Le Conseil d’Orientation des politiques de Jeunesse (COJ) est très critique vis-à-vis de la formule annoncée du Contrat d’engagement jeunes (CEJ).
Il vient de formuler 9 conditions de réussite[1] et 32 recommandations dans un rapport.
La première des 9 « conditions de réussite du Contrat d’Engagement Jeune », définie par le Conseil d’Orientation des politiques de Jeunesse (COJ), concerne la définition des publics bénéficiaires du dispositif[2].
La question de la clarification des publics concernés apparait effectivement centrale.
Le Contrat d’Engagement Jeune s’adresse à
« tous les jeunes de moins de 26 ans (et de moins de 30 ans pour les jeunes en situation de handicap), qui sont durablement sans emploi, ni formation, souvent par manque de ressources financières, sociales et familiales et qui souhaitent s’engager activement dans un parcours vers l’emploi »[3].
« Ce nouveau dispositif cible ainsi une catégorie de NEET vulnérables[4]. »
LE COJ MET EN CAUSE CE CIBLAGE SUR LES SEULS JEUNES NEET.
« Le COJ réaffirme la nécessité de prendre en considération certains publics qui ne répondent pas au critère de « NEET » obligatoire pour bénéficier du Contrat d’Engagement Jeune. »
Il cite plusieurs catégories :
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Des jeunes travailleurs pauvres,
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Des jeunes qui suivent des formations à temps partiel ou de courte durée,
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Des sortants de l’enseignement supérieur, diplômés ou non. C’est-à-dire :
« Des jeunes de moins de 25 ans primo-demandeurs d’emploi sortant de formation ou d’études supérieures et qui ne disposent d’aucune aide financière pour les aider dans leur recherche d’emploi (leur situation s’est davantage dégradée avec la crise sanitaire de 2020). »
Les jeunes, qui disposait d’une indemnisation chômage pour avoir travaillé 4 mois sur les 28 derniers mois, c’est deux mois de vacances où ils avaient travaillé deux ans de suite, ont perdu ces 4 mois d’indemnisation suite à la réforme de l’assurance chômage. Atteindre 6 mois sur 24 mois met sciemment un terme à cette possibilité.
LE CAS DES ANCIENS BOURSIERS RESTE EN SUSPENS.
Par ailleurs, le COJ s’interroge sur une mesure destinée à être suspendue : « la prolongation au-delà du 31 décembre 2021 de l’aide financière[5] accordée aux jeunes diplômés anciens boursiers à la recherche d’emploi ».
C’est-à-dire qu’il s’interroge sur les modalités de prise en charge de ces jeunes diplômés de l’enseignement supérieur dans le Contrat d’Engagement Jeune.
Celui-ci n’est effectivement pas prévu à ce jour.
Le COJ appelle à une articulation entre le CEJ et la sortie des étudiants des aides sociales des Crous (bourses, aides sociales d’urgence).
« Des jeunes étudiants boursiers en situation de décrochage dans leur formation. Un travail doit être engagé avec les services du CNOUS et les CROUS pour travailler l’articulation avec le Contrat d’Engagement Jeune pour éviter les fins de prise en charge par les CROUS (bourses, aides sociales d’urgence), soit en sortie de formation, soit lors d’une situation de décrochage. »
Cette piste semble ne pas devoir se concrétiser en 2022.
LE GOUVERNEMENT A ANNONCE FAIRE DU CONTRAT D’ENGAGEMENT JEUNE UN DROIT OUVERT, MAIS L’INTENDANCE NE SUIT PAS !
Dans la réalité, le Contrat d’Engagement Jeune n’est pas un « droit ouvert »[6] puisque l’enveloppe budgétaire du Projet de loi de finances 2022 ne permettrait d’accompagner que 400 000 bénéficiaires sur 9 mois.
Le COJ pose une question dont la réponse est prévisible :
« Au regard de ce constat, quelle réponse sera apportée face à un volume plus important que prévu de demandes de jeunes et comment garantir que la mesure ne subisse pas les logiques de « stop and go » budgétaires au gré des projets de loi de finances ? »
Le COJ avait formulé des préconisations pour simplifier les procédures[7] qui n’ont pas été suivies à ce jour.
« Au regard de la complexité de fournir des pièces justificatives chez certains jeunes, le COJ s’inquiète des risques d’éviction des publics les plus en difficulté. »
Compte tenu d’un nombre de bénéficiaires limités, parmi les NEET et encore davantage sur un public plus large, la question des critères de choix des bénéficiaires du CEJ reste à préciser davantage.
« Dans la mesure où l’éligibilité au Contrat d’Engagement Jeune et à son allocation sera décidée par le conseiller de la mission locale ou par le conseiller de Pôle Emploi, des disparités pourraient apparaître selon les opérateurs et les territoires. Le COJ recommande ainsi de préciser davantage les faisceaux d’indices caractérisant les diverses situations de ces publics éligibles et les différents niveaux de l’allocation. »
Au final, l’intégration systématique des publics jeunes vulnérables au dispositif d’accompagnement n’aura pas lieu en 2022.
[1] Les 9 conditions de réussite évoquées par le COJ sont les suivantes.
- Clarifier la cible du public concerné
- Définir un statut du jeune et éviter les concurrences entre dispositifs
- Supprimer la durée pour encourager la solvabilité des jeunes
- Faciliter l’accès des jeunes aux droits sociaux connexes
- Garantir un parcours adapté à la situation du jeune
- Intégrer les jeunes protégés ou ayant été protégés par la protection de l’enfance
- Formaliser l’amont et l’aval du Contrat d’Engagement Jeune
- Établir un pilotage national et territorial de la mesure
- Engager une évaluation du Contrat d’Engagement Jeune
[2] « Clarifier la cible du public concerné »
[3] Dossier de presse du Gouvernement – « Lancement du Contrat d’Engagement Jeune pour les jeunes les plus éloignés de l’emploi » du 2 novembre 2021.
[4] Ce dispositif doit également prendre en compte le jeune sous-main de justice.
[5] « Cette aide financière a été mise en place en janvier 2021 dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ». Elle concerne tous les jeunes de moins de 30 ans diplômés en 2020 ou 2021 d’un bac +2 minimum, inscrits à Pôle emploi et ayant bénéficié d’une bourse sur critères sociaux au cours de leur dernière année d’étude. D’un montant équivalant à 70% du montant net de la bourse, cette aide est versée pendant quatre mois consécutifs. Une aide forfaitaire complémentaire de 100 euros est versée lorsque le jeune habite dans son propre logement. »
[6] « Selon l’amendement déposé le 3 novembre dernier dans le projet de loi de finances 2022, le Gouvernement a annoncé faire du Contrat d’Engagement Jeune un droit ouvert. » COJ.
[7] « Il est, en effet, important d’instaurer davantage de souplesse dans l’instruction des demandes : Supprimer la commission locale chargée de prendre des décisions d’admission pour les situations dérogatoires ; Supprimer la demande de pièces justificatives liée à la situation des parents ou des représentants légaux ; Accompagner les jeunes qui ne sont pas en mesure de disposer d’un compte bancaire (notamment ceux en situation d’interdit bancaire en raison de leur surendettement, les mineurs non accompagnés qui peuvent rencontrer des difficultés d’ouverture de compte bancaire) ; Faciliter l’intégration des jeunes qui sont dans une démarche d’élaboration ou de renouvellement de leurs papiers d’identité (délais d’obtention souvent très longs de 3 à 4 mois). » COJ.
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