Alors que les débats électoraux actuels portent sur la décentralisation, le gouvernement tente une recentralisation du financement du RSA.
Il engage dans un premier temps une expérimentation concernant deux départements métropolitains[1] : les Pyrénées-Orientales et la Seine-Saint-Denis, via le décret du 4 mars 2022[2].
« Dès 2022, et durant les cinq prochaines années, l’État reprend à sa charge le paiement de l’allocation et les caisses d’allocations familiales et de mutualité sociale agricole sa gestion. »
DES TERRITOIRES CONFRONTES A DES DIFFICULTÉS EXCEPTIONNELLES SONT CIBLES
Cette expérimentation est présentée comme devant permettre de favoriser le retour à l’emploi des bénéficiaires du RSA, dans des territoires confrontés à des difficultés exceptionnelles.
Les critères de choix des départements concernés sont :
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Un reste à charge au titre du RSA, qui explique l’acceptation forcée de ces deux départements faute de moyens financiers pour faire face[3],
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Une proportion de bénéficiaires du RSA significativement plus importants que la moyenne nationale,
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Un revenu moyen par habitant significativement plus faible que la moyenne nationale, corrélé au taux de pauvreté.
La publication des données relatives à ces départements donne une idée de la place sociale que peut prendre le RSA :
« La Seine-Saint-Denis connaît un taux de pauvreté de 28,6%, égal au double de la moyenne nationale et compte 90 000 bénéficiaires du RSA dont 44% de bénéficiaires inscrits à l’allocation depuis plus de 5 ans. »
« Les Pyrénées-Orientales connaissent un taux de pauvreté de 20,5% et une part de la population active bénéficiaire du RSA (9,8%) supérieure aux moyennes régionales (6,6%) et nationales (5,6%) ; 51% des bénéficiaires du RSA percevant l’allocation depuis plus de 5 ans. »
LES INDICATEURS DE RÉUSSITE DE CETTE EXPÉRIMENTATION SERONT CONNUS EN 2026.
Les résultats devraient indiquer, d’ici à 2026 :
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L’augmentation effective des moyens dédiés à l’insertion (effectifs des personnel en charge de l’accompagnement),
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De meilleurs taux d’accès à l’emploi et à la formation qualifiante des bénéficiaires du RSA, c’est-à-dire une baisse significative des bénéficiaires[4].
« Dans ces deux territoires, État et Département suivront conjointement les réalisations et les résultats, en y associant les autres acteurs de l’emploi et de l’insertion. »
L’ARTICULATION DES POLITIQUES PUBLIQUES D’AIDE SOCIALE PARAIT MÉRITER UN EXAMEN APPROFONDI.
La formule du ministère qui suit donne une idée de l’imbrication actuelle des mesures.
« Cette expérimentation s’inscrit ainsi pleinement dans la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté et en cohérence avec l’ensemble des mesures prises pour favoriser l’insertion des personnes les plus éloignées de l’emploi, dont le Service Public de l’Insertion et de l’Emploi[5] et le plan de relance pour l’inclusion. »
Enfin, cette expérimentation sur le RSA semble tourner le dos au projet de « Revenu Universel d’Activité », envisagé un temps par le gouvernement[6], regroupant diverses aides sociales en un unique dispositif.
Une clarification des perspectives parait nécessaire au second semestre 2022, après la période électorale d’avril à juin 2022.
Pour mémoire : Le SPIE concerne tous les publics rencontrant des difficultés sociales et professionnelles dans leur accès au marché du travail : allocataires du RSA, jeunes, personnes en situation de handicap, chômeurs de longue durée, etc.
[1] « Cette expérimentation est déjà lancée outre-mer : en Guyane, à Mayotte et à la Réunion.
[2] « Le décret n° 2022-322 du 4 mars 2022 relatif à la liste des départements retenus pour participer à l’expérimentation prévue par l’article 43 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre2021 de finances pour 2022 acte le début de l’expérimentation en Seine-Saint-Denis et dans les Pyrénées-Orientales. »
[3] « Un dialogue constructif a permis de définir les actions d’insertion que les Départements se sont engagés à réaliser, tout en adaptant ces objectifs à la situation de chaque territoire. »
[4] D’ici 2026, en Seine-Saint-Denis, le nombre de référents dans les parcours sociaux et socio-professionnels sera doublé, passant de 170 à 340, ainsi que le nombre de places dans des actions d’insertion, passant de 6 350 à 12 700.
D’ici 2026, dans les Pyrénées-Orientales, le nombre de professionnels dédiés spécifiquement à l’accompagnement et à l’insertion des bénéficiaires du RSA augmentera de 77 ETP tandis que le nombre de places et d’aides financières individuelles pour la levée des freins mobilité et santé dans l’accès à l’emploi sera augmenté de 69%.
[5] Le Gouvernement a lancé une concertation nationale et soutenu 14 territoires d’expérimentation qui ont permis de définir la méthode du SPIE pour renforcer l’efficacité de l’accompagnement vers l’emploi pour les personnes qui rencontrent des difficultés particulières pour s’insérer sur le marché du travail. Le service public de l’insertion et de l’emploi est une méthode pour que toutes les structures appelées à intervenir dans le parcours vers l’emploi d’une personne (Conseil départemental, Pôle emploi, Caisse d’allocations familiales, Cap emploi, mission locale, associations, CCAS, etc.) se coordonnent et simplifient ses démarches. Début 2022, ce sont 79 territoires qui déploient le service public de l’insertion et de l’emploi. 80 % du territoire national est désormais engagé dans la dynamique.
[6] « Notre système de solidarité est complexe, à tel point que bon nombre de personnes renoncent à faire valoir leurs droits. Il n’offre pas non plus toutes les conditions pour un retour rapide à l’emploi. La création d’un revenu universel d’activité a pour objectif de rénover en profondeur le système de prestations monétaires versées aux ménages modestes en fusionnant le plus grand nombre possible de prestations, cela afin que chacun puisse s’y retrouver, vivre décemment et accéder plus rapidement à l’emploi. » https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/lutte-contre-l-exclusion/lutte-pauvrete-gouv-fr/la-mise-en-oeuvre/renforcer-l-acces-aux-droits/revenu-universel-d-activite-la-concertation/article/vers-un-revenu-universel-d-activite
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