Les décisions de l’Union européenne, concernant les politiques de l’emploi et de la formation dans l’Union, se retrouvent en arrière fond des politiques nationales, dont celle de la France.
Ce cadrage n’est évidemment pas suivi à la lettre. Chaque pays interprète les orientations indiquées selon sa politique et/ou ses changements de politique. Par exemple, cibler les jeunes de 18 à 25 ans en France et non les jeunes de 18 à 29 ans !
Par contre, l’influence est assez directe dès lors que des actions nationales font appel à des fonds européens, dont le FSE (Fonds social européen) qui est le principal dispositif européen de soutien à l’emploi[1].
LA COMMISSION EUROPÉENNE VIENT D’ACTUALISER UN CADRAGE DES POLITIQUES D’EMPLOI ET DE FORMATION.
La Commission européenne (CE) vient de présenter[2] :
-
Une Recommandation sur « un soutien actif et efficace à l’emploi à la suite de la crise de la COVID-19 »[3],
-
Un Plan d’action pour la mise en œuvre du « Socle européen des droits sociaux[4]».
Ces textes interviennent dans un contexte où la France devrait bénéficier de l’ordre de 40 milliards d’euros, dans le cadre du « Plan de relance européen », pour contribuer à financer les actions de son propre plan de relance national.
Ils constituent le cadrage dans lequel s’inscrivent les actions susceptibles d’être financées par le Plan européen.
La ministre du Travail et celui chargé des Affaires Européennes ont apporté « leur soutien aux initiatives de la Commission ».
LA RECOMMANDATION RAPPELLE DES PRINCIPES GÉNÉRAUX ET CONSENSUELS.
Elle vise à « favoriser la création d’emplois dans la reprise, et à accompagner les transitions vers les secteurs porteurs ».
« Elle encourage les États membres à soutenir les mesures suivantes : des incitations à l’embauche et un soutien à l’entrepreneuriat ; des possibilités de perfectionnement professionnel et de reconversion ; un soutien renforcé des services de l’emploi. »[5]
Ces sujets ne font l’objet d’aucun débat.
LE PLAN D’ACTION FIXE DES OBJECTIFS A MOYEN TERME EN MATIÈRE D’EMPLOI, DE FORMATION ET DE PAUVRETÉ.
Le Plan d’action[6] fixe des objectifs pour 2030 aux pays de l’Union européenne, « en matière d’emploi, de formation et de réduction de la pauvreté » :
-
Un emploi pour 78% des personnes âgées de 20 à 64 ans ;
-
Des activités de formation pour au moins 60% des adultes chaque année ; il s’agit de renforcer les compétences[7].
-
Une diminution d’au moins 15 millions du nombre des personnes « menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale ».
Cette formulation des objectifs vise une homogénéisation du marché du travail au sein de l’Union européenne (même si ce projet reste encore tout à fait utopique). Emmanuel Macron a ainsi déclaré en 2017 :
« Le défi central de l’Union européenne, c’est celui de la convergence sociale et celui de la transformation des compétences. »
Ce vœu de bon sens est loin d’être atteint.
Par ailleurs, les chiffres fixés par le plan d’action comme à atteindre sont à comparer à la situation existante en France. Le taux d’emploi des 15-64 ans était de 65,6%, en moyenne au quatrième trimestre 2020, contre 66% un an auparavant[8] (les chiffres Insee comprennent les 15/25 ans).
Pour la formation, « moins de 40% des adultes de l’Union européenne suivent une formation chaque année ». Et ce chiffre est moindre en France. Il est vrai que la nature des formations (durée, niveau, etc.) n’étant pas précisés ont reste dans le flou.
UN ACCORD EST INTERVENU SUR LE FSE+ POUR 2021-2027
Fin janvier 2021, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européen ont conclu un accord provisoire sur le Fonds social européen+ pluriannuel[9].
Il s’élèvera à près de 90 milliards d’euros pour la période 2021-2027[10].
Le nouveau FSE+ rassemble désormais à la fois : le Fonds social européen (FSE), l’initiative pour l’emploi des jeunes (IEJ)[11], le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD)[12], le programme pour l’emploi et l’innovation sociale (EaSI) et le programme de santé de l’UE.
