LA FORMATION EST OBLIGATOIRE POUR TOUT JEUNE JUSQU’À L’AGE DE SA MAJORITÉ.
La loi du 26 juillet 2019 « pour une école de la confiance » traite de l’extension de l’instruction obligatoire aux plus jeunes et d’une obligation de formation jusqu’à la majorité[1]. Elle précise ainsi deux points :
- « L’instruction est obligatoire pour chaque enfant dès l’âge de trois ans et jusqu’à l’âge de seize ans. » – Article 11
- « La formation est obligatoire pour tout jeune jusqu’à l’âge de sa majorité. » – Article 15.
La première formule impose l’instruction à partir de 3 ans (nouveauté) jusqu’à 16 ans. La seconde parle plus généralement de « formation » pour les 16-18 ans et recouvre en fait des solutions diverses. Pour ces derniers, l’obligation est précisée à la fois au niveau de l’Éducation et du Travail.
Sur le plan du Code de l’éducation :
« À l’issue de l’instruction obligatoire[2], cette obligation est remplie lorsque le jeune poursuit sa scolarité dans un établissement d’enseignement public ou privé, lorsqu’il est apprenti ou stagiaire de la formation professionnelle, lorsqu’il occupe un emploi ou effectue un service civique ou lorsqu’il bénéficie d’un dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle.
Bizarrement, le texte de loi ne reprend pas d’autres solutions existantes proposées précédemment, comme la préparation d’un concours de la fonction publique, un parcours d’enseignement alternatif (école de la 2e chance ou EPIDE), un enseignement à distance, etc.
Le Code du Travail définit les acteurs :
« Le contrôle du respect de leur obligation de formation par les jeunes âgés de seize à dix-huit ans est assuré par les missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes[3], qui bénéficient à cet effet d’un dispositif de collecte et de transmission des données placé sous la responsabilité de l’État.
LA RÉPARTITION DES RÔLES SEMBLE COMPLIQUÉE.
En clair avant 16 ans, l’acteur est l’Éducation nationale et de 16 à 18 ans, il y a un partage entre Éducation nationale et Travail, ce qui est sans doute logique, mais ne rend pas les choses si simples.
- Poursuite (ou reprise) de scolarité dans un établissement d’enseignement public ou privé (du ressort de l’éducation nationale),
- Contrat d’apprentissage ou stage de la formation professionnelle,
- Contrat de travail (ou autre type d’emploi),
- Service civique,
- Bénéficiaires d’un dispositif d’accompagnement ou d’insertion sociale et professionnelle, c’est-à-dire PACEA ou Garantie jeune, suivi par une ML.
Cette dimension « travail » explique pourquoi la loi précise également l’implication de Pôle emploi[4] :
« A ce titre, Pôle emploi concourt à la mise en œuvre de l’obligation de formation définie à l’article L. 114-1 du Code de l’éducation ; » – Article 15.
La nature opérationnelle de ce concours de PE à cette opération, bien particulière par le public, reste évidemment à préciser.
CE DISPOSITIF POUR LES 16 18 ANS EST ENCORE EN GESTATION.
Un rapport « Formation obligatoire des 16-18 ans – Passer d’un droit formel à un droit réel » vient d’être remis au Premier ministre à ce sujet[5]. Il comporte des préconisations. Plusieurs concernent les Missions locales et leurs partenaires de l’Éducation nationale :
- la nécessité de mettre à jour en continu la liste des jeunes concernés par les situations de décrochage, et de la mettre à disposition, sous format numérique, du réseau Foquale[6] et des Missions locales ;
- le renforcement du tandem Mission locales / réseau Foquale dans le pilotage des Plates-formes de suivi et d’appui aux décrocheurs (PSAD).
Un fonds « Ambition 16-18 » devrait être mis en place « pour permettre aux Missions locales de financer directement, en fonction des besoins du jeune, des actions de remobilisation préalables à la préqualification et pour apporter des aides directes en nature aux jeunes. » – UNML[7]
Reste à voir comment tout cela pourra se mettre en place dans le détail dans les prochains mois[8].
LE CONTRÔLE DE SON APPLICATION PARAIT ENCORE FLOU.
Pour assurer l’application des dispositifs, et conformément à l’article 63 de la loi du 26 juillet 2019, ces dispositions devraient entrer en vigueur à la rentrée scolaire 2020.
