLOYER 15 000 PERSONNES EN CDI INTÉRIMAIRE EN 2020
Une entreprise de travail temporaire (ETT) peut conclure avec le salarié un CDI intérimaire pour l’exécution de missions successives. C’est-à-dire qu’il est payé même en l’absence de mission et bénéficie de formations[5]. Adecco a eu près de 11 000 salariés en CDI intérimaire en 2019[6].
Plus généralement, le recours à ce type de contrat reste assez restreint, car contraignant. Mais il progresse, on comptait près de 45 000 CDI intérimaires en octobre 2019 (contre 32 000 en octobre 2018).
LE GROUPE A ÉGALEMENT CRÉÉ DEUX CFA
En 2019, la poursuite de sa diversification d’activité[7] a aussi été illustrée par la création de deux CFA[8].
- Le CFA « Recruter autrement» sur les métiers du recrutement est un CFA d’entreprise pour Adecco. Les alternants du CFA seront accueillis au sein des filiales du Groupe (Adecco, Adecco Medical, Badenoch + Clark, Modis et Spring) au rythme de 3 semaines en entreprise et 1 semaine en cours. Il délivrera un titre de niveau Bac+4, avec un objectif de 100% de mise à l’emploi à l’issue de la formation.
- Le « CFA des chefs» sur les métiers de la cuisine. Il dispose a priori de partenariat avec des groupes du secteur comme Accor, Accor Invest, Korian et Sodexo. Il vise à terme la formation de 1 000 apprentis par an.
Il faudra attendre 2 ou 3 ans pour pouvoir juger de leurs résultats et de l’impact de ces CFA sur les acteurs traditionnels de l’alternance dans ces secteurs.
LA DIVERSIFICATION DES ACTIVITÉS CONSTITUE UN ENJEU POUR TOUTES LES ENTREPRISES DU TRAVAIL TEMPORAIRE.
L’organisation patronale Prism’emploi décrit le secteur du travail temporaire comme comportant 10 000 « agences d’emploi »[9] et environ 27 000 salariés. Ce qui constitue un maillage territorial sérieux et un potentiel réel sur le champ de l’emploi et de la formation face au service public de l’emploi. Ce secteur s’interroge sur son devenir.
Dans un contexte de repli d’activité dans l’intérim (principalement dans l’industrie), la recherche de diversification des activités des entreprises de travail temporaire (ETT) reste variable selon les entreprises.
La piste d’une intervention dans le champ de la formation professionnelle et de l’alternance se base sur une offre faite aux entreprises de contribuer à des recrutements jugés, à tort ou à raison, comme difficiles. La concurrence avec les organismes de formation et les CFA existants est ouverte et directe.
Le développement des activités de recrutement classique par les ETT n’a pas connu, sauf exception, un grand succès, compte tenu de la présence de Pôle emploi, des cabinets de recrutement privés, des sites emploi, etc.
D’autres pistes de diversification sont actuellement suivies comme le développement de plateformes numériques proposant du travail à des indépendants !
Une redéfinition du rôle des différents acteurs actuels de l’emploi et de la formation, publics et privés, demeure suspendue à la perspective d’un changement de politique dans ces secteurs…
[1] « Les entreprises recherchent de plus en plus de personnes qualifiées alors même qu’elles ont déjà du mal à recruter. Il y a donc un réel enjeu sur la formation, en particulier des personnes les plus éloignées de l’emploi, afin de permettre à chacun de trouver un emploi qui lui corresponde et aux entreprises de trouver les compétences dont elles ont besoin. » Alain Dehaze, Directeur Général Monde du Groupe Adecco.
[2] L’acquisition de l’américain « General Assembly », spécialiste de la formation continue centrée sur les compétences numériques, date d’avril 2018, il a permis la mise en place de « solutions réellement innovantes ».
[3] Pour 2020, l’entreprise aurait un objectif de 250 millions d’euros d’économies grâce à l’avancée de son programme de transformation « Grow Together ».
[4] 9 000 collaborateurs permanents, 130 000 intérimaires délégués par semaine, 31 650 recrutements en CDI et CDD, 20 000 salariés accompagnés, 1 200 agences et bureaux, 5,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
[5] D’après Adecco, un collaborateur en CDI intérimaire aurait en moyenne 5,5 fois plus accès à la formation qu’un collaborateur en intérim classique.
[6] « Qu’est-ce qu’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) intérimaire ? » – 01 janvier 2020 – Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre) – https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F34803
Une entreprise de travail temporaire (ETT) peut conclure avec le salarié un CDI intérimaire pour l’exécution de missions successives. Le contrat de travail peut prévoir des périodes sans exécution de mission, dites périodes d’intermission. Ces périodes sont assimilées à du temps de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés et pour l’ancienneté. Lorsque que le salarié est en situation d’intermission, il doit être disponible pour toute mission à réaliser.
[7] En 2016, le Groupe avait déjà lancé une « Grande école de l’alternance ». https://www.adecco.fr/blog/2017/december/alternance-interimaire-classique-differences/
[8] Dans le cadre de la possibilité de création de nouveaux CFA ouverte par la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ».
[9] Prism’emploi a choisi en 2008, de transformer l’appellation d’« agence d’intérim » en « agence d’emploi ».
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