Le 26 mars 2020, le Bureau de l’Unédic[1] a traité de sujets majeurs de tension : le suivi des effets des mesures d’urgence liées au Covid-19, la continuité et la maîtrise du pilotage durant la période de crise sanitaire, la demande de prorogation de la convention Unédic AGS[2] et la situation de l’Assurance chômage[3].
LE BUREAU DE L’UNEDIC CONSTATE LES MESURES D’URGENCE COVID-19 ET LEURS EFFETS.
Les mesures intervenues sur le champ de l’assurance chômage[4] dans le contexte du COVID-19 et leurs effets ont été constatées. Il a ainsi été question de « plusieurs dispositions visant à maintenir la soutenabilité des financements du régime et le pilotage sécurisé de sa trajectoire financière ». De nouvelles prévisions financières seront formulées pour être présentés dès le Bureau d’avril[5].
Une réelle inquiétude s’exprime. Les membres du Bureau se sentent obligés de souligner : « leur attachement à la continuité et à la maîtrise du pilotage[6] ». Cela revient à dire, en termes fort diplomatiques, qu’ils ont complètement perdu de fait cette maîtrise.
LES ADMINISTRATEURS NE MAITRISENT PLUS DU TOUT LE PILOTAGE DE L’UNEDIC. ILS INFORMENT JUSTE LE GOUVERNEMENT DES EFFETS DES MESURES PRISES SUR LE RÉGIME DE L’ASSURANCE CHÔMAGE.
Le Bureau a réaffirmé sa demande de constitution d’un comité de pilotage avec l’Etat qui aurait vocation à aborder les questions réglementaires et les modalités de gestion[7] du chômage partiel et de l’Assurance chômage.
Ce comité aurait à connaitre les données en temps réel « des situations de recours à l’activité partielle, de versement des contributions, d’indemnisation et d’inscription sur les listes de Pôle emploi ».
A FIN MARS, LA DETTE DE L’UNEDIC S’ÉLEVAIT A PRES DE 40 MILLIARDS D’EUROS.
La situation de l’Assurance chômage, avant le plein impact de la crise sanitaire, était mauvaise. Le cumul annuel des contributions est estimé à 9,5 Md€ et celui des dépenses[8] à 11,8 Md€, donc loin de l’équilibre. La dette à fin mars 2020 s’élevait à 39,63 Md€, soit plus que son budget annuel.
LA PRISE EN CHARGE DU TIERS DES DÉPENSES LIÉES AU CHÔMAGE PARTIEL, EN PLUS DE SES DÉPENSES ORDINAIRES, APPARAIT TROP LOURDE POUR L’UNEDIC.
6,3 millions de salariés sont déjà dans cette situation au 7 avril 2020 ; le coût estimé par le ministère du travail est, à ce stade, de l’ordre de 20 Md€.
La prise en charge du tiers de ce montant par l’Unédic de cette charge par l’Unédic, soit près de 7 Md€ apparait trop lourde et met en question de régime de l’assurance chômage lui-même. D’autant que ce montant va encore augmenter…
Il faut prendre en compte que, pour sa part, l’Unédic va devoir indemniser de nombreux salariés en fin de contrat non renouvelés (CDD et Intérim) et un afflux de salariés licenciés économiques, dans les prochains mois, suite à des cessations d’activités en série, même dans le meilleur des cas.
Les mesures prises dans le cadre de la réforme imposée de l’indemnisation chômage pourront-elles être maintenues dans une situation de crise sociale aigüe ?
L’État est certes caution des emprunts de l’Unédic qui vont exploser…
Mais les conséquences de la décision du gouvernement de généraliser le chômage partiel (qui est une bonne décision, par ailleurs) doit être assumée par l’État. Elle ne doit pas être renvoyés pour partie sur un financement Unédic, qui se trouverait définitivement déficitaire.
LE RÉGIME D’ASSURANCE CHÔMAGE DOIT ÊTRE SAUVEGARDE.
L’explosion du déficit va être entériné par une nouvelle loi de finances rectificative. L’hypothèse actuelle est, a priori, à hauteur 7,6 % du PIB[9] (au lieu des 2,2% initialement prévus).
Il apparait opportun que l’État assume seul la charge de la couverture exceptionnelle du chômage partiel, sans plomber davantage l’Unédic.
Dans le contexte de récession, il convient, plus que jamais, de sauvegarder les régimes sociaux.
Les partenaires sociaux doivent se mobiliser à cet effet…
[1] Synthèse du bureau de l’Unédic du 26 mars 2020 – 07 avril 2020.
[2] « Compte tenu de la crise sanitaire, le Bureau a mandaté l’Unédic pour demander la prorogation de la convention actuelle jusqu’à la fin de l’année. Un nouveau calendrier de signature d’une nouvelle convention sera proposé dans l’avenant de prorogation. »
[3] La nomination de M. Christophe Valentie, candidat du gouvernement, au poste de Directeur Général de l’Unédic a été validée par le Bureau. Sa date de prise de fonction n’a pas été précisée.
[4] « Une note de synthèse inventorie ainsi les mesures sur le champ de l’activité partielle et de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) et les mesures d’ordre opérationnel en termes de recouvrement des contributions et en matière d’organisation du service d’indemnisation. »
[5] Ces mesures étant en cours de construction et d’adoption concernant les salariés et les employeurs, les demandeurs d’emplois et les allocataires, le document dresse par conséquent un panorama établi au 25 mars.
[6] « Cela pour permettre à l’Assurance chômage de continuer de jouer pleinement dans la période sa fonction de stabilisateur économique et social auprès des ménages et des entreprises. »
[7] « La représentation de l’Unédic serait assurée par son Président et sa Vice-Présidente, accompagnés de la direction générale. » (…) « Les éléments présentés à l’ordre du jour seraient préalablement partagés avec les membres du Bureau qui pourraient contribuer à l’alimenter, le cas échéant, des demandes complémentaires. »
[8] Dépenses : dépenses d’indemnisation, cotisations sociales des demandeurs d’emploi (assurance maladie et retraite) et financement de Pôle emploi.
[9] Ce chiffre du prochain projet de loi de finances rectificatif (PLFR) sera sans doute revu en fonction de la durée décidée du confinement.
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