Le financement de l’Unédic est impacté par les premiers effets de la crise sanitaire conduisant à la baisse de l’activité et par les décisions prises par le gouvernement sur plusieurs plans (activité partielle, report des sorties, etc.). La situation financière de l’organisme est à suivre avec attention pour éviter une rupture dans les prochains mois.
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Lors de la réunion de sa Bureau du 26 mars, l’Unédic a établi une première « note synthétique relative aux mesures réglementaires et opérationnelles » intervenues sur le champ de l’assurance chômage dans le contexte du COVID19[1]. En tant que gestionnaire du régime d’assurance chômage, l’Unédic a fait le point sur les mesures sur le champ de l’activité partielle et de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) et l’impact sur le recouvrement des contributions et en matière d’organisation du service d’indemnisation, à la date de la réunion[2].
Les prévisions Unédic pour 2020-2022 sont désormais caduques.
L’UNEDIC CHERCHE A MAINTENIR LA SOUTENABILITÉ DES FINANCEMENTS DU RÉGIME
L’Unédic cherche à maintenir la soutenabilité des financements du régime et à assurer le pilotage sécurisé de sa trajectoire financière.
C’est-à-dire à être en mesure de remplir sa mission compte tenu des nombreuses modifications qui surviennent sur ordre ou de fait.
« Pour faire face à cette situation, l’Unédic dispose de ses outils de financement et d’un coussin de liquidité. »
L’objectif de l’Unédic est de permettre à l’assurance chômage « de continuer de jouer pleinement dans la période sa fonction de stabilisateur économique et social auprès des ménages et des entreprises ».
Les effets sur l’activité salariale, de la crise sanitaire du COVID-19, sont également très importantes, tant sur les dépenses supplémentaires que sur la diminution des recettes.
L’impact est très lourd pour ces deux mois, sans être en mesure de chiffrer le mois de mai et juin à ce jour[3].
LES DÉPENSES SUPPLÉMENTAIRES D’ALLOCATIONS CHÔMAGE ET D’INDEMNISATION DE L’ACTIVITÉ PARTIELLE POURRAIENT ATTEINDRE 5,5 Md€ POUR MARS ET AVRIL
D’une part, la participation de l’Unédic au financement du chômage partiel, pour les mois de mars et avril (correspondant à la durée actuelle du confinement), est estimé dans une fourchette de 1,6 à 4 milliards d’euros[4].
D’autre part, les dépenses supplémentaires d’allocations chômage devraient être de l’ordre de 1,55 Md€[5]. Elles sont dues à la moindre activité des allocataires (cumul emploi/chômage,) et moindres sorties vers l’emploi des allocataires, au prolongement des fins de droit et des intermittents – prolongement/date anniversaire, au report mesures prévues du 1er avril au 1er septembre, etc.
Et encore, ce chiffrage ne tient pas compte des nouvelles entrées au chômage indemnisé dont le nombre est difficile à prévoir avec précision.
LES RECETTES DE L’UNEDIC VONT DIMINUER DE L’ORDRE DE 4 Md€ POUR MARS ET AVRIL
Les recettes de l’Unédic pourraient diminuer entre 3,4 Md€ (option basse)[6] et 4,4 Md€ (hypothèse haute à confirmer) pour mars et avril.
Les principales causes sont :
-
Les décalages de trésorerie liés à des report de contributions[7],
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Les moindres recettes[8] liées à l’activité partielle, aux arrêts maladie et à une moindre activité des allocataires (cumul, intermittents, non-sorties vers l’emploi).
L’UNEDIC COURT UN RISQUE DIRECT COMPTE TENU DE LA SITUATION.
Compte tenu des événements sur le marché du travail (diminution de l’activité) et des mesures prises par le gouvernement (chômage partiel, prolongation des indemnisation, suspension des cotisations, etc…), l’Unédic devrait encaisser une perte d’au moins 10 milliards d’euros, dans la première phase de la crise sanitaire (mars-avril).
Le choix du gouvernement de faire porter certaines dépenses en partie sur l’Unédic (activité partielle…) dans un contexte de réduction des recettes et d’une augmentation du nombre des bénéficiaires semble pouvoir imposer des difficultés majeures au régime d’assurance chômage d’ici la fin du premier semestre 2020.
LA MISE EN PLACE D’UN COMITE DE PILOTAGE APPARAIT IMPÉRATIVE.
Il faudra répondre à la montée en charge rapide des dépenses et à une baisse parallèle des recettes de l’Unédic afin d’éviter une possible rupture !