La responsabilité incombe au « service public de l’orientation tout au long de la vie et tous les organismes qui y participent », sous l’autorité de la région[9], pour tout jeune âgé de seize à dix-huit ans, sorti sans un diplôme ou titre.
« Pour l’application de cette obligation, le jeune est reçu conjointement avec son représentant légal » et « Cet entretien permet également de rappeler au jeune et à son représentant légal l’obligation de formation ». Cette dernière mention est issue de l’article 15 de la loi.
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Sur ce dossier de la prise en charge des jeunes de 16-18 ans, l’articulation entre l’État et les Régions, la combinaison entre l’Éducation et le Travail, le rapport entre les missions locales et Pôle emploi, l’appel aux acteurs locaux et la mobilisation des financements multiples par département font apparaitre construction bien fragile, dont on peut douter de l’efficacité, en dépit de tous les efforts qui ne manqueront pas d’être déployés par les parties.
[1] LOI n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance – Titre Ier : GARANTIR LES SAVOIRS FONDAMENTAUX POUR TOUS – Chapitre II : L’extension de l’instruction obligatoire aux plus jeunes et l’obligation de formation jusqu’à la majorité – https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=0257A07F0D1BBE3885093C0C5C469ABE.tplgfr22s_1?cidTexte=JORFTEXT000038829065&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000038829057
[2] Définie à l’article L. 131-1.
[3] Article L5314-1 Code du travail : « Des missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes peuvent être constituées entre l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des organisations professionnelles et syndicales et des associations. Elles prennent la forme d’une association ou d’un groupement d’intérêt public. Dans ce dernier cas, elles peuvent recruter des personnels qui leur sont propres, régis par le présent code. »
[4] Spécifié à l’article L5312-1 du Code du Travail.
[5] Rapport sur la « Formation obligatoire des 16-18 ans – Passer d’un droit formel à un droit réel » – Sylvie Charrière et Patrick Roger
[6] Les réseaux FOQUALE (Réseaux Formation Qualification Emploi) intégrés aux PSAD et institués par la circulaire FOQUALE du 29 mars 2013, rassemblent les acteurs de l’Education nationale intervenant dans la prise en charge des jeunes sortis sans diplôme : établissements, CIO, MLDS, structures de retour à l’école (SRE) de type micro lycée.
[7] « L’UNML s’engage dès ce mois de janvier au côté de l’État dans la déclinaison opérationnelle de cette réforme, à l’appui des travaux menés en région depuis quelques mois par les ARML et les Missions Locales (groupe 8 de la stratégie pauvreté) et des préconisations de ce rapport, dont elle suivra de près la mise en œuvre.«
[8] « Enfin, c’est au niveau départemental que les rapporteurs proposent de rassembler les principaux financeurs des Missions Locales, sous l’égide des Préfets de département et dès la constitution des nouveaux exécutifs locaux, pour s’accorder sur le montant des moyens nécessaires pour assurer le bon fonctionnement des structures, leur adéquation avec les besoins du territoire, la répartition indicative des financements sur trois ans entre Etat et collectivités, les indicateurs de performance sur lesquels leur action sera appréciée ainsi que les améliorations à apporter au réseau. » – Communiqué UNML.
[9] Article L313-8
Modifié par LOI n°2019-791 du 26 juillet 2019 – art. 15
Sous l’autorité de la région, le service public de l’orientation tout au long de la vie et tous les organismes qui y participent s’organisent au plan régional et local pour permettre à tout jeune âgé de seize à dix-huit ans sorti sans un diplôme national ou un titre professionnel enregistré et classé au répertoire national des certifications professionnelles du système de formation initiale et sans emploi de se réinscrire dans un parcours de formation, d’accompagnement ou d’exercer une activité d’intérêt général lui permettant de préparer son entrée dans la vie active.
Pour l’application de cette obligation, le jeune est reçu conjointement avec son représentant légal par l’un ou l’autre des organismes visés au premier alinéa, dans les trois mois qui suivent le signalement par son établissement d’origine dans les conditions mentionnées à l’article L. 313-7, pour bénéficier d’un entretien de réorientation.
Cet entretien, assuré dans le cadre de la coordination mentionnée à l’article L. 313-7, vise à proposer au jeune et à son représentant légal des solutions de reprise d’études, d’entrée en formation, d’exercice d’une activité d’intérêt général ou d’accompagnement personnalisé vers l’emploi ou la création d’entreprise.
Cet entretien permet également de rappeler au jeune et à son représentant légal l’obligation de formation définie à l’article L. 114-1.
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