L’AVENIR DÉPEND DE LA SIGNATURE, OU NON, DE L’ACCORD DE RETRAIT PAR LA GRANDE-BRETAGNE
Les conséquences du Brexit sur l’emploi en France, et sur le sort des plus de 300 000 expatriés français en Grande-Bretagne, sont en train de se dessiner. Il reste incertain en fonction du devenir de l’accord de retrait[1] du Royaume-Uni conclu, entre les 27 pays de l’Union européenne et la Première ministre britannique, le 11 décembre, au parlement britannique…
Le sort des expatriés européens, dont les Français, en Grande-Bretagne, et réciproquement, est lié à la ratification de l’accord, qui précise leur statut[2].
Les pronostics sur la ratification de l’accord[3] sont encore assez partagés[4], mais la crainte d’une « sortie sans accord » apparait sérieuse, d’autant que l’échéance du 29 mars 2019 apparait chaque jour plus proche.
Une sortie « sans accord » imposerait des mesures unilatérales, de part et d’autre, de la Manche. La France se trouverait évidemment en première ligne (proximité, ferry, liaison ferroviaire, etc.) et serait directement impactée (comme la Belgique et les Pays-Bas) dès 2019. Des dispositifs seraient prêts pour y faire face.
DE PREMIERS CONSTATS SUR L’IMPACT SUR L’EMPLOI FONT JOUR.
Plusieurs points sont à envisager, comme une relocalisation d’activités sur la France, le retour d’une part des expatriés français, une baisse des exportations vers la Grande-Bretagne, une baisse du nombre de touristes et le départ d’une part des britanniques installés en France, etc.
Dans l’immédiat, l’ambiance du Brexit aurait juste incité quelques entreprises de la finance à déplacer une part de leurs activités sur le continent, dont pour certaines en France[5]. Certains pronostiquent le transfert de 3 500 à 10 000 emplois dans ce secteur y compris des emplois induits. Quelques entreprises d’autres secteurs ont fait de même et transféré des activités vers la France. Mais aucun flux important en termes d’effectifs ne semble avoir été observé. Les transferts seraient aux mieux progressifs.
D’autre part, l’impact sur les activités des entreprises françaises commerçant avec le Royaume-Uni, et sur les emplois liés à leurs activités, ne semble pas avoir été encore anticipé (logistique, douanes, etc.), même si l’inquiétude règne dans les nombreuses entreprises concernées.
Ensuite, le flux d’expatriés français vers la Grande-Bretagne aurait nettement baissé depuis 2017, compte tenu du contexte d’incertitude sur le statut de « travailleur détaché ». Ce phénomène est à relativiser, car il faudrait pouvoir distinguer des français qui font un « passage à Londres d’un ou deux ans » pour leur parcours professionnel, de ceux qui se sont installés là-bas.
Enfin, les possibles freins à la libre circulation des personnes et des biens, en l’absence d’un accord, font craindre des réductions d’activités dans le domaine du tourisme en France, une baisse des exportations françaises vers le Royaume-Uni et un possible impact local sur les prix de l’immobilier accompagnant le départ de Britanniques installés en France[6].
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Cet aperçu des questions en suspens montre que le Brexit pourrait avoir de nombreuses conséquences sur l’emploi en France à partir du second trimestre 2019. Certaines évolutions seraient positives et d’autres négatives. Pour commencer à en juger, il faut attendre de savoir si l’accord de retrait sera adopté le 11 décembre par les parlementaires britanniques.
Nota : ce Billet n’aborde pas les problèmes relatifs à l’évolution des emplois en Grande-Bretagne. Le pays bénéficie d’un faible niveau de chômage. Il s’agit d’un autre sujet, en particulier en cas de non signature de l’accord de retrait en cours d’examen. La dévaluation de la Livre en l’absence d’accord est estimée aujourd’hui à hauteur de -25%… ce qui augurerait d’un décrochage important. Conséquence, par exemple, de plus bas salaires en Euros pour les expatriés français.
[1] L’accord de retrait de la Grande-Bretagne de l’Union européenne a été conçu comme d’application progressive et maintenant dans une première phase les intérêts en cours en termes de biens et de personnes. C’est pour cela qu’il a été adopté, le 25 novembre, par les 27 pays de l’UE à l’unanimité.
[2] Le projet d’accord confirme les dispositions négociées fin 2017 pour les résidents européens au Royaume-Uni et britanniques dans les Etats-membres de l’UE.
Ceux qui seront établis avant le 30 mars 2019 conserveraient à vie les mêmes droits à la sécurité sociale, y compris la retraite, et aux autres prestations sociales. Ils auront le même accès au travail et à l’éducation que les autres travailleurs.
Ceux qui s’établiront au Royaume-Uni entre le 29 mars 2019 et la fin de la période de transition auront un droit de résidence permanent au bout de cinq ans de séjour. Ce droit sera perdu après cinq ans d’absence.
[3] Le projet d’accord entre Londres et Bruxelles du 13 novembre détaille sur 585 pages les dispositions qui prévaudraient durant la période de transition. L’accord porte sur la période allant du 30 mars 2019 au 31 décembre 2020. Mais elle pourrait être prolongée de deux ans sur accord de Londres et Bruxelles. Le Royaume-Uni et l’Union européenne resteraient durant cette période un « territoire douanier unique ».
Jusqu’à la fin de la période de transition, les Britanniques dépendraient de la juridiction de la Cour de justice de l’Union européenne pour les questions touchant aux règles européennes.
[4] A ce jour, Thérèsa May ne semble pas disposer de la majorité au parlement.
[5] Des mesures prises en 2017, comme l’exonération d’impôt sur la fortune pour les actifs financiers ou la «flat tax» sur les revenus du capital, l’ont été, en partie, pour afficher l’attractivité de la France dans ce contexte du Brexit.
[6] Des britanniques ont acheté de nombreuses résidences principales, ou secondaires, sur certains départements français. C’est cette concentration qui peut modifier le marché de l’immobilier localement.
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