La filière automobile française est engagée dans une décroissance progressive[1] qui impacte l’emploi.
Selon la Plateforme française de l’automobile (PFA)[2], le nombre des emplois dans la filière vont diminuer assez rapidement entre 65 000 et 100 000 postes.
Cette évolution, déjà ancienne, a pris la forme de délocalisations de la production.
Aujourd’hui, les choix technologiques, avec l’abandon du diesel, l’obligation de la voiture électrique (voire à hydrogène), etc., conduisent à réduire ou fermer de nombreuses usines.
Les composants des nouveaux modèles proviennent principalement de l’étranger.
C’est pourquoi la poursuite de la construction massive de voitures en France ne parait pas acquise.
L’objectif affiché par le Président de la République de fabriquer en France deux millions de voitures électriques et hybride[3] semble difficile à concrétiser.
La part des équipements de ces voitures, produits à l’étranger (en Asie), devrait être dominant.
En particulier, les projets de fabrication de batteries électriques pour automobiles, sur le territoire national, devraient rester marginal, même si les 3 ou 4 projets annoncés se concrétisent, ce qui est loin d’être acquis…
Les interventions gouvernementales sont complexes. Elles sont clairement destinées à amortir la tendance engagée.
Les fermetures d’usines de constructeurs, équipementiers et sous-traitants sont destinés à se multiplier.
LA FILIÈRE AUTOMOBILE EMPLOIERAIT ACTUELLEMENT 400 000 EMPLOIS, DONT 40 000 EN INTÉRIM, EN FRANCE.
Les effectifs de la filière seraient répartis dans environ 4 000 entreprises.
L’organisation professionnelle, Plateforme automobile française (PFA), estime que 65 000 emplois vont être détruits du fait des transformations actuelles (pénuries de composants importés, etc.) et à venir (transition énergétique : électricité, hydrogène, etc.) en fonction de projections à confirmer.
La fabrication des véhicules électriques nécessite moins de main-d’œuvre que les véhicules thermiques[4].
Cette estimation tient compte du solde net entre les destructions et les créations de nouveaux emplois. Il correspond à un rebond de l’industrie automobile française.
Dans la tendance actuelle, sans un rebond, la disparition de 100 000 emplois est envisageable, selon la PFA.
Le ministre de l’Économie appelle à la transformation des usines.
« Nous ne réussirons pas les transitions si elles sont brutales, et se traduisent par de la violence sociale ».
LES DÉCISIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SEMBLE DEVOIR CONDITIONNER LE MARCHE
En effet, la Commission européenne compte interdire la vente de véhicules thermiques en 2035.
Le président de la PFA estime que l’Union européenne a fait « un choix politique qui entraîne la disparition de pans entiers de l’industrie ».
Cette évolution nécessite le déploiement de bornes de recharges pour véhicules électriques, mais aussi et surtout une augmentation de la production électrique correspondant à la demande générée.
La promotion de la voiture électrique décidée par le gouvernement pèse lourdement sur la filière française, car les composants viennent essentiellement d’Asie.
La production française se trouve très directement menacée. Les industriels demandent que le gouvernement continue à défendre les véhicules hybrides, produits en France, pour amortir le choc.
UNE NOUVELLE DIMINUTION DES EFFECTIFS DEVRAIT INTERVENIR A COURT TERME.
Selon le président de la Fiev (Fédération des équipementiers automobiles), « la filière va encore perdre 45 000 emplois au minimum dans les trois ans » (…) « soit quasiment 15% des effectifs ».
Les principales victimes seraient « les forges, fonderies, activités mécaniques ».
Quant à lui, le président de la PFA estime que la filière française pourrait « perdre 32 000 emplois d’ici à 2025, 100 00 d’ici à 2035 ».
CETTE DESTRUCTION D’EMPLOIS DANS CETTE FILIÈRE EST DÉJÀ BIEN ENGAGÉE
Depuis 2005, les constructeurs, équipementiers et carrossiers auraient perdu le tiers de leurs effectifs en France[5].
Entre 2005 et 2020, Renault aurait diminué ses effectifs de 31% pour se situer à 48 500 personnes. PSA les aurait baissés de 50% pour en arriver à 62 000.
