UNE CONCURRENCE ENTRE INTÉRIMAIRES ET TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS EST ÉVOQUÉE SUR LA MARCHE DU TRAVAIL
Pôle emploi vient de publier un article intitulé « L’essor de la microentreprise a-t-il une influence sur l’intérim ?[1] » concernant le transfert supposé qui se produirait du recours à l’intérim[2] vers l’achat de prestations, assurées par un micro-entrepreneur. C’est-à-dire une concurrence entre deux formes de travail.
Ce sujet est couramment évoqué par des professionnels de l’emploi, dans certaines spécialités.
En arrière-plan, on peut expliquer cela par le fait que l’achat d’une prestation couterait moins cher que le paiement d’un intérimaire (même si, en définitive, la comparaison n’est pas si simple, car le service rendu peut différer).
Le phénomène ne me parait pas bien mesuré. Il est difficile d’affirmer s’il s’agit d’une tendance lourde ou bien d’une pratique assez ponctuelle ciblée sur certains métiers.
L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS N’EST PAS SIGNIFICATIVE
Les effectifs de l’intérim ont baissé de 1% entre 2017 et 2018 (-8 000 postes[3]). Entre débuts 2018 à fin septembre 2019, ils ont baissé progressivement de 22 000, soit 2,7%.
Le nombre de non-salariés entre 2017 et 2018 a augmenté de 70 000 personnes, soit +2,46% (contre +0,62% pour les emplois salariés)[4]. Mais il est difficile de savoir quels sont la nature et le niveau des activités des non-salariés (équivalent salaire du chiffre d’affaires).
Donc le rapprochement entre ces deux chiffres n’apparait pas significatif. Le recul de l’intérim reste limité, et explicable dans un contexte de chute de la croissance entre 2017 à 2019.
Le décompte est compliqué dans la mesure où une personne peut évidemment avoir les deux statuts et travailler comme intérimaire un jour et indépendant le lendemain, même si la couverture sociale est moindre.
Bpifrance propose, à ce propos, une analyse détaillée du cumul les conditions d’une activité indépendante avec un emploi salarié, intérimaire ou non[5].
DES PLATEFORMES DE RECRUTEMENT DE TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS SE SONT DÉVELOPPÉES SUR INTERNET
Elles peuvent constituer un moteur pour favoriser le travail des indépendants.
Plusieurs sociétés proposent des plateformes de recrutement de travailleurs indépendants sur internet comme Malt[6], Upwork[7], Staffme[8], Studentpop[9], Brigad[10], etc.
Ces plateformes, souvent spécialisées sur des secteurs (digital, communication, graphisme, vente, services de restauration, évènementielle, etc.[11]), proposent leurs services à des indépendants.
Par exemple, Upwork, plateforme généraliste pour indépendants, la plus utilisée sur du web, est centrée sur les graphistes et designers, les développeurs, les fonctions supports (administration, comptabilité, finance et marketing) et les rédacteurs et traducteurs.
Ces plateformes proposent des services divers et diverses tarifications de leurs interventions. Par exemple, la plateforme spécialisée dans les métiers de la rédaction web, redacteur.com, prend 30% de commission sur chaque commande passant par le site.
Enfin, pour compliquer le tableau, il est probable que certaines de ces plateformes développeront des services de sociétés d’intérim en ligne, quand elles atteindront un certain niveau de développement !
DES SOCIÉTÉS D’INTÉRIM ONT RÉAGI.
« Les acteurs de l’intérim suivent attentivement le développement de la microentreprise. »
Par exemple, Adecco a choisi de créer sa propre plateforme de recrutement de travailleurs indépendants sur internet, dénommée « Yoss »[12]. Elle s’adresse à des indépendants qui peuvent répondre aux offres, tout en étant également des intérimaires référencés par Adecco. Cette plateforme prendrait une commission d’environ 10% et gère les règlements pour les indépendants. Elle vise en premier lieu aux grandes entreprises, déjà clientes de leur réseau d’agences. Cela constitue un volet d’une collaboration plus générale concernant la stratégie de recrutement. Tandis que les plateformes, citées précédemment, travaillent le plus souvent avec des start-ups ou des PME.
CE MOUVEMENT EST À SUIVRE SUR LE PLAN ÉCONOMIQUE ET SOCIAL.
La modification des comportements des employeurs et des travailleurs est difficilement prévisible. De plus, la réforme de l’indemnisation chômage risque de toucher, une part au moins, des intérimaires, des bénéficiaires de contrats courts, des saisonniers, des semi-indépendants, etc. quelque soit leur âge : des étudiants ou jeunes débutants jusqu’aux retraités conservant une activité.
[1] Publié le 12/12/2019 – http://www.emploiparlonsnet.pole-emploi.org/articles/lessor-de-la-microentreprise-a-t-il-une-influence-sur-linterim/
[2] « Plus que jamais, l’intérim reste l’outil privilégié des entreprises pour ajuster leurs effectifs, au plus près des besoins de leur activité. » – Pôle emploi
[3] Moins 7 982 pour être précis, selon les chiffres de l’Acoss.
[4] Source Insee.
[5] Un salarié qui crée son entreprise peut rester salarié chez son employeur actuel à la condition qu’il respecte son obligation de loyauté et que sa nouvelle activité ne soit pas susceptible de le concurrencer. https://bpifrance-creation.fr/encyclopedie/statut-social-fiscal-lentrepreneur/situation-pluriactifs/cumul-dune-activite
[7] Cette plateforme américaine de recrutement de travailleurs indépendants sur internet, en anglais uniquement, est la plus utilisée sur du web
[8] « L’utilisation de StaffMe correspond soit à un complément d’activité, à côté des études par exemple, ou à une période transitoire, comme une année de césure » – www.staffme.fr
[9] Pour des missions à des étudiants – www.studentpop.fr
[10] Brigad met en relation des établissements avec du personnel qualifié dans l’hôtellerie restauration. https://brigad.co/fr-FR
[11] Lire par exemple : « Top 10 des plateformes pour les freelances » – 12 juillet 2019 – https://www.portail-autoentrepreneur.fr/academie/comparatifs/plateformes/10-sites-mise-en-relation-freelances
[12] Yoss est une marque d’Adecco, créée en 2017, en partenariat avec Microsoft. Elle vise à rapprocher des indépendants et les grands groupes. – https://www.yoss.com/fr/fr/
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