L’ILLETTRISME NUMÉRIQUE, OU ILLECTRONISME DEMEURE UNE RÉALITÉ EN FRANCE
Une étude de l’Insee[1] constate qu’en 2019, l’illectronisme, ou illettrisme numérique concerne toujours 17% de la population française. 15% des personnes, de 15 ans ou plus, n’ont pas utilisé Internet au cours de l’année et 2% sont dépourvus de toute compétence[2]. La situation s’est améliorée sur les dix dernières années, mais des problèmes importants demeurent.
De plus, « Utiliser Internet » ne garantit pas de posséder les compétences numériques de base. Quand on détaille les compétences numériques, seule une personne sur deux dispose, d’après ses déclarations[3], d’une maitrise des compétences de base. Même parmi les utilisateurs d’Internet, 38% manquent d’au moins une compétence numérique de base.
Cet illettrisme numérique concerne plus particulièrement des personnes peu diplômées, des personnes âgées, des personnes seules ou sans moyens matériels[4].
DES COMPÉTENCES NUMÉRIQUES MANQUENT À UNE MOITIÉ DE LA POPULATION
Quatre principaux domaines de compétences numériques sont isolés et peuvent être notés[5] :
- La recherche d’information sur tous les sujets,
- La communication (envoi ou réception de courriel, etc.),
- La résolution de problèmes (accès à son compte bancaire par Internet, copier et stocker des fichiers, etc.),
- L’usage de logiciels (traitement de texte, tableurs, applications, etc.).
Près de 38% des personnes utilisant Internet apparaissent manquer d’au moins une compétence dans les quatre domaines que sont la recherche d’information, la communication, l’utilisation de logiciels et la résolution de problèmes.
Le chiffre monte à plus de 47% si l’on considère l’ensemble de la population[6].
La part de personnes sur l’ensemble de la population en situation d’illectronisme est de 16,5%. Celle des personnes ayant au moins une incapacité ou incompétence atteint 47,3%, dont :
- Usage de logiciel : 44,5%,
- Recherche d’informations : 24,3%,
- Résolution de problèmes personnels : 21,9%,
- Communication en ligne : 21,5%.
Une personne sur quatre ne sait pas s’informer et une sur cinq est incapable de communiquer par le biais d’Internet
LE NIVEAU DE FORMATION APPARAIT COMME LE CRITÈRE MAJEUR DE L’ILLETTRISME NUMÉRIQUE
Le défaut de compétence numérique est fort chez les personnes n’ayant aucun diplôme[7]. Les écarts avec l’ensemble de la population est important :
- Pas d’équipement Internet : 34% (12% en moyenne),
- Non-usage d’Internet dans l’année : 41% (15%),
- Au moins une incapacité[8]: 84% (47%),
- Illectronisme : 44% (17%).
LA SITUATION DES CHÔMEURS EST PLUTÔT BONNE, MAIS DES DIFFICULTÉS DEMEURENT.
Les freins que rencontrent les chercheurs d’emploi sont les suivants :
- Illectronisme pour 9%,
- Pas d’équipement Internet pour 11%,
- Non-usage d’Internet dans l’année pour 8%,
- Au moins une incapacité (recherche d’information, communication, résolution de problèmes l’usage de logiciels) pour 42%.
Il existe un certain écart entre les actifs au chômage et les personnes en emploi, mais il apparait assez réduit[9]. Il s’explique sans doute en partie par la surreprésentation de personnes non qualifiées.
Les chômeurs ont des compétences numériques proches de celle des actifs en emploi et donc bien supérieures à la moyenne[10].
Mais un « blocage » demeure pour environ 10% et des difficultés diverses pour 42%.
L’absence de compétences se traduit très concrètement au niveau de :
- La consultation pertinente des offres d’emploi,
- La recherche effective des informations sur les employeurs potentiels (candidature spontanée),
- La maitrise du traitement de texte pour réaliser ses CV et ses lettres de motivation, ou la pratique d’un tableur ou d’une application pour le suivi de ses candidatures,
- La gestion des abonnements aux sources,
- L’envoi correct et rapide des messages aux recruteurs,
- l’utilisation des réseaux sociaux professionnels, etc.
LE « 100% WEB » DEVRAIT ENTRE RÉDUIT À UN « 50% WEB » POUR TENIR COMPTE DE LA RÉALITÉ SOCIALE.
La formation des demandeurs d’emploi (comme des actifs en emploi) à la maitrise de compétences numériques est une priorité.
L’illettrisme numérique apparait comme un frein concret à l’embauche. Le déni de ce manque de compétences doit être combattu. Il semblerait judicieux de valider, à partir de la base, la maitrise de ces compétences par les demandeurs d’emploi.
En attendant des améliorations, le maintien d’un contact physique dans l’accompagnement de la recherche d’emploi apparait incontournable. Le « 100% web », prôné par Pôle emploi, gagnerait à être réduit à un « 50% web », dans l’immédiat du moins.
[1] Insee Première – No 1780 – Paru le : 30/10/2019 – https://www.insee.fr/fr/statistiques/4241397
[2] « En 2019, 12 % des individus de 15 ans ou plus résidant en France hors Mayotte ne disposent d’aucun accès à Internet depuis leur domicile, quel que soit le type d’appareil (ordinateur, tablette, téléphone portable) et de connexion. Ce taux a baissé de 21 points depuis 2009. »
[3] Un contrôle par examen en situation conduirait à un chiffre supérieur.
[4] « Les personnes les plus âgées, les moins diplômées, aux revenus modestes, celles vivant seules ou en couple sans enfant ou encore résidant dans les DOM sont les plus touchées par le défaut d’équipement comme par le manque de compétences. »
[5] Source Eurostat
« Ces compétences sont mesurées à partir des déclarations sur le fait d’effectuer certaines tâches dans l’enquête annuelle auprès des ménages sur les technologies de l’information et de la communication, menée dans tous les pays de l’Union européenne. »
[6] Part de personnes ayant une incapacité ou en situation d’illectronisme
Ensemble de la population | Parmi les usagers d’Internet | |
Illectronisme | 16,5% | 1,6% |
Au moins une incapacité/incompétence | 47,3% | 37,9% |
Usage de logiciel | 44,5% | 34,5% |
Recherche d’information | 24,3% | 10,7% |
Résolution de problème | 21,9% | 8,0% |
Communication en ligne | 21,5% | 7,5% |
[7] « Parmi les usagers d’Internet dans l’année âgés de 18 à 64 ans (hors étudiants et retraités), le diplôme est, toutes choses égales par ailleurs, le facteur le plus discriminant en matière de compétences numériques de base. »
[8] Information, communication, logiciel ou résolution de problème.
[9] « Ce résultat pourrait refléter la nécessité qu’ils ont de consulter régulièrement Internet et, notamment, le site de Pôle emploi. »
[10] Caractéristique des actifs en emploi et au chômage par rapport à la moyenne.
Pas d’équipement Internet | Non-usage d’Internet dans l’année | Au moins une incapacité | Illectronisme | |
En emploi | 3% | 4% | 35% | 4% |
Chômeur | 11% | 8% | 42% | 9% |
Ensemble | 12% | 15% | 47% | 17% |
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