Ce comité de pilotage[9] pourrait inclure l’Unédic, la DGEFP, Pôle emploi et le ministère de l’Économie et le cabinet du Premier ministre.
« Ce comité de pilotage aurait pour objet le suivi régulier de l’activité partielle et de l’indemnisation du chômage, ainsi que les échanges sur l’évolution des dispositifs, notamment en raison des impacts financiers sur l’Unédic. »
[1] « Le Coronavirus et les décisions politiques récentes visant à endiguer sa propagation impactent l’économie dans des proportions inédites. Cette perturbation de l’activité, et de l’emploi en particulier, aura des effets difficiles à anticiper sur le montant des contributions et sur le montant des dépenses d’indemnisation en 2020. »
[2] Le Bureau recense par ailleurs les effets à date. Ces mesures étant en cours de construction et d’adoption concernant les salariés et les employeurs, les demandeurs d’emplois et les allocataires, le document dresse par conséquent un panorama établi au 25 mars 2020.
[3] « Financement de l’activité partielle : parmi les mesures les plus importantes de soutien à l’économie figure le renforcement du financement de l’activité partielle au plus proche du montant versé par les employeurs aux salariés placés en situation d’activité partielle. Cette mesure est cofinancée par l’Etat et l’Unédic et représentera un surcoût important pour l’Unédic dans les semaines et mois à venir. »
[4] Financement de l’activité partielle – part Unédic (en millions d’euros)
Mars | Avril | Total | |
Option basse | 500 | 1 100 | 1 600 |
Option haute | 1 300 | 2 700 | 4 000 |
Source Unédic – note du 26 mars 2020
[5] Dépenses supplémentaires d’allocations – Unédic
Mars | Avril | Total | |
Moindre activité des allocataires (cumul emploi/chômage) | 370 | 620 | 990 |
Prolongement des fins de droit | 20 | 120 | 140 |
Moindres sorties vers l’emploi des allocataires | 5 | 130 | 135 |
Intermittents – moindre activité | 75 | 70 | 145 |
Intermittents – prolongement/date anniversaire | 5 | 10 | 15 |
Report mesures du 1er avril au 1er septembre | 0 | 30 | 30 |
Répercussion des hausses d’allocations sur les versements aux caisses de retraites complémentaires | 35 | 60 | 95 |
Total | 510 | 1 040 | 1 550 |
[6] Diminution de recettes : prévision basse en milliards d’euros pour mars et avril 2020
Montant | |
Décalages de trésorerie liés à des report de contributions | 2,33 |
Moindres recettes liées à l’activité partielle | 0,30 |
Moindres recettes liées aux arrêts maladie | 0,60 |
Moindres recettes liées à une moindre activité des allocataires | 0,17 |
Total | 3,40 |
[7] Décalage de paiement : « le décalage des échéances de paiement de cotisations par les employeurs a des effets de trésorerie immédiats, avant même de pouvoir estimer combien ces reports auront d’effet à moyen terme. Les annonces et initiatives du gouvernement sur le champ de l’emploi, des contributions et de l’indemnisation ont un effet sur le régime au niveau de ses bénéficiaires, au niveau des salariés et des entreprises, mais également de ses finances. L’ampleur des effets et le besoin de réactivité éclairée dans une période incertaine et inédite de gestion de crise semblent plaider pour un pilotage inclusif et réactif des acteurs impliqués dans la gestion du régime ».
[8] Moindres recettes de cotisations chômage et CSG activité : « le financement de l’Assurance chômage reposant sur ces recettes, une baisse de l’activité et donc de la masse salariale soumise à cotisation chômage engendre un manque à gagner en termes de recettes. »
[9] « L’activité partielle illustre, à elle seule, les enjeux d’un tel pilotage tant dans la conception de dispositifs que dans la durée. Lors de la réunion du 19 mars, les partenaires sociaux gestionnaires de l’Unédic ont ainsi proposé la mise en place d’un comité de pilotage. Cette demande a trouvé une issue favorable dans l’acceptation de ce principe sous l’égide du cabinet de la Ministre du travail et de son conseiller spécial. Une proposition de l’Unédic doit lui être faite d’ici le 27 mars en vue de l’installation rapide de ce comité qui pourrait inclure la DGEFP, Pôle emploi et les représentants du ministère de l’économie, voire du cabinet du Premier ministre, en tant que de besoin. Ce comité de pilotage aurait pour objet le suivi régulier de l’activité partielle et de l’indemnisation du chômage, ainsi que les échanges sur l’évolution des dispositifs, notamment en raison des impacts financiers sur l’Unédic. »
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