LE PLF 2020 PRÉVOIT LA POURSUITE DU DÉVELOPPEMENT DE LA PRIME D’ACTIVITÉ.
La fiche de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »[1] du PLF pour 2020 précise que son action vise à « renforcer l’accès aux droits et l’efficacité des dispositifs d’accompagnement ».
Elle concerne entre autres la « prime d’activité »[2] qui vise selon cette présentation à « valoriser le travail et inciter au retour à l’emploi ». Cette formule laisse penser que la prime d’activité fait, en quelque sorte, partie de la politique de l’emploi.
« Le Gouvernement a fait de la prime d’activité un outil central de sa politique de valorisation du travail, notamment en faveur des travailleurs les plus modestes. » – Fiche PLF 2020
Elle vise plutôt en réalité à « soutenir le pouvoir d’achat des actifs modestes », ce qui se défend tout à fait, mais n’est pas tout à fait le même objectif !
La prime d’activité tend effectivement à renforcer l’écart de revenu entre les travailleurs à faibles ressources (temps partiels et autres) et les personnes sans emploi (bénéficiant du RSA). Mais elle n’apparait pas comme une incitation forte à retravailler.
LA PRIME D’ACTIVITÉ INCITE PEU À UN RETOUR À L’EMPLOI.
Sous certaines conditions de ressources, d’âge et de résidence, la prime d’activité concerne : des salariés et fonctionnaires, des étudiants salariés, des stagiaires[3] et des apprentis, des personnes en congé parental, sabbatique, sans solde ou en disponibilité, percevant des revenus professionnels modestes, et des travailleurs non-salariés des secteurs agricole et non agricole.
La communication sur la prime, développée depuis un an, a fortement augmenté le nombre de personnes y ayant recours (et qui ne la demandait pas).
« Le dispositif atteint ainsi aujourd’hui un taux de recours de plus de 80 % et a permis d’augmenter le revenu net mensuel des travailleurs au niveau du SMIC de 100 €. » – Fiche PLF 2020
Fin aout 2019, 4,1 millions de Français touchaient la prime d’activité. Cela représente une augmentation de 1,25 million de nouveaux allocataires par rapport à 2018[4].
Le montant mensuel de la prime d’activité s’élèverait, en moyenne, à 186 euros par personne, avec de fortes variations d’un foyer à l’autre.
Deux évolutions sont prévues par le PLF 2020 :
- La revalorisation de la prime d’activité sera de 0,3 % en 2020 ; c’est à dire à un niveau inférieur à l’inflation tout comme celle des APL ou des allocations familiales.
- Le budget prévu pour la prime d’activité atteint 9,5 Md€ dans le PLF 2020. Il représente 37,5% des crédits du ministère des Solidarités). L’augmentation par rapport à 2019 serait de 8% (8,8 Md€ en loi de finances initiale). En 2017, la dépense n’était que de 5,6 Md€ (+70% sur deux ans).
Cette augmentation est due à la « revalorisation exceptionnelle » annoncée à fin 2018 et intervenue en février 2019[5] : élévation des montants, croissance du nombre de bénéficiaires (environ +700 000 personnes ont accédé à leurs droits[6]) et élargissement des critères.
LA PERTE DE L’INDEMNISATION CHÔMAGE POUR DES CONTRATS COURTS IMPOSERA UN TRANSFERT VERS LA PRIME D’ACTIVITÉ EN 2020.
Le nombre de bénéficiaires de cette prime pourrait encore continuer d’augmenter dans les mois à venir au travers :
- De démarches simplifiées et leur automatisation à partir de début 2020,
- De la perte de l’indemnisation chômage pour de nombreux chômeurs travaillant un peu, à partir d’avril 2020.
Cette augmentation du budget de +8%, mise en regard avec une revalorisation de +0,3%, semble a priori liée à la prévision du recours à la prime d’activité de demandeurs d’emploi réalisant des contrats courts qui perdant leur indemnité chômage solliciteront la prime d’activité
674 millions d’euros sont provisionnés pour ce transfert de l’indemnisation à la solidarité.
Cette somme a toute chance de s’avérer insuffisante par rapport aux demandes qui vont être faites …
CETTE ÉVOLUTION DE LA PRIME S’INSCRIT DANS LA PERSPECTIVE D’UNE REFORME PLUS GLOBALE.
Un « Revenu universel d’activité (RUA) » doit se substituer d’ici à 2023 à la prime d’activité, au RSA, aux APL, etc., la liste reste ouverte. La concertation à propos de ce projet est engagée.
Ce RUA doit déboucher sur des changements profonds, avec des gagnants et des perdants, sur un budget global qui s’annonce stable voire en diminution.
[1] Ministère des solidarités et de la santé.
[2] La prime d’activité qui a remplacé le RSA activité et la prime pour l’emploi est destinée à compléter les revenus d’activité des personnes à revenus modestes exerçant une activité professionnelle (salariée ou non). Elle est versée mensuellement par la Caf ou la CMSA du votre département, à terme échu (ainsi, la prime d’activité du mois de janvier est versée en février).
[3] « Contrairement à la rémunération de l’apprentissage et du job étudiant, la gratification de stage n’est pas considérée comme un revenu d’activité. Pour pouvoir bénéficier de la prime d’activité, le stagiaire doit donc avoir un emploi suffisamment rémunéré à côté. »
[4] Une augmentation de +52,5% par rapport au début de l’année 2018, selon la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf)
[5] « Une revalorisation exceptionnelle de la bonification individuelle de la prime d’activité est prise en compte dans les versements mensuels effectués à compter de février 2019. C’est ce que prévoit un décret du 21 décembre 2018 relatif à la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité.
Le montant maximum de la bonification individuelle de la prime d’activité est revalorisé de 90 €. Versée au titre de chaque membre du foyer bénéficiaire dont les revenus professionnels sont supérieurs à 591,77 € (59 fois le Smic horaire), cette bonification est une fonction croissante de ces revenus jusqu’à un Smic. Au-delà, le montant de la bonification reste constant. En prenant en compte l’augmentation du Smic qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2019, cette revalorisation exceptionnelle de la bonification individuelle de la prime d’activité doit permettre d’atteindre une augmentation de 100 € pour les bénéficiaires rémunérés au Smic. » – 4 février 2019 – Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre).
[6] « Par ailleurs, la prime d’activité est élargie à de nouvelles personnes. À titre d’exemple, pour une personne seule sans enfant, il est désormais possible de bénéficier de cette prime en ayant jusqu’à 1 787 € de revenus nets (contre 1 565 € auparavant). Voir le simulateur en ligne de la Caf sur la prime d’activité. » – 4 février 2019 – Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre).
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