Le ciblage général est clair, il concerne, selon le rapporteur :
-
« Les personnes sans emploi,
-
Celles qui veulent améliorer leurs compétences,
-
Les enfants en situation de pauvreté et
-
La jeunesse qui devrait disposer de toutes les opportunités de travailler, de se former et d’étudier.[13]»
Ce nouveau FSE+, contribuera notamment à investir dans les jeunes « NEET », âgés de 15 à 29 ans. Les 27 pays membres de l’UE devraient affecter un montant approprié de leurs ressources FSE+ à des actions ciblées en faveur de l’emploi des jeunes[14], ainsi que d’autres possibilités de financement existantes.
La répartition des rôles entre État et Région, l’amélioration de la gestion des fonds, etc. méritent un fort long développement en dehors de ce billet !
[1] « Le FSE est le principal dispositif européen de soutien à l’emploi : il intervient pour aider les personnes à trouver des emplois de meilleure qualité et pour offrir des perspectives professionnelles plus équitables à tous les citoyens de l’UE. Pour ce faire, il investit dans le capital humain de l’Europe – les travailleurs, les jeunes et tous les demandeurs d’emploi. Avec un budget de 10 milliards d’euros par an, le FSE améliore les perspectives d’emploi de millions d’Européens, en portant une attention particulière aux personnes qui éprouvent le plus de difficultés à trouver un emploi. » – site de l’UE.
[2] 4 mars 2021.
[3] Plan d’action pour la mise en œuvre du Socle européen des droits sociaux : Élisabeth Borne et Clément Beaune saluent l’ambition de la Commission européenne – 05/03/21 – Communiqués de Elisabeth Borne
[4] « Le Socle des droits sociaux, proclamé en 2017 lors du sommet de Göteborg, comprend vingt principes en matière sociale, sur l’égalité des chances, l’accès au marché du travail, les conditions de travail, la protection sociale et les enjeux d’inclusion. »
Les 20 principes du texte comprennent entre autres le soutien actif à l’emploi, les emplois sûrs et adaptables, les informations concernant les conditions d’emploi et protection en cas de licenciement, la formation et apprentissage tout au long de la vie, etc.
[5] La Recommandation « souligne également le rôle du Plan de relance européen pour soutenir ces mesures dans les États membres ».
[6] « Le Plan d’action vise à présenter les mesures proposées par la Commission pour concrétiser chacun de ces vingt principes, et insuffler ainsi une nouvelle dynamique à l’Europe sociale. »
[7] « L’enjeu est donc de construire une véritable Europe des compétences, qui sera au fondement de l’économie européenne de demain. » « La transformation et l’élévation des compétences apparaissent comme un enjeu essentiel. Sous l’effet de l’automatisation, et des mutations de long terme liées aux transitions numériques et environnementales, les emplois se transforment, et l’évolution des compétences constitue donc un défi majeur pour l’avenir de l’Europe. »
[8] Insee – Informations rapides – N°37 – 16/02/2021.
[9] https://www.centre-inffo.fr/site-europe-international-formation/actualites-europe/accord-sur-le-fonds-social-europeen-pour-2021-2027
[10] Les fonds européens sont dits en gestion partagée, c’est-à-dire qu’un budget est alloué aux Etats-membres. Chaque État décident des modalités de gestion de ces fonds sur son territoire. En France, les fonds sont gérés par l’État et par les conseils régionaux. Les fonds européens feront l’objet d’un accord de partenariat. Il s’agit d’un contrat entre la Commission et l’État membre qui s’engage sur la mise en œuvre et l’utilisation des fonds.
[11] Financement historique mobilisé pour la « Garantie jeune ».
[12] Le FSE intègre la thématique de l’aide aux plus démunis qui était depuis 2014 la prérogative du fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD).
[13] https://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20210129IPR96701/accord-conclu-sur-le-fonds-social-europeen-pour-2021-2027
[14] « Les États membres dont le taux de jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation est supérieur à la moyenne de l’Union européenne devraient affecter au moins 12,5% de leurs ressources FSE+ pour aider ces jeunes à obtenir une certification ou à trouver un emploi de bonne qualité. »
Pas de commentaire sur “Quel cadrage européen sur la politique de l’emploi et de la formation en France ?”