DES DIFFICULTÉS DE RECRUTEMENT EXISTENT, MAIS ELLES NE DÉBOUCHENT PAS SUR BEAUCOUP DE POSTES NON POURVUS.
Les difficultés de recrutement des entreprises, présentées par diverses enquêtes, ont souvent été mises en avant par des responsables politiques, ou patronaux, comme la preuve qu’il existait en France une grande quantité d’emplois non pourvus.
En découlait l’idée, de manière implicite ou explicite que l’accès à l’emploi était facile (« il suffit de traverser la rue » ou « il faut faire le tour du port ») et que de nombreux chômeurs indemnisés et/ou bénéficiaires du RSA étaient juste des assistés fraudeurs, qui ne souhaitaient pas travailler en dépit des réserves d’emploi disponibles qui s’ouvraient à eux !
Pôle emploi a eu l’occasion, à plusieurs reprises, de relativiser le nombre des emplois non pourvus par rapport aux offres diffusées.
C’est pourtant l’un des arguments mis en avant pour motiver la réorganisation du Service public de l’emploi à partir de 2024, suite à la récente adoption de la loi sur le « Plein emploi ».
Certes on peut toujours imaginer des améliorations possibles, comme une meilleure fluidité et rapidité des informations et rencontres entre recruteurs et candidats, et/ou une mobilisation plus pertinente du ciblage de la formation professionnelle pour les demandeurs d’emploi sur des besoins des employeurs.
Mais, la réserve de postes non pourvus reste réduite et le ralentissement actuel de la croissance va venir encore renforcer cette donnée.
LE NOMBRE DES EMPLOIS TRIMESTRIELS VACANTS BAISSE A 350 000.
Le nombre des emplois vacants, 350 600, constaté au 3ème trimestre 2023, a baissé (-11% sur un an), et évidemment la plupart d’entre eux sont pourvus[1].
Les difficultés de recrutement existent, mais elles ne débouchent pas sur des postes non pourvus.
Elles posent des problèmes de temps de recherche des candidats, de modification des profils recherchés, d’amélioration des conditions des offres, etc. Bref, elles se traduisent surtout par un cout plus élevé pour les entreprises.
L’HÉBERGEMENT-RESTAURATION DONNE UN BON EXEMPLE
Prenons un secteur donné comme en tension, pour illustrer les raisons de cette situation.
L’analyse de la Dares est tout à fait explicite : Ce renouvellement des effectifs plus important que les années précédentes accroît la charge associée aux embauches (recherches de candidats, de formation, etc.) ; il peut pour partie être à l’origine de la hausse des difficultés de recrutement rapportées par les entreprises dans les enquêtes de conjoncture.
Dans l’hébergement-restauration, au 4ème trimestre 2022, 75% des entreprises déclaraient rencontrer des difficultés de recrutement[2]. Elles auraient fortement augmenté « dans l’hébergement-restauration entre mi-2021 et fin 2022 »[3].
LES RAISONS DES DIFFICULTÉS
L’une des raisons est la croissance des effectifs[4] :
« les effectifs de ce secteur atteignent des niveaux inédits par rapport à la période pré-crise liée au Covid-19. Le pic estival est particulièrement marqué en 2022, avec 368 000 salariés en plus entre les mois de janvier et juillet. »
« À l’été 2022, les tensions de recrutement dans l’hébergement-restauration sont vraisemblablement liées à la très forte croissance de la demande de travail émanant des entreprises du secteur. »
Elle impose la recherche de nouveaux profils et une diversification des modes de recrutement.
Les entreprises face à un besoin de main-d’œuvre saisonnier ont dû mobiliser à hauteur de 39% des salariés qui n’étaient pas employés dans ce secteur un an auparavant (contre 35% à la même période en 2019, avant la crise sanitaire).
« À l’été 2022, les tensions de recrutement dans l’hébergement-restauration sont vraisemblablement liées à la très forte croissance de la demande de travail émanant des entreprises du secteur. »
« Cette difficulté à fidéliser les salariés nécessite d’étendre les recrutements au-delà du seul secteur de l’hébergement-restauration. »
LA MOBILITÉ DES SALARIES ACCENTUE LES DIFFICULTÉS DE RECRUTEMENT
Par ailleurs, la mobilité des salariés s’est accrue entre les entreprises du secteur et contribue aux difficultés de recrutement.
Les employeurs de l’hébergement-restauration constatent une moindre fidélisation de la main-d’œuvre.
Entre juillet 2021 et juillet 2022, le quart des salariés de l’hébergement-restauration ont changent d’entreprise[5].
Le taux de démission des salariés en CDI dans le secteur est passé à 31% en 2022 (28% en 2019).
Cette pratique vient s’ajouter à la question du renouvellement des saisonniers.
[1] Dares – Les emplois vacants au 3ème trimestre 2023 – 17 novembre 2023
[2] Dares – Focus N°61 – 9 novembre 2023 – https://dares.travail-emploi.gouv.fr/publication/effectifs-et-difficultes-de-recrutement-dans-lhebergement-restauration-lete-2022
[3] « Si ces tensions sont assez généralisées à l’ensemble de l’économie, elles sont plus vives dans l’hébergement-restauration. » Dares
[4] En juillet 2022, les effectifs de la restauration dépassent de 8,7% ceux de juillet 2019 (contre +2,1% entre les mois de juillet 2019 et 2021). Dans l’hébergement, la hausse est de +1,6 % entre les mois de juillet 2019 et 2022.
[5] 21% entre juillet 2018 et juillet 2019
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