L’AVENIR DE L’EMPLOI EST PROGRESSIVEMENT DEVENU UN SUJET DE RECHERCHE ET DE PRÉOCCUPATION.
Les pronostics de diminution du nombre d’emplois lié aux développements des communications et des outils numériques, existants ou futurs[1], sont à considérer avec prudence. Divers chiffrages sur le nombre d’emplois menacés par le « numérique », pris au sens large, sont ainsi annoncés[2]. Des rapports annoncent des suppressions de postes par millions au niveau mondial. Nous sommes ainsi entrés dans une période où des scénarios d’emploi-fiction inquiétants évoquent de sérieuses craintes sur l’avenir de l’emploi au niveau mondial[3].
Ces prévisions supposent que la création de nouveaux emplois ne viendrait pas compenser les destructions pour plusieurs raisons. La révolution numérique (4ème révolution industrielle) impliquerait des changements trop rapides, concernant tous les secteurs y compris le tertiaire, car transformant profondément des activités de service, impactant des métiers intellectuels et conduisant à de graves inégalités sociales, car profitant à une population restreinte. Il y aura de profondes modifications dans l’organisation du travail dans les années à venir, mais la prévision est difficile.
DES EMPLOIS ENCORE INCONNUS SERONT À CRÉER À L’AVENIR
Pour répondre à la disparition de métiers ou de fonctions dans les entreprises, il faudra créer des autres emplois pour éviter le maintien, ou le développement, du chômage de masse. La crainte provient en partie du fait que l’on connait les métiers menacés tandis que l’on ne connait pas tous les métiers à venir, même si on tente bien de les identifier[4]. L’impression d’un saut dans l’inconnu peut voir le jour avec toutes les craintes qui en découlent. Les doutes sur les évolutions de l’organisation même du travail viennent s’ajouter au débat.
LES EMPLOIS DEVRAIENT ÉVOLUER OU CHANGER DE DIVERSES FAÇONS.
Des emplois vont connaitre une évolution progressive des compétences à mobiliser, comme c’est déjà le cas aujourd’hui. C’est par exemple le cas de l’évolution de métiers du bâtiment compte tenu des nouvelles exigences thermiques ou de ceux de l’automobile avec l’introduction d’une part croissante d’éléments électroniques ou connectés. Dans d’autres cas, les emplois à créer ne seront pas directement accessibles aux titulaires des emplois détruits à cause de la différence de niveau des qualifications requises, de la rémunération ou du statut et des lieux de travail[5]. Un simple effort de formation ne suffira pas à répondre à toutes les évolutions nécessaires.
L’existence de ces nouveaux emplois dépendra en partie des investissements des entreprises pour prendre en charge l’évolution ou la diversification de leurs activités.
En France, ces dernières décennies, beaucoup d’entreprises industrielles ont trop tardé, faute d’investissements, à robotiser leur appareil de production contrairement à la plupart des entreprises allemandes qui ont fait de plus grands efforts. C’est l’une des causes de la destruction d’une part du secteur de l’industrie et par conséquent des emplois industriels. Les entreprises, de tous les secteurs, doivent aujourd’hui réussir la transformation digitale, déjà engagée, pour éviter que ce produise un phénomène du même ordre que celui qui a touché une grande part de nos industries. Il semble nécessaire d’aborder cette évolution en conjuguant dynamisme et précautions[6].
LES CONDITIONS D’UNE DÉMARCHE VOLONTARISTE DOIVENT ÊTRE RÉUNIES
Face aux perspectives précédemment évoquées, les responsables d’entreprises, d’associations ou d’administrations[7] vont devoir conduire des changements plus ou moins profonds selon leurs activités. La responsabilité des choix et des risques leur en incombe.
Par contre, la puissance publique a vocation à chercher à connaitre et comprendre les évolutions rapides en cours pour accompagner et favoriser par tous les moyens utiles les changements incontournables des acteurs de l’économie avec comme objectif central la croissance et l’emploi.
Plusieurs pistes à suivre émergent pour prévenir l’évaporation des emplois.
- Reconnaître les secteurs qui ressentent déjà les effets du numérique au niveau de l’emploi (savoir quels emplois doivent disparaitre à terme) et tenter d’identifier ceux où les outils numériques pourraient créer de nouveaux types d’emplois.
- Analyser des fonctions qui échappent structurellement à l’automatisation pour des raisons diverses (relations humaines, complexité des services, etc.) ainsi que les fonctions liées à l’activité numérique : installation de systèmes évolutifs, maintenance numérique, contrôle et gestion qualité, gestion des risques relatifs aux systèmes et aux données, etc.
- Faire évoluer suffisamment rapidement les contenus éducatifs, en formation initiale et professionnelle, pour faire face aux effets de changements technologiques accélérés.
[1] Une estimation circule chiffrant au niveau des principaux pays industriels la perte à 5,1 millions d’emplois (perte de 7,1 face à la création de 2 millions d’emploi).
[2] Selon certaines études 42% des emplois seraient menacés en France. La méthodologie appliquée prédit que 47 % des emplois américains sont exposés « au risque d’automatisation ».
[3] Ce sujet a, en particulier, été largement évoqué au « Forum économique de Davos 2016 ».
[4] On évoque la création d’emploi dans les entreprises digitales, dans des métiers liés à l’environnement, dans la gestion des risques, etc.
[5] C’est déjà le cas dans certains secteurs industriels où des techniciens supérieurs (bac+2/3) occupent les postes occupés encore récemment par des ouvriers peu ou pas qualifiés.
[6] Pour prendre un exemple, le recours au « 100% Web » dans de nombreux secteurs (par exemple, la Banque) va rencontrer, sans aucun doute, des limites pour plusieurs raisons : des clients ou publics rétifs ou peu numérisés, des personnes insatisfaites du système, à tort ou à raison, et aspirant à des relations humaines, une insécurité sur les données et le fonctionnement, etc. Le lien social est menacé par le recours excessif aux procédures 100% Web. Cette disparition de lien social et ses conséquences gagneraient à être anticipées, et ce n’est pas trop actuellement le cas.
[7] Par exemple dans le secteur de la gestion des impôts et taxes, la gestion en ligne se met en place. Là où, il y a encore quelques décennies, régnait le manuscrit…
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