- Les fournisseurs automobiles se serait séparés de la moitié de leur personnel en France.
- Les équipementiers emploient aujourd’hui moins de 70 000 salariés, contre 110 000 il y a cinq ans !
Après trente ans de délocalisations, les usines de Renault, Toyota et Stellantis du territoire ont produit 2,2 millions de véhicules en 2019, toutes motorisations comprises, au lieu des 3,5 millions antérieurs.
Le ministre de l’économie appelle à une relocalisation de production[6] :
« Là où il y a une forte valeur ajoutée, il doit y avoir des emplois maintenus en France »[7].
Mais la concrétisation des relocalisation ne semble pas évidente. La fabrication de produits nouveaux, répondant aux besoins émergents, apparait la seule solution.
LE GOUVERNEMENT INTERVIENT SUR CE SECTEUR, MAIS SELON UN SCHÉMA COMPLEXE DIFFICILE A COMPRENDRE[8].
En mai 2020, un plan de relance automobile a été doté de huit milliards d’euros[9]
En particulier, le Fonds de modernisation pour la filière automobile[10], 303 entreprises de la filière, essentiellement des PME, ont été financées à hauteur de 278 millions d’euros par l’État pour se moderniser et se diversifier. Les 793 millions d’euros d’investissement industriels mobilisés auraient permis de conforter près de 10 000 emplois.
Le PFA estime les investissements nécessaires à réaliser en France à 17,5 milliards d’euros, sur cinq ans pour réaliser la transition. Le besoin de soutien public serait à hauteur de 30%.
Début octobre, l’état a annoncé l’attribution de deux milliards d’euros supplémentaires. La ventilation reste à préciser.
Un nouveau plan pour les équipementiers automobiles assurant la production de composants pour les moteurs thermiques (dont diesel) devrait être annoncé par le gouvernement, pour répondre à l’accélération de la transition électrique de cette industrie[11].
[1] « Ce n’est pas un hasard si la France est passée de la 2e à la 5e place en termes de production de véhicules en voyant chuter son volume annuel de 3,5 à 2 millions. » – Président PFA.
[2] La Plateforme automobile PFA rassemble la filière automobile en France. Elle définit et met en œuvre, au nom de l’ensemble des partenaires (constructeurs, équipementiers, sous-traitants et acteurs de la mobilité), la stratégie de la filière en matière d’innovation, de compétitivité, d’emploi et compétences. Elle porte la voix et l’expression des positions communes de la filière. Elle est, par ailleurs, le maître d’ouvrage du Mondial de l’Auto. https://pfa-auto.fr/
Sa gouvernance s’appuie sur un Conseil des présidents constitué d’un collège des constructeurs français (STELLANTIS, RENAULT, CCFA), et d’un collège équipementiers et sous-traitants (FAURECIA, MICHELIN, PLASTIC OMNIUM, VALEO, FIEV, Fédérations métiers : FFC, FIM, GPA, SNCP).
[3] Le Président de la République a évoqué un objectif de « près de deux millions de véhicules électriques et hybrides » produits en France à horizon 2030.
[4] « La transition énergétique pourrait faire perdre 65 000 emplois à la filière » – PFA.
[5] « Constructeurs, équipementiers et carrossiers ont perdu le tiers de leurs effectifs entre 2005 et 2018 (à 205.000 salariés) dans l’Hexagone. »
[6] « Relocalisez les chaînes de valeur de vos produits en France » a déclaré Bruno Le Maire aux industriels.
[7] « Je ne vois qu’une seule stratégie, foncer. Mais avec des orientations qui soient claires pour que chacun puisse s’y retrouver. » – Le ministre de l’Economie
[8] https://www.economie.gouv.fr/plan-de-relance/nouvelles-mesures-soutien-filiere-automobile#
[9] Le plan de soutien de mai 2020 comportait des mesures destinées à accompagner la reconversion des salariés.
[10] https://www.economie.gouv.fr/plan-de-relance/nouvelles-mesures-soutien-filiere-automobile#
[11] « On est en train de basculer vers l’électrique à un rythme beaucoup plus rapide que prévu. » – Le ministre de l’Économie